BarCamp, TechCamp, Startup Weekend, Mobile Monday, Dakar 2.0, journée du logiciel libre (Software Freedom Day), Mobile Innovations, Africa Content Initiative, etc., depuis quelques années les initiatives visant à réunir les développeurs d’applications, les créateurs de contenus numériques, les entrepreneurs et au-delà tous ceux, spécialistes ou non, qui s’intéressent au développement de la société de l’information au Sénégal, en Afrique et dans le monde ne cessent de se multiplier. Elle est bien loin l’époque héroïque où le chapitre sénégalais d’Internet Society (ISOC-Sénégal) et OSIRIS, appuyés par quelques rares partenaires publics et privés organisaient difficilement la Fête de l’Internet dont la première édition vit le jour au Sénégal en 1999. A l’époque, il y avait plus de spectateurs que d’acteurs et les présentations, les démonstrations et les conférences l’emportaient sur les ateliers où les uns et les autres pouvaient montrer leur savoir-faire. La dernière édition de la Fête de l’Internet remonte à 2004 et sa non-organisation depuis cette date, loin de constituer un échec, symbolise bien au contraire l’atteinte de l’objectif à savoir la vulgarisation des technologies de l’information et de la communication (TIC) et leur banalisation dans la société sénégalaise. En effet, aujourd’hui, il n’est plus guère nécessaire d’organiser cette activité-phare, qui était bien isolée pour ne pas dire esseulée dans l’année malgré son grand succès populaire, puisque sourdent de partout des initiatives prises à la base par une multitude d’acteurs et non plus par une poignée d’activistes adeptes de l’évangélisation numérique. Il faut dire qu’entre temps les utilisateurs des TIC sont passés du stade du groupuscule au parti de masse pour reprendre une métaphore du champ politique. Paradoxalement, même si Internet reste le point de ralliement vers lequel tout le monde converge, ce n’est pas le monde de l’informatique et des réseaux, entendu au sens classique, qui sont à la base de ce formidable développement mais plutôt un outsider sur lequel bien peu de gens auraient parié il y a plus d’une décennie de cela, à savoir la téléphonie mobile. Le lancement de la 3G, d’abord par Expresso en 2010 puis par la Sonatel en 2011 suite aux tests menés en 2008 à l’occasion de la tenue à Dakar du sommet de l’Organisation de la conférence islamique (OCI), a entrainé un développement spectaculaire de l’internet mobile comme moyen d’accès au Net et principalement aux réseaux sociaux. Que l’on en juge, le parc d’abonnés à l’Internet mobile est passé de 16,2% des abonnés à Internet en mars 2011 à 59,5% en mars 2012. Cela étant, les Sénégalais et les Sénégalaises ne se sont pas contentés d’aller à la rencontre des TIC comme de simples consommateurs puisque l’on a vu, au fil des ans, apparaitre un nombre croissant de développeurs, de créateurs, d’innovateurs, les uns fonctionnant comme de simples geeks et les autres comme de jeunes d’entrepreneurs opérant le plus souvent dans le cadre de très petites entreprises (TPE) voire d’entreprises unipersonnelles. Il s’en est suivi un formidable élan créatif, notamment en matière d’applications utilisables à partir de téléphones mobiles, qui ont valu à nombre de jeunes sénégalais d’être primés à l’occasion de compétitions se déroulant à l’échelle de l’Afrique de l’ouest, du continent africain voire du monde. Ils contribuent ainsi au développement d’un écosystème favorable à la naissance d’une économie numérique que beaucoup appellent de tous leurs vœux mais qui peine à émerger. Cette dynamique est encouragée par des structures telles le CTIC, incubateur d’entreprises TIC, Jokkolabs, espace de coworking, la villa ACT, Mobile Sénégal, etc., qui constituent autant de plateformes favorisant la formation, l’échange d’expériences, la concrétisation de projets et finalement l’innovation. Si l’on considère le fait que dans le monde des TIC, l’innovation est fréquemment une affaire individuelle, comme le montre le parcours de nombre de grands noms du domaine, de Steve Jobs à Mark Zuckerberg, il n’est pas interdit de rêver que demain, un jeune Sénégalais ou une jeune Sénégalaise, et plus globalement un jeune africain ou une jeune africaine, sera à l’origine de la « killer application » qui, non seulement, sera utilisée par des millions d’utilisateurs à travers le monde mais lui permettra d’être milliardaire en dollars, en euros ou en…yuans, de créer des emplois et surtout d’être un modèle pour une jeunesse africaine qui aura soif de conquérir le monde plutôt que de fuir le continent.
Olivier Sagna
Secrétaire général