Rachat de Tigo : Les co-fondateurs de Wari flinguent Kabirou Mbodje et s’inquiètent pour l’avenir des deux sociétés
jeudi 10 août 2017
Pris entre le marteau et l’enclume, Kabirou Mbodje est subitement passé de héros à zéro. En effet, les actionnaires co-fondateurs de Wari, à savoir Seyni Camara, Malick Fall et Cheikh Tague, ont cloué au pilori le Pdg de Wari, en démontant non seulement le décret auquel s’accroche Kabirou Mbodje pour acquérir Tigo, en remettant en cause son patriotisme, mais aussi en se posant des questions sur l’avenir en pointillés de Tigo, si jamais la transaction est validée.
Acculés jusque dans ses derniers retranchements, Kabirou Mbodje l’est actuellement. Entre la cession de Tigo à Wari et la plainte des actionnaires co-fondateurs de Wari, Kabirou Mbodje doit se trouver un très bon marabout pour sortir de la nasse de ses adversaires. Dans un communiqué que nous avons reçu, les actionnaires co-fondateurs de Wari se sont penchés sur « les derniers rebondissements sur l’accord de cession entre Tigo et (leur) société Wari ». Ce, pour apporter une autre lecture du décret controversé qui, à leurs yeux, « ne peut pas être considéré comme une injonction de cession, mais plutôt comme un acte d’approbation qui, en aucun cas, ne dispense les parties prenantes de leurs obligations contractuelles respectives ». Raison pour laquelle, poursuivent les amis de Seyni Camara, « Kabirou Mbodje, défaillant dans le respect de ses engagements, l’interprète en sa faveur et, sans pudeur, tente de toucher la sensibilité du président de la République en louant son patriotisme en guise de remerciement ; il est passé où le sien ? Les Sénégalais ne sont pas dupes et gardent toujours en mémoire la délocalisation inqualifiable de notre cher Wari au Togo, et ce, malgré d’importants dégrèvements fiscaux gracieux de l’Etat du Sénégal ». A titre d’exemple, pour démonter le patriotisme dont fait montre Kabirou, les fondateurs et actionnaires de Wari comparent les actions de Yérim Sow et de ce dernier. « Yérim Sow a fait fortune à l’étranger, puis est venu sans tambour ni trompette réinvestir au Sénégal ; Wari a fait fortune au Sénégal avec les deniers de nos compatriotes, puis Kabirou Mbodje est allé la planquer au Togo, mieux encore, avec sa pièce d’identité française…Parlant de préférence nationale, l’opinion saura apprécier qui est vraiment patriote », renseigne le communiqué.
« Tigo risque de sombrer, faute d’assise financière, en emportant Wari dans sachute »
S’agissant de la capacité financière de Wari, Seyni Camara et Cie estime qu’elle ne permet pas d’acquérir Tigo. « Raison pour laquelle Kabirou Mbodje court dans tous les sens pour trouver des fonds, quels qu’en soient le prix et l’origine. Mais, quel bailleur conscient mettra 80 milliards de F Cfa d’argent ‘’propre’’ à disposition d’un client sous le coup de la justice pour mauvaise gestion et actes délictuels », disent-ils. Ainsi, ils attirent l’attention sur les investissements de plusieurs dizaines de milliards de F Cfa qu’attend encore Tigo pour son développement, notamment sur l’acquisition de la licence 4G dont elle ne dispose pas pour le moment. Somme toute, la question que se posent les amis de Seyni Camara vaut son pesant d’or. « Quel est l’avenir de Tigo si son prétendant n’est même pas en mesure d’honorer le prix de cession, qui plus est, Tigo doit traiter avec Wari, une société de droit togolais dont le siège est à Lomé ? ». Car, lit-on dans le communiqué, « c’est une question extrêmement délicate qui doit faire appel au sens de la mesure et de la responsabilité. Nous risquons d’assister à un véritable désastre aussi bien dans l’écosystème des Services financiers digitaux que dans celui des télécoms : Tigo risque de sombrer, faute d’assise financière, en emportant Wari dans sa chute… Il est encore temps de réagir ».
Pour ce qui des feuilletons judiciaires dignes d’une série de télénovélas pour le compte de Kabirou Mbodje, Seyni Camara et ses camarades s’inquiètent « quant à la bonne gestion du dossier Tigo ». « Nous rappelons que Kabirou Mbodje, Pdg de Wari, est toujours poursuivi par ses coactionnaires. Il est présentement inculpé pour la deuxième fois pour des faits très graves, notamment pour abus de biens sociaux et augmentation illégale de capital : réquisitoire du procureur de la République pour demande d’inculpation ; inculpation par le Doyen des juges en août 2015 et inculpation par le juge du 2ème cabinet en juin 2017 suite deuxième plainte » rappellent-ils.
Pour eux, Kabirou Mbodje ne devait pas actuellement « avoir la liberté totale de ses mouvements, encore moins continuer à administrer (notre) société ». En effet, ils fondent leurs arguments sur le fait que les faits qui incriminent Kabirou Mbodje « ont été rendues par des sommités de la justice sénégalaise qui ne peuvent quand même pas toutes se tromper ». Et de révéler : « les mesures conservatoires ne sauraient donc tarder (contrôle judiciaire, administration provisoire) ». Pour terminer, ils attirent « l’attention de tous ceux qui, durant cette période très sensible, seraient tentés de prendre des engagements ou tisser des alliances avec un double inculpé en relation avec notre société, des risques qu’ils encourent face aux autres actionnaires ». Car, menacent les actionnaires co-fondateurs, « tous les actes qui seront posés à l’encontre des intérêts de notre société, et/ou qui pourraient altérer ou aliéner son fonctionnement ou son patrimoine, seront dénoncés et leurs auteurs poursuivis auprès des instances juridictionnelles ».
Samba Thiam
(Source : Jotay, 10 août 2017)