Le rachat, pour la rondelette somme de 80 milliards de FCFA, de l’opérateur de téléphonie Tigo par Kabirou Mbodji, continue d’alimenter les conversations dans les chaumières. L’exploit réalisé par le nouveau Tycoon sénégalais a été longuement salué dans la presse et sur les réseaux sociaux, dans un bel élan de « patriotisme économique ». Pourtant, il semble, selon plusieurs observateurs très au fait de ce qui se passe dans le secteur complexe des télécoms, qu’il y a encore loin de la coupe aux lèvres.
L’Opa réalisé par le boss de Wari ne serait que la première étape d’une très longue procédure, pour voir le deuxième opérateur tomber dans l’escarcelle de la plateforme monétaire au succès insolent. En effet, souligne un de nos interlocuteurs, « on n’achète pas une compagnie de téléphonie comme on achèterait des cacahuètes car c’est un domaine très sensible et un secteur de souveraineté pour l’Etat. Il faut donner beaucoup de gages et un dossier béton pour que l’opération soit avalisée. »
Premier obstacle de taille sur le chemin du patron de Wari, il devra d’abord convaincre l’Artp, l’organe de régulation des télécoms, qui devra donner son imprimatur. Ensuite, les techniciens du ministre des finances auront leur mot à dire sur la régularité de cette importante opération financière. Last but not least, après les services d’Amadou Bâ, ce sera au tour de la Bceao de donner son accord. Pour preuve, avance notre interlocuteur, « Wari, dans sa stratégie de diversification, a récemment racheté une banque au Togo mais l’opération n’a pas encore été avalisée par la Banque centrale ».
On comprend ainsi mieux, pourquoi les négociations entre Wari et Tigo avaient été entourées du plus grand secret, Kabirou Mbodj et ses services ayant pris grand soin de verrouiller leur opération. Avec ce rachat de Tigo, le très liquide et entreprenant homme d’affaires a remporté une première manche. Reste pour lui à surmonter les autres obstacles qui se dressent sur son chemin.
Serigne Saliou Guèye
(Source : L’essentiel, 9 février 2017)