Pour que le web sénégalais cesse d’être la poubelle de la presse
mercredi 30 novembre 2011
Monsieur le ministre de la Communication, je viens par cette note vous exprimer mon profond regret et mes inquiétudes devant les dérives auxquelles nous assistons à ce jour dans l’univers des médias, le monde de l’information et de la communication dont vous avez la charge.
Vous n’êtes pas sans savoir que l’ouverture d’un média, radio, télévision, journal ou site internet obéit à certaines normes, à des règles, voire à un cahier des charges strict et rigoureux. Vous avez la charge, monsieur le ministre, de réguler les organes de presse que sont la radio, la télé et les journaux. Toutefois, vous semblez très peu vous soucier de la tragédie qui se joue sur le web sénégalais, devenu une poubelle où n’importe qui peut écrire n’importe quoi en toute impunité. Contrevérités, diffamation, atteintes à la vie privée d’honnêtes citoyens. Vous aurez sans doute constaté la floraison accrue de sites internet dont personne ne connaît les orientations encore moins les motivations. Ils se disent tous d’information, ou spécialisés dans le people, mais sans source avérée en dehors de la rumeur, sans professionnels à même de traiter l’information, ou de vérifier et de contrôler la fiabilité de ce qui est écrit sur ces pages web qui, en fin de compte, s’avèrent être une caricature du métier noble qu’est le journalisme, le devoir d’informer. Le web sénégalais, monsieur le ministre, est devenu la poubelle de la presse, une zone de non droit où des criminels opèrent en toute impunité, car ce qu’ils font relève du crime, il faudrait l’admettre.
Il vous appartient donc, à vous, d’y mettre fin dans les meilleurs délais. Personne d’autre ne le fera à votre place. Parce que cette situation ne saurait perdurer. Il est difficile certes de contrôler tout ce qui est écrit et diffusé sur la toile, mais il est de votre prérogative, monsieur le ministre, de veiller à ce que les auteurs de diffamation et d’attaques personnelles sans raison, soient lourdement punis, sévèrement réprimés, afin de servir d’exemple à ceux qui, sciemment, violent l’intimité et les vies privées de leurs compatriotes en toute impunité.
Toutefois, faudrait-il dans ce sens renforcer la loi, ou se servir des médias traditionnels que sont les journaux, radios et télévisions afin de sensibiliser les gestionnaires et gérants de sites internet, les mettre face à leurs responsabilités, et à titre d’exemple, saisir la Justice et demander si nécessaire la fermeture de tout site internet qui dérogerait à la règle. A titre d’exemple, en France, le ministère de l’Intérieur a obtenu de la Justice la fermeture d’un site spécialisé dans le fichage des policiers. Donc, il vous appartient, monsieur le ministre, de mettre en œuvre tous les moyens nécessaires aux fins de réguler l’ouverture et le fonctionnement des sites internet sénégalais basés au Sénégal, pour la plupart.
Monsieur le ministre, vous n’êtes pas sans savoir que ces sites ont plus que nui et continuent de nuire à la réputation de bon nombre de nos compatriotes, lesquels se demandent s’il leur faut saisir les juridictions compétentes pour laver leur honneur, et mettre fin à l’anarchie ambiante, en d’autres termes, nettoyer au kärcher la poubelle qu’est devenue la presse en ligne sénégalaise.
De simples citoyens qui mènent une vie paisible et tranquille, loin des médias, se retrouvent exposés du jour au lendemain sur ces sites internet auxquels ils n’ont accordé ni interview, ni autorisation de publier leurs photos. Facebook aidant, il est beaucoup plus facile d’accéder aux données personnelles et de s’immiscer dans la vie de ces derniers. Le droit à l’image, ils n’en ont cure : de l’étudiante à la femme mariée en passant par la veuve ou divorcée, le web sénégalais est devenu un lieu de lynchage médiatique où n’importe qui peut se retrouver livré à la vindicte populaire sans raison. Personne n’est à l’abri de ce nouveau phénomène totalement en déphasage avec les valeurs qui, jusqu’ici, ont fondé notre pays. Parmi ces gérants de sites internet, il n’y a pas un seul qui voudrait que sa sœur, sa mère, son père ou son frère soit à la place de ceux qu’ils salissent au quotidien, comme s’ils étaient payés à le faire. Car liberté d’expression n’est point synonyme d’autorisation de calomnier, de salir ou de diffamer. Je ne parle même pas du massacre dont la langue française est constamment victime sur ces sites dont le langage employé, en général, n’équivaut pas au niveau d’un élève de sixième.
Monsieur le ministre, la protection des données personnelles, de la vie privée de nos concitoyens, vous incombe. A l’instar des journaux, radios et télévisions, de grâce, régulez l’ouverture et le fonctionnement des sites internet et préservez cet outil merveilleux que sont les nouvelles technologies de l’information et de la communication, aujourd’hui à la merci de personnes mal intentionnées et qui n’ont aucun sens de la responsabilité, encore moins du professionnalisme.
Momar Mbaye
Momar.dna@gmail.com
Thiesvision.com
(Source : Wal Fadjri, 30 novembre 2011)