Aller au delà du cadre juridique
mercredi 31 août 2005
Le séminaire sur le cadre juridique des technologies de l’information et de la communication au Sénégal, organisé les 29 et 30 août 2005 par l’Agence de l’Informatique de l’Etat (ADIE), a été sans conteste un événement important. Des communications de haut niveau ont été présentées par les experts commis à cet effet et les échanges de qualité qui s’en sont suivi ont contribué à faire de cette rencontre un intense moment de réflexion sur l’environnement juridique à mettre en place afin que notre pays puisse faire face aux défis posés par la Société de l’information. Venant à son heure, compte tenu notamment de la multiplication des affaires liées à la cybercriminalité, de l’adoption de la loi instituant la carte d’identité numérisée ou encore des exigences auxquelles sont de plus en plus soumis les centres d’appels impliqués dans des transferts transfrontaliers de données, il a également revêtu un caractère original par l’association de professionnels de la justice, de représentants de l’Etat et du secteur privé, d’universitaires et de membres de la société civile, rarement impliqués de la sorte dans les processus visant à élaborer de nouveaux textes législatifs. Les discussions qui se sont notamment déroulées autour de la question, oh combien sensible, de la protection des données à caractère personnel, a très justement mis en avant la nécessité d’assurer la garantie du droit au respect de la vie privée, du secret de la correspondance, etc. tout en trouvant un juste équilibre avec les impératifs de sécurité et de défense comme avec ceux permettant aux activités économiques de s’épanouir. Un des enseignements majeurs de ce séminaire aura été l’accent mis sur une vision clairement définie et partagée, en matière de technologies de l’information et de la communication, s’appuyant pour sa réalisation sur une stratégie nationale comportant des objectifs précis, des indicateurs de réalisation et des moyens financiers. Sous ce regard, il est à déplorer qu’au moment où les séminaristes discutaient de la nécessité de la mise sur pied d’une autorité administrative indépendante chargé du contrôle des données à caractère personnel, à l’image de ce qu’est la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) en France, on annonçait dans la presse la présentation à l’Assemblée nationale du projet de loi instituant la carte d’identité numérisée ! ! ! La logique aurait dicté que la loi organisant la protection des données à caractère personnel fût adoptée au préalable afin de définir dans quelles conditions la nouvelle carte d’identité numérisée, devant comporter à la fois des données à caractère personnel et de nature biométrique, pouvait être instituée. C’est dire que le Sénégal ne peut faire l’économie d’une véritable réflexion stratégique pour tirer profit de la formidable synergie qui se créerait si les actions souvent louables, qui sont mises en œuvre, s’inscrivaient résolument dans le cadre d’une vision connue et partagée par les acteurs.
Amadou Top
Président d’OSIRIS