Les chercheurs africains ont toujours à la bouche l’excuse du manque de moyens pour expliquer les difficultés qu’ils rencontrent dans l’exercice de leur travail. Sur toute l’étendue du continent, la complainte est l’exercice commun à tous les hommes de sciences. Et les chercheurs qui travaillent dans les domaines qui intègrent les Technologies de l’information et la communication (Tic) ne font pas exception à la règle. Ils ont, pour leur part, en plus, la difficulté à donner une légitimité pratique à un exercice qui semble, pour le commun de leurs concitoyens totalement détaché des préoccupations vitales de leurs compatriotes. Les chercheurs veulent donc montrer que les domaines des Tic pourraient largement contribuer à guérir des maladies, à prévenir des risques de famine, à former des enfants ou alphabétiser des adultes. Ce qui n’est pas une évidence dans un pays où, pour certains, la vie se résume à chercher du bois de chauffe ou de l’eau potable.
Faute donc, d’appropriation à la base, ou de moyens d’expansion, les résultats de la recherche restent souvent dans les tiroirs, et sont vite oubliés. Cependant, les besoins de l’Afrique en matière de développement sont tels que des initiatives se font jour, pour faire bouger les choses à des niveaux différents. L’une des dernières est le séminaire ouvert hier, à l’hôtel Faidherbe de Dakar, pour informer sur un partenariat de recherche et développement, initié par l’Union européenne et des structures africaines.
C’est l’unes de ces structures africaines, l’Institut Panos Afrique de l’Ouest (Ipao) qui abrite le séminaire de Dakar. Sa directrice, Mme Diana Senghor, a donc expliqué qu’il s’agissait, pour son institution, « d’informer les acteurs sur l’initiative EuroAfrica Ict, encore appelé Start, de réfléchir sur les enjeux de la recherche scientifique et technologique pour l’Afrique ». Le projet Start se veut une initiative-clé pour développer une coopération scientifique et technique étendue et approfondie, entre l’Ue et l’Afrique au sud du Sahara, dans le domaine des Tic. Mme Karine Valin, la coordonnatrice de l’Initiative Euro-Africa Ict, qui pilote ce projet, a indiqué qu’il visait à « assister et soutenir les organisations d’Europe et d’Afrique travaillant dans les Tic, pour développer des projets de coopération en recherche et développement, dans le cadre du 7ème Programme cadre de recherche et développement, de la Commission européenne (Pcrd) ». Le ministre de la Recherche scientifique du Sénégal, Mme Yaye Kène Gassama-Dia, a précisé que ce Pcrd bénéficie d’un soutien de plus de 52 milliards d’euros.
Partant du constat que « l’innovation technologique est la véritable réponse aux difficultés de développement que peut connaître une communauté ou une nation », Mme Gassama-Dia juge que le Pcrd est « une opportunité réelle offerte aux chercheurs et aux institutions de recherche africains, de réaliser des travaux sur des technologies, des services et des problématiques avancés et de s’approprier des applications et des outils innovants afin de contribuer à la création et à la valorisation des connaissances scientifiques ».
Cette valorisation des connaissances doit avoir en ligne de mire, pense la directrice de l’Ipao, « la résolution des problématiques vitales illustrées par les Objectifs du Millénaire du Développement. Dès lors, il est indispensable que dans nos centres de recherches, même mal équipées, du public comme du privé, des idées nouvelles soient expérimentées, des services innovants soient créés ». Pour cela, elle juge que, « la coopération et la confrontation intelligente avec les pays plus avancés, ne peut que mieux nous outiller afin de prendre en charge ces enjeux ».
L’atelier de Dakar regroupe des membres du secteur privé, de la société civile, des porteurs d’idées, ainsi que des représentants des structures de l’Etat. Il précède de peu un autre atelier qui va se tenir à la fin du mois en Afrique du Sud, sous l’égide de l’institut Meraka, qui est le partenaire de l’Ue et de Panos dans ce pays.
Mohamed Guèye
(Source : Le Quotidien, 22 mars 2007)