Tidjane Deme : « 40-45% de nos fonds proviennent de sociétés françaises »
samedi 30 juin 2018
La finance numérique a le vent en poupe en Afrique. Plusieurs fonds d’investissements sont à la recherche de ces pépites à l’instar de Partech Ventures et de l’un de ses fondateurs, Tidjane Deme. Rudy Casbi l’a rencontré.
CIO Mag : Tidjane Deme, qu’est-ce qui vous a conduit à vous rendre à l’Inspir’talks à la fin juin ?
Tidjane Deme : Nous venons à l’Inspir’talks car il est important de sensibiliser l’ensemble de l’écosystème sur l’évolution de la finance numérique en Afrique. Avec Partech ventures, on travaille justement en ce sens. J’ai été invité pour participer à une table ronde. J’en ai été très honoré.
En février dernier, vous aviez annoncé la création de votre fonds d’investissement d’une capacité de 100 millions d’euros. Où en êtes-vous aujourd’hui ?
Nous avançons à grande vitesse. Nous avons presque atteint la barre des 100 millions. Nous suivons aussi deux projets respectivement en Afrique du Sud et au Nigeria. Cette dernière s’attaque au poids du marché de l’informel. Pour l’heure, nous ne pouvons dévoiler le nom de cette entreprise mais la prospection fait aussi partie intégrante de notre métier donc cela évolue constamment.
Sur les 100 millions d’euros, combien proviennent d’entités françaises ?
Tout d’abord, nous avons plusieurs types de financements. Vous avez la banque mondiale, des investisseurs privés mais aussi des entreprises qui sont entrés dans notre portefeuille. A l’heure où je vous parle, je dirais que 40-45% de nos fonds proviennent de sociétés françaises. Dans ce lot, on retrouve Orange et même JC Décaux.
Qu’est-ce qui explique ce regain d’intérêts pour les entreprises françaises ?
Ces grandes entreprises connaissent aussi bien le continent que nos expertises. J’ai été l’ancien directeur de Google Afrique. Avec Cyril Collon, nous avons intégré Partech ventures en créant la branche Afrique car nous avions estimé que le marché arrivait à maturité. C’est un constat qui était largement partagé par les entreprises françaises – mais pas seulement – présentes sur place depuis très longtemps. Sur la finance numérique, cela bouge rapidement. Proparco a annoncé un investissement dans une startup spécialisée dans la finance numérique pour un montant de 3 millions d’euros en avril dernier. On sent qu’il y a une prise de conscience des investisseurs qui joue en notre faveur.
Récemment, un article publié sur le web par Ashanti ventures, un autre fonds d’investissement, expliquait qu’en Afrique il n’y avait pas un manque d’investisseurs mais plutôt que les porteurs de projets peinaient à attirer ces investisseurs en ne se démarquant pas assez. Quel est votre sentiment ?
Je ne partage pas cet avis. L’an dernier, les startups africaines ont levé plus de 500 millions de dollars. Pourtant, nous avons toujours 3500 startups en quête de financements. Dans le même temps, vous n’avez seulement qu’une dizaine d’investisseurs directement implantés sur le continent. Les 200 autres investisseurs ne sont pas basés en Afrique. Cela implique qu’il faille trouver des procédés toujours plus innovants pour ces jeunes pousses d’être repérer par eux. Ensuite, il est exact que vous avez une convergence d’idées vers la fintech ou l’agribusiness. Mais les besoins des populations sont-ils tous pourvus pour autant ? Le marché est-il saturé ? Je ne le pense pas.
(Source : CIO Mag, 30 juin 2018)