Terrorisme et télécommunications en Afrique : L’Afrique restera-t-elle spectatrice ?
vendredi 30 août 2019
Afrique, eldorado très convoité.
Richement dotée en ressources naturelles, l’Afrique a tout pour réussir. Toutefois, les nombreuses ressources du Continent peine à profiter aux Africains. Non pas que ces ressources ne soient pas exploitées, mais plus tôt du fait que le cours de l’histoire a conditionné les Africains à être étrangers à l’exploitation de leurs richesses.
L’Afrique a donc été et reste la convoitise des principales puissances mondiales qui s’y livrent une guerre de tous les instants.
Cette guerre a consisté pendant longtemps en des accords diplomatiques, négociés autour d’un café chaud, dans les salons feutrés des capitales européennes. L’entrée en course de la Chine, de la Russie (avec l’exhumation des accords bilatéraux ancestraux, comme récemment en RCA et en RDC) et de l’Inde a redistribué les cartes, contraignant les anciennes puissances coloniales à réagir. C’est ce qui explique les turbulences qu’a connu l’Afrique au cours des dix dernières années (la chute de Laurent Gbagbo en Côte d’ivoire, la mort de Mouammar Kadhafi, l’Egypte, l’épée de Damoclès dangereusement suspendue sur la tête d’Idriss Deby du Tchad. Etc.)
Désormais, la ruée vers l’Afrique rentre dans une nouvelle phase. Les groupuscules terroristes y prolifèrent avec une célérité inquiétante. Boko haram, ainsi que beaucoup d’autres groupes ont connu un sursaut d’activité à la fin des années 2010, pour ensuite faire allégeance à l’Etat Islamique en 2014. D’ailleurs et pour la première fois/fait nouveau, l’Etat Islamique a revendiqué un attentat terroriste dans l’Est de la RDC le 19 Avril dernier.
Les télécommunications en Afrique comme butin de guerre
Si certains groupes terroristes se concentrent sur la revente du butin de guerre, exprimé en Carats, Lingots, Barils, ivoire, etc., leur action ne s’arrête pas là. Ils s’attaquent aussi à l’économie numérique, portée par l’extension exponentielle des réseaux mobiles. Les télécommunications en Afrique deviennent progressivement l’Eldorado à partir duquel ces groupes terroristes tirent une partie de leurs financements.
Là aussi, la stratégie est très claire : créer plusieurs entreprises s’adressant à des secteurs distincts du marché des télécommunications (ne surtout pas se faire concurrence)…
Recommandations : L’Afrique restera-t-elle spectatrice ?
Les Africains semblent observer la scène en spectateurs passifs oiseux et indolents, laissant tout entre les mains de Dieu. Mais quel prophète vaticinera sur les lendemains de l’Afrique ? En attendant, les présages sont dramatiques pour des lendemains qui déchantent, à moins que les Africains se réveillent et prennent le problème à bras le corps.
Il est encore temps. Les Etats-Unis ont montré l’exemple en inscrivant les entreprises de télécommunications aux visées douteuses sur une liste rouge, de même que les banques impliquées dans la gestion financière des flux générés par leurs activités. L’Afrique pourrait leur emboiter le pas, en procédant de la même manière :
1) Créer un groupe de travail transcontinental qui procèdera à une due diligence méticuleuse des différents collaborateurs de l’Afrique dans le domaine des télécommunications
2) Proscrire les entreprises qui se révèleront néfastes pour le continent
3) Créer et doter une équipe d’experts, qui s’appuieraient sur des instruments comme SmartAfrica et dont la charge serait de vérifier l’effectivité de la mesure précédente en scrutant le trafic télécom,
4) Adopter des mesures coercitives fortes envers les contrevenants aux mesures précédentes
Par Jules Mathurin KEMENI PAWOSSI [1]
(Source : Digital Business Africa, 30 août 2019)
[1] Jules Mathurin KEMENI PAWOSSI est ingénieur en télécommunications. Ingénieur en Télécoms. Domaine d’expertise : l’essor des télécommunications en Afrique Sub-saharienne.