L’attribution (définitive ?) de la licence d’exploitation des services des Télécommunications/TIC de TIGO au consortium Franco-sénégalo-malgache sous la férule de Yerim SOW au détriment… de WARI de Kabirou Mbodj marque t-elle la fin d’un feuilleton indigeste et indigne pour notre pays au regard des reniements, louvoiements et autres entourloupes qui ont émaillé les différentes phases de l’affaire ? Il faut l’espérer et le souhaiter fort afin que la sérénité retrouvée, on puisse se tourner résolument vers la redynamisation de ce secteur ESSENTIEL de notre économie et de notre vie tout simplement que sont les Télécommunications/TIC.
En effet, s’il y a dans notre pays, un secteur qui demande à être repensé c’est véritablement celui des Télécommunications/TIC.
Voilà un secteur extrêmement porteur, très stratégique et qui était très bien parti pour être le moteur transversal de l’émergence de notre pays dans tous les domaines qui se trouve aujourd’hui dans une situation de marasme généralisé et presque de recul par rapport à certains pays de la sous région. Comment en est-on arrivé là ?
Pour ma part, je voudrais saisir l’opportunité de la fin du « mortal kombat » de l’affaire TIGO, qui me semble plus d’actualité pour verser dans le débat quelques…considérations.
Cette présente contribution qui n’a pour objectif que de partager des idées sera axée sur trois points : 1/ un bref rappel de la longue marche des Télécommunications au Sénégal et des résultats obtenus (2) suivi d’un essai d’analyse des causes du marasme actuel (3) et enfin une esquisse des prochaines grandes étapes(4) pour redynamiser le secteur des Télécommunications/TIC dans notre pays. Sans prétention aucune. Juste quelques « provisions dans la corbeille du patriarche » pour dévaliser feu Président Mamadou DIA . PAIX A SON AME…
1/ La longue marche des Télécommunications au Sénégal
Si le secteur des Télécommunications/TIC suscite aujourd’hui beaucoup de controverses dans notre pays pour avoir marqué le pas depuis un certain temps, il n’en a pas toujours été ainsi.
Car, notre pays a toujours été très présent et à l’avant-garde dans le suivi de l’évolution du secteur des Télécommunications comme l’atteste ce bref rappel.
En effet, il est utile de rappeler que le cadre institutionnel du secteur des Télécommunications/TIC a connu quatre grandes périodes d’évolution :
1-1/ La Période du monopole d’Etat : des PTT aux OPT (1960 à 1975)
De la colonisation jusqu’au début des années 70, le secteur des Télécommunications était inclus dans le giron d’entités étatiques dénommées PTT (Postes , Téléphone et Télégraphe)
Au commencement, étaient donc les P.T.T (Petit Travail tranquille) comme disaient les mauvaises langues.
Entités administratives publiques exerçant un monopole d’Etat sur les services de la Poste , du Téléphone public et du télégraphe et dont le budget incorporé dans celui du ministère de tutelle était voté et approuvé par l’Assemblée Nationale.
Une situation qui va durer jusqu’au début des années 1970 avec l’apparition notable des OPT (Office des Postes et Télécommunications) qui vont supplanter les P.T.T.
Au Sénégal, par la grâce du décret 76-122 du 26 février 1976 portant Règlement d’établissement, l’OPT devient un établissement public à caractère industriel et commercial (EPACIOC) qui va administrer le domaine des Télécommunications nationales et des services postaux en restant sous le régime de monopole d’Etat mais avec conseil d’administration, Direction Générale et budget autonome. L’OPT sera identifié comme EP 04 et aura en charge le service postal et les Télécommunications nationales.
Les Télécommunications internationales vont faire leur apparition dans notre pays vers le début des années 70 avec une loi de 1972 qui va créer la société TELESENEGAL chargée de prendre en charge ce segment de la téléphonie internationale avec un partenaire français FCR (France Câbles et Radio).
C’est aussi la période des premiers balbutiements de la télévision publique dans notre pays avec la construction de la station terrienne de Gandoul pour la réception satellite.
1.2/ La période de la déréglementation (1970-1980)
A partir des années 1980, apparaît un nouveau concept qui va consister en la suppression de contraintes règlementaires pour permettre la mise en œuvre des principes du libéralisme économique dans les pays développés. C’est la déréglementation.
La déréglementation mondiale des télécommunications va s’inspirer des modèles de la déréglementation économique et financière pour prospérer.
Ainsi en 1984, le gouvernement américain va donner le ton en décidant de démanteler A.T.T (American Telegraff and Telephone) véritable géant devenu trop encombrant qui monopolisait toute l’exploitation des Télécommunications aux Etats Unis pour créer cinq (5) compagnies régionales concurrentes, appelées les sisters Bell (cinq sœurs) chargée chacune de gérer les télécommunications d’une région des USA (l’Est, L’Ouest, Le Nord , Le Sud et le Centre)
Sur ce chapitre, il importe de souligner pour ceux qui ne le savaient pas que Le SENEGAL sera le premier pays en Afrique noire à engager le processus de mutation des services des Télécommunications vers les changements irréfragables qui se dessinaient dans le secteur.
Il y a eu d’abord l’organisation des journées des Télécommunications en 1983 (véritables assises nationales des Télécommunications) qui va consacrer la séparation des activités postales et des activités de Télécommunications et aboutir à la création de deux entités en octobre 1985 : un Office des Postes et des Caisses d’Epargne (OPCE) et une Société Nationale des Télécommunications (SONATEL). (Résultat de la fusion de l’ex TELESENEGAL et de l’ex Direction des Télécommunications de l’OPT) chargée de piloter la mise en œuvre et l’exploitation des Télécommunications Nationales et internationales du Sénégal.
Une véritable gageure à l’époque si on retient que même en Europe, la Commission européenne en était à éditer en 1987, un Livre vert qui préconisait la fin du monopole des PTT dans les pays européens, séparant les fonctions d’ exploitation et de réglementation et ouvrant partiellement les réseaux et services de télécommunications à la concurrence.
Et la France -notre référence- en était encore dans LE GRAND DEBAT lancé en 1988 par Paul Quilès (Ministre en charge des Télécommunications de François MITTERAND) pour définir l’avenir du service public des Télécommunications qui va aboutir entre autres résultats à la transformation à partir du 1er janvier 1988 de la Direction générale des télécommunications, rebaptisée France Télécom qui deviendra au 1er janvier 1998, une société anonyme dont l’État français est le seul actionnaire, pour préparer l’ouverture à la concurrence.
Au Sénégal, toujours dans sa lancée des réformes, un code des Télécommunications est promulgué en 1993 fixant les grandes lignes du nouveau contexte :
Une Société nationale à 100 % étatique (SONATEL) à gestion privée. Mise en œuvre de Grands projets de développement des Télécommunications avec l’Installation de la fibre optique sur :
- L’axe Nord Dakar- Thiès- Saint louis jusqu’à Bakel
- Dakar – Thiès -Kaolack –Ziguinchor (le TKZ)
- Dakar – Thiès –Tambacounda –Kidira etc. ;(réseau PANAFTEL)
- Création des ACTEL ( Agence Commerciale des Télécommunications) etc…
1996 verra aussi l’ouverture d’une partie du Capital de SONATEL aux privés qui devient de fait , une société nationale à participation d’actionnaires privés, l’Etat conservant toujours une majorité d’actions (42%) avec un partenaire stratégique France Télécoms détenant une partie des actions (33%) ainsi que des privés institutionnels et le personnel (10 %) .
L’apparition du téléphone mobile avec l’adoption de la norme GSM (Global Standard Mobile) amène de nouveaux enjeux dans les télécommunications et exacerbe la concurrence entre opérateurs mondiaux.
Cette forme d’évolution des Télécommunications publiques sera ensuite observable presque partout dans le continent africain où nombre de sociétés nationales des Télécommunications appelées « opérateurs historiques » vont voir leur capital ouvert à d’autres actionnaires et surtout entraîner une nouvelle donne : la mise en concurrence de nouveaux opérateurs avec l’ouverture du marché national des Télécommunications.
Un nouveau cycle s’instaure dans les télécommunications celui de la privatisation.
1-3/ La période de la privatisation (1998-2001) ;
Au Sénégal, cette période voit l’ouverture du Capital de l’Opérateur historique à un partenaire stratégique (France Télécom) pour l’accompagner dans sa politique de modernisation et d’expansion des réseaux des Télécommunications dans le pays.
Le mobile apparaît dans le paysage téléphonique sénégalais sous le label « Alizé » commercialisé par SONATEL.
Le privilège de monopole accordé à la Sonatel sur le FIXE, accordé en 1999 va prendre fin le 31 décembre 2006 mais le segment mobile est ouvert à la concurrence et un opérateur SENTEL (ancêtre de TIGO) obtient une licence d’exploitation d’un réseau de téléphonie mobile GSM ouvert au public , pour un prix de cession estimé à 50.000.000 F CFA. Chiffre jugé dérisoire par le pouvoir WADE qui va entamer un bras de fer avec la société pour faire réviser les termes de l’accord de cession.
Dans presque tous les pays africains l’on assiste à la même démarche de privatisation de l’opérateur historique des Télécommunications et de cession de licence d’exploitation de réseaux publics à des opérateurs privés suivant des cahiers de charge élaborés par les autorités étatiques et permettant aux Etats d’engranger de substantielles ressources financières dans ces opérations de cession d’actions.
1-4/ La période de la régulation (depuis 2002)
La déréglementation visait à l’efficacité d’un marché marqué à la fois par l’ouverture à la concurrence internationale et la prise en compte des préoccupations de service public.
Et dès lors qu’il existe la concurrence entre opérateurs des Télécommunications, la nécessité de fixer des règles valables pour tous s’impose afin de garantir la stabilité et la viabilité du système. C’est l’heure de la Régulation.
L’avènement des agences de régulation qui deviendront plus tard des autorités de régulation, va donc correspondre à une politique de réglementation de l’économie des services par des mesures de libéralisation du marché et de dissociation organique des fonctions de réglementation et de régulation.
Règlementer veut dire édicter des règlements. C’est à dire des Lois, des règles, des pratiques pour une activité donnée. Alors que Réguler a pour finalité de donner une certaine stabilité à un système en faisant respecter par tout le monde, les règles édictées.
En fait, la réglementation peut avoir pour but la régulation tout comme la régulation peut se faire à travers des règlements.
C’est dans cette mouvance qu’au SENEGAL, un nouveau code des Télécommunications sera promulgué en 2001 (Loi n° 2001-15 du 27 décembre 2001 portant code des télécommunications) consacrant la création de l’ART (Agence de Régulation des Télécommunications) qui deviendra plus tard en 2009, ARTP en incluant la régulation postale et ouvrant de fait, les Télécommunications de notre pays à la concurrence totale.
A l’instar de notre pays et bien après, la plupart des pays africains notamment ceux de la sous région, inspirés par l’expérience sénégalaise en la matière, vont eux aussi, mettre en place des organismes de régulation avec diverses appellations (Autorité, Agence, Conseil etc ?..) de Régulation avec les mêmes objectifs : faire respecter les règles du jeu et préserver les intérêts des parties prenantes (Etat, Opérateurs, consommateurs etc..)
Ainsi selon le rapport 2010 de l’UIT, en 2008, 77% des pays africains (soit 52 pays) se sont dotés d’une telle institution avec des statuts variés accordés aux ART selon les pays. (rapport UIT de 2010)
Certains pays comme le Swaziland, le Bénin, le Congo, la RDC, Djibouti, la Gambie, la Guinée équatoriale, le Liberia, la Libye, le Niger, le Rwanda, la Somalie, Sao-Tome et Principe, les Seychelles, la Sierra-Leone ont une ART non séparée du gouvernement. C’est-à-dire des ART sous tutelle ce qui ne facilite pas toujours une autonomie décisionnelle nécessaire à une régulation efficace.
D’autres pays comme le Sénégal, l’Algérie, le Maroc, la Tunisie, l’Égypte, le Togo, le Burkina Faso, le Cap-Vert, la Côte d’Ivoire, le Ghana, la Guinée, la Guinée Bissau, le Mali, la Mauritanie, le Nigeria, le Tchad, le Burundi, le Cameroun, la Centrafrique, le Gabon, le Zimbabwe, l’Angola, le Botswana, le Lesotho, Madagascar, l’île Maurice, le Malawi, le Mozambique, la Namibie, la RSA, la Zambie, l’Érythrée, l’Éthiopie, le Kenya, l’Ouganda, le Soudan, et la Tanzanie ont fait le choix d’une ART séparée du gouvernement qui bénéficie soit d’un régime de forte autonomie soit d’un régime d’indépendance vis-à-vis du gouvernement.
2/ Le bilan des réformes institutionnelles
Ces réformes institutionnelles ont donné des résultats appréciables dans le développement des Télécommunications/TIC dans nos pays. Notamment par :
1/ L’augmentation du nombre d’opérateurs dans les pays africains
Plus de 100 opérateurs sont présents en Afrique qui a été, dès l’année 2002, le principal promoteur de la concurrence dans les services mobiles. Dans notre pays, depuis 2007,nous avons ainsi trois opérateurs de Télécommunications tous segments confondus, SONATEL, TIGO et EXPRESSO pour un total cumulé de plus de 15 millions d’abonnés au téléphone.
2/ Des ressources financières supplémentaires très conséquentes pour les pouvoirs publics avec la vente des licences, d’actions et autres contrats de concession d’activités de service public des Télécommunications, les Etats africains ont tiré grand profit de la nouvelle donne des Télécommunications.
On parle de 3000 Milliards de dollars engrangés dans les ventes d’actions et de contrats d’exploitation de licences d’opérateurs des Télécommunications par les pays africains entre 2002 et 2010.(rapport CNUCED 2011) Au Sénégal, EXPRESSO a payé 100 Milliards de F.CFA pour sa licence et TIGO a accepté d’allonger 50 milliards de f.CFA pour conserver sa licence d’exploitation améliorée.
3/ L’ amélioration notable de l’accès aux services des Télécommunications dans les pays africains avec la présence d’opérateurs ayant les moyens de leurs ambitions. La banalisation de la téléphonie avec l’avènement du mobile qui a fini d’installer la communication téléphonique au cœur des activités des populations. La construction de backbones nationaux et l’implémentation de la fibre optique et du large bande dans certains pays ont permis d’améliorer la couverture des pays africains en infrastructures des Télécommunications.
4/ Le développement fulgurant de l’informatique qui, couplé aux Télécommunications, avec la convergence des réseaux a donné lieu à un essor impressionnant de l’INTERNET et des services multimédias dans les pays africains, les faisant entrer de plain pied dans l’ère de la société de l’information et de la communication électroniques avec toutes ses commodités et ses…dérives (cybercriminalité, pornographie, pédophilie sur le web etc…) sans y être bien préparés.
5/ La résorption notable du gap numérique dans les pays africains avec des projets de mise œuvre des Centres Multimédias Communautaires (CMC) et de Service universel des Télécommunications pour la desserte rurale des zones à accès difficile dans beaucoup de pays.
6/ la baisse très sensible des prix des communications du fait de la concurrence saine entre opérateurs et des opérations de promotions périodiques qui impactent positivement sur le développement du trafic téléphonique.
Et tant d’autres satisfactions qu’il serait fastidieux de dénombrer dans cet article.
Ces avancées appréciables dans le développement des services des Télécommunications/TIC dans notre pays auraient du continuer à croitre de manière exponentielle pour atteindre voire dépasser les 10% de contribution au PNB du pays, n’eut été le coup de frein brutal qui a plombé l’envol harmonieux de notre pays dans le domaine des Télécommunications/TIC, le plongeant dans une léthargie inqualifiable.
3/ Les causes du marasme du secteur
Les responsabilités de la léthargie actuelle du secteur des Télécommunications/TIC, peuvent être trouvées à plusieurs niveaux mais mon avis est que le niveau le plus élevé est celui de l’Autorité politique car c’est Elle qui donne les orientations, définit les stratégies et même initie les opérations de mise en œuvre pour donner le ton et enclencher l’effet d’entraînement des autres acteurs du secteur. Sous ce rapport, l’Autorité politique sous Wade a totalement failli dans le domaine des Télécommunications/TIC.
Avec le régime WADE, le secteur des Télécommunications/TIC a souffert de la mainmise extraordinaire d’un conseiller spécial du Président chargé des TIC qui manifestement manquait de formation adéquate pour « driver » le secteur dans les règles de l’art et qui n’était intéressé que par la dimension mercantile des Télécommunications/TIC.
Aussi a-t-il, durant tout son règne de tout puissant conseiller en TIC du Président, réduit le secteur en un embrouillamini financier qui n’a pas toujours fini de dévoiler toutes ses facettes désastreuses.
Dans une contribution précédente (cf « L’AS » du 17/4/2012 page 10), j’ai donné un aperçu de son modus opérandi pour réduire les ministres en charge du secteur à de simples boites à lettres et d’autres pratiques sournoises de tripatouillage des textes législatifs et règlementaires concoctés pourtant par des commissions techniques composées de cerveaux hautement formatés et qui ne demandaient qu’à être adoptés pour faire avancer le secteur et faire prospérer le Sénégal. Je n’y reviendrai donc pas ici.
Seulement, il importe de dire à haute et intelligible voix que les Télécommunications,- comme tout autre métier- ne souffrent pas de l’approximation et du rafistolage. C’est un domaine technique extrêmement exigeant qui nécessite des connaissances approfondies et acquises à bonne école pour pouvoir être pratiqué. On n’apprend pas les Télécommunications « dans le tas »..NON !
Pour ne pas l’avoir compris, notre pays sous l’Alternance 1, a fait un grand pas en arrière par la faute de ce conseiller très spécial, spécialiste en TIC dit-on. Sous ce manteau qui demande toujours à être authentifié (quelle école, quelles années pour quels diplômes ?), il a mélangé les torchons et les serviettes et réduit les Télécommunications de notre pays à une niche à milliards et à scandales au grand dam des véritables acteurs du secteur.
Un métier disait l’autre, çà s’apprend. On ne l’exerce pas par circonstance. Sous ce rapport, s’il y a un domaine véritablement pollué par des intrus au métier – mis à part, la catégorie des journalistes, c’est celui des informaticiens. Tout le monde est informaticien dans ce pays comme tout le monde est journaliste.
Ainsi certains de ces « informaticiens » sous la férule du conseiller spécial en TIC du PR WADE, avaient poussé le bouchon jusqu’à réussir la gageure à faire créer dans notre armature gouvernementale, un ministère des TIC complètement séparé des Télécommunications au motif erroné que les TIC étaient un domaine à part qui devient plus important que les Télécommunications. Extraordinaire !!
Aller jusqu’à faire accroire que les TIC et les Télécommunications qui sont comme les deux faces d’une même pièce de monnaie du fait de la convergence des réseaux, pouvaient et devaient être gérées séparément, il fallait le faire !!
Heureusement que la bévue –car il s’agit bien d’une BEVUE, j’allais même dire une HERESIE-a été vite réparée avec la suppression au bout de six (6) mois, de ce ministère des TIC qui faisait la risée de notre pays à travers les réunions et rencontres internationales où l’on nous regardait comme des extraterrestres. Ce, au moment où, l’Union Internationale des Télécommunications (UIT) elle-même, prenant conscience de l’imbrication extrême des deux secteurs décidait d’adopter définitivement la terminologie Télécommunications/TIC pour désigner le secteur.
Pour autant, la leçon n’aura pas été bien retenue. Car Wade dans ses calculs d’épicier politicien et pour faire plaisir à un has been politique qui devrait lui assurer les voix des Lébous est revenu encore pour mettre en place un Ministère de la connectivité distinct du Ministère des Télécommunications. Du grand n’importe quoi…
Oh ! Omniscience, Oh ! Omnipotence quand tu nous tiens.
En réalité, beaucoup de problèmes du secteur viendront de cette « guéguerre » entretenue sciemment entre TIC et Télécommunications et qui faisait les affaires de certains acteurs intrigants et affairistes.
Heureusement que la grande masse de tous ces acteurs là qui sont très compétents par ailleurs, aura compris la nécessité absolue de se retrouver, de regarder dans la même direction et de travailler ensemble, pour proposer au gouvernement des orientations stratégiques pour le développement du secteur. Ce qui est très bénéfique pour le secteur et pour le pays tout entier.
Pour que cela prospère et perdure, il faudra éviter de faire les mêmes erreurs en intronisant un autre gourou au palais, chargé de piloter le secteur et surtout en redonnant au Ministère en charge du secteur toute la plénitude de ses prérogatives en matière de règlementation et de conduite de la vision de l’Autorité politique pour le secteur.
Ensuite, il s’agira de recentrer les attributions de l’ARTP qui, du temps de WADE, a complètement dévié de ses missions ataviques de contrôle, de Régulation et de Développement des secteurs des Télécommunications/TIC et des Postes, transformée qu’elle était, en Agence de Recouvrement des Traites et Patentes (ARTP) juste pour capter toute la manne financière du secteur à travers des affaires sulfureuses et des scandales financiers, genre Licence SUDATEL, MTL, SENTEL, OCI, Appels entrants, redevances fréquences attribuées à la pelle (500 entre 2002 et 2012) etc…
Sur ce chapitre, il est remarquable de retenir que le premier responsable de haut niveau licencié par le pouvoir de Macky SALL aura été l’ex Directeur Général de l’ARTP, Monsieur Ndongo DIAO pour ne pas le nommer, tellement la structure sous son magistère, était devenue pratiquement une sorte de « banque » pour WADE and CO, ne se préoccupant que d’affaires de sous et de gros sous au détriment de ses missions régaliennes.
Ce qui lui vaut aujourd’hui d’avoir maille à partir avec la Justice, lui qui se targuait d’être « un baye fall de Wade et ne recevoir d’ordre que de lui ». Quelle misère pour un CADRE !
Au fait, où en est on dans cette affaire Ndongo DIAO ? De même que celle des bâtiments de Cheikh AMAR ? Il serait bon de savoir d’autant que le journal DAKAR TIMES du 27 /12/2017 a titré en sa UNE « ARTP : bientôt un nouveau siège »…qu’on attend toujours.
Il s’agira donc de faire retrouver à l’ARTP toute la plénitude de ses prérogatives régaliennes pour devenir véritablement une ARTP (Autorité de Régulation des Télécommunications et des Postes) au bénéfice de l’Etat, des opérateurs, des consommateurs et des partenaires au développement.
Pour ce faire, l’ARTP doit impérativement se muer en véritable AUTORITE des secteurs. C’est-à-dire faire valoir sa place centrale dans le dispositif d’organisation, de fonctionnement et d’évolution du secteur des Télécommunications/TIC dans notre pays.
En quoi faisant ? En faisant PREUVE d’AUTORITE tout simplement pour faire bouger les choses dans le bon sens. C’est-à-dire imprimer –au besoin imposer– sa propre cadence et son propre calendrier à tous les acteurs du secteur pour faire évoluer les aspects bloquants du développement du secteur.
Sur ce chapitre, des décisions énergiques comme celle portant sur l’identification des abonnés avant une date boutoir qui a été très bien menée, seront nécessaires.
Notamment pour faire avancer les chantiers futurs dans la marche et le développement du secteur des Télécommunications/TIC dans notre pays.
4 / LES CHANTIERS FUTURS
Sans prétendre être exhaustif, les futurs chantiers qui méritent d’être accélérés , finalisés voire révisés tourneront – entre autres- autour de :
1/- Le dégroupage de la boucle locale pour organiser le partage des infrastructures et permettre à tous les opérateurs d’avoir égal accès au réseau téléphonique national de raccordement des abonnés. Il faudra absolument inviter les acteurs majeurs particulièrement ORANGE à venir à la négociation et s’accorder sur un catalogue tarifaire et opérationnel des installations à partager pour dépasser cette étape, condition importante de déploiement rapide et donc de développement des réseaux dans notre pays. La date butoir de Juin 2018 a été arrêtée par le DG de l’ARTP. On attend de voir …
2/ L’édition d’une nouvelle Lettre de Politique Sectorielle (LPS) du secteur pour décliner la vision des Autorités en matière de développement des Télécommunications/TIC dans notre pays pour les prochaines années et indiquant de manière claire et limpide les voies et moyens à utiliser pour atteindre les objectifs fixés.
Pour ce faire, les ressources humaines de qualité sont là, il faut seulement leur faire confiance et leur confier la mission de relecture et de proposition d’un texte bien pensé et partagé. Il y a urgence si cela n’est pas déjà fait, pour éviter le sort de la dernière LPS de 2009 qui est resté un chantier inachevé pour cause de non validation et non publication.
3/ Elaborer un nouveau code des Télécommunications/TIC qui tienne compte des nouvelles mutations du secteur pour remplacer le code de 2011 devenu obsolète du fait de la non adoption des décrets d’application de la Loi portant Code des Télécommunications qui traîne dans les circuits depuis plus de sept (7) ans. Une lacune qui a rendu complètement invalide le code lui-même.
Le nouveau Code à adopter devra permettre de corriger toutes les « imperfections » du Code de 2011 notamment sur les aspects liés à la prise en compte des nouveaux aspects liés au passage au tout numérique et à la gestion du fameux dividende numérique, des noms de domaine, des communications électroniques etc…Bref, du coup, élargir et améliorer considérablement le cadre juridique des Télécommunications/TIC après l’harmonisation de notre code des Télécommunications, conformément aux directives de l’UEMOA et de la CEDEAO ,
4/ Doter l’ARTP de compétences humaines de haut niveau et d’équipements techniques
adéquats, afin qu’elle puisse assumer avec succès toutes ses fonctions de régulation, de contrôle et de développement des secteurs. Sur ce plan, il faudra certes toujours rajeunir les cadres, mais à doses homéopathiques car le secteur des Télécommunications/TIC ne peut souffrir de l’instabilité et des changements intempestifs. C’est un secteur qui a besoin d’une certaine stabilité pour se développer pleinement. Les succès unanimement salués de C.T. MBAYE à la tête de la SONATEL ont été obtenus entre autres, par la remarquable longévité qu’il a passée à la tête de la structure, lui permettant d’imaginer des projets, de les murir, de les mettre en œuvre et d’en apprécier les résultats. Cela est valable pour toutes les structures des Télécommunications/TIC et notamment l’ARTP où il faudrait (sauf en cas de faute grave constatée), arriver à la formule d’un DG nommé pour au moins cinq (5) ans pour lui permettre de « faire ses preuves ». Sinon on n’échappera pas au syndrome de « l’éternel recommencement ».
5/ Accélérer la mise en place du service universel pour la desserte des zones rurales d’accès difficile afin de briser le gap numérique comme la réalisation du projet pilote de Matam.
Il faudra d’autres WAHO dans les régions pour démocratiser les Télécommunications/TIC dans notre pays.
6/ Actualiser le lancement du 4ème opérateur qui avait été décidé lors du conseil des Ministres en date du 7 mars 2013. La procédure de sélection, entamée semble stoppée voire abandonnée sans raison valable. Or l’arrivée d’un 4ème opérateur est bonne pour l’Etat qui va en tirer des ressources financières conséquentes en cette période de dèche généralisée. Un quatrième opérateur sur le marché est bon aussi pour les consommateurs car la concurrence sera leur sera profitable à tout point de vue par la diversification des offres de services et par la baisse régulière des prix des services des Télécommunications/TIC qui demeurent toujours assez élevés malgré quelques améliorations notables.
7/ Revoir, voire réajuster les rapports entre la SONATEL/ORANGE et ORANGE France
En effet, au commencement, il était question de « partenariat stratégique » entre SONATEL et France TELECOM avec une participation de 33% de parts pour les Français avec entre autres clauses d’accord la PCA à France Télécoms et la DG au Sénégal. Par la suite, France Télécoms devant la boulimie financière du pouvoir WADE, réussit sans encombre à racheter des parts d’actions du gouvernement pour se retrouver avec 42 % des actions de SONATEL, devenant de facto Majoritaire..relativement car l’ensemble des autres actionnaires menés par le Sénégal, comptabilisent tout de même 58%. Mais faisant fi de cela, France Telecom devenue entre temps ORANGE France, s’employa à grignoter tous les acquis de SONATEL notamment par une main mise totale sur les filiales propres de SONATEL que sont ORANGE MALI,ORANGE GUINNEE et ORANGE BISSAU en y nommant directement le TOP management . Ce qui devait être du ressort exclusif de SONATEL. Cette main mise totale d’ORANGE France sur SONATEL a ceci de malsain qu’elle procède d’une manipulation sournoise ourdie par « un partenaire stratégique » pour s’accaparer des biens de son allié sans « en avoir l’air ».
Il faut le dénoncer avec force comme l’avaient fait en son temps, les syndicalistes de SONATEL… Et rétablir autant que faire se peut la majorité des actions SONATEL à l’état du Sénégal et aux sénégalais par le rachat d’actions vendues. Il faut juste retenir que l’Etat français capitaliste atavique, reste Unique actionnaire d’ORANGE France malgré le libéralisme total qui est leur ADN économique. Pourquoi donc, veulent-ils nous imposer le bradage de notre fleuron économique ? Il y’a là assurément une prise de conscience nationale pour maintenir SONATEL dans le giron national avec toute la plénitude de ses prérogatives managériales, techniques, sociales et même en matière de politique d’expansion territoriale. Il y va de notre souveraineté Nationale.
8/ Enfin et pour terminer cette réflexion, il faudra à terme, penser à la mutualisation des organes de régulation. Je pense notamment à une intégration du CNRA (conseil national de régulation de l’Audiovisuel) dans l’ARTP pour en faire une ARTPA ( Autorité de Régulation des Télécommunications , des Postes et de l’Audiovisuel) pour les raisons suivantes.
Les secteurs des Télécommunications/TIC, des Postes et de l’Audiovisuel étant tous généralement sous la tutelle d’un même ministère et les réseaux devenant intégrés (contenant et contenu) et dans le droit fil de la rationalisation des agences de l’Etat, il me semble normal d’harmoniser la politique de régulation de ces secteurs imbriqués en confiant la fonction à une seule entité bien structurée.
Pour ce faire, l’ARTP étant plus structurée et mieux lotie en ressources financières et humaines et en moyens de coercition, pourrait intégrer le CNRA en son sein. A moins qu’on ne veuille faire plaisir à des amis. Et là, çà devient un autre débat…
En tout état de cause, il me semble salutaire de lancer la réflexion.
Que DIEU gardes le SENEGAL.
Dakar le 25/06/2018
Guimba KONATE
(Source : Actusen, 26 juin 2018)