Développer des stratégies de survie est le fort des Sénégalais, tous les créneaux sont visités dans cette quête, parmi ces créneaux, on peut prétendre que les mieux exploités sont les télécentres et les cybercafés.
Leur nombre est renversant, il faut se promener dans la ville de Dakar pour mesurer l’ampleur du phénomène. La concentration est surprenante, à chaque coin de rue, on est sûr d’en trouver. Téléphoner à Dakar est chose aisée ou que vous soyez, même à sur la petite île de Ngor, trois ou quatre télécentres sont à votre disposition.
Concernant les cybercafés, le nombre n’est pas encore aussi important, mais là également on tend vers la saturation du marché, si ce n’est déjà fait.
Cette situation, en l’occurrence la saturation du marché ne manque pas de soulever l’ire des gérants. Mody Diop l’un d’entre eux ne peut s’empêcher de fulminer contre cet état de fait. Selon lui « la Sonatel est responsable de cette situation, elle n’a pas tenu ses engagements, les contrats signés stipulaient clairement que la distance minimale entre deux télécentres devait avoisiner 100 mètres au minimum, alors qu’on voit des cabines qui sont côte à côte. Ce n’est pas sérieux. »
Des propos qui sont confirmés par B.N. chargé de communication à la Sonatel qui nous explique que « cette réglementation a été abolie, et que sa société s’exposait à des poursuites judiciaires en cas de refus de délivrances de lignes ».
Un problème qui ne se pose pas avec les cybercafés car l’exploitation est libre et n’est soumise à aucune contrainte. Toute personne disposant des ressources nécessaires est libre de procéder à l’exploitation d’un cybercafé.
Vers une nouvelle vision des services
Actuellement, on compte au Sénégal plus de 13 500 cabines, la ville de Dakar regroupe à elle seule plus de la moitié avec 7 300 cabines.
L’exploitant verse, au moment de la souscription du contrat, un dépôt de garantie d’un montant de 500 000 francs CFA par ligne. Après résiliation du contrat, le dépôt de garantie lui est remboursé sous réserve du paiement des sommes dues à la Sonatel.
Les deux dernières années, la Sonatel n’a pas délivré de lignes. C’est à partir du mois de mai 2003, qu’elle a recommencé à octroyer des lignes. Sur les raisons de cette interruption B.N. nous révèle que « ce secteur avait besoin d’être assaini. Cet arrêt nous a permis de réfléchir sur la manière la plus opportune de gérer et de réorganiser ce secteur. »
C’est une vision partagée par certains clients, c’est le cas de cette dame qui dénonce la manière dont certains télécentres sont tenus, « c’est un désordre total, comment peut-on installer une cabine dans une boutique, dans un salon de coiffure, les bruits empêchent d’entendre son interlocuteur et le pire c’est qu’on ne bénéficie même pas d’intimité. C’est déplorable. »
La Sonatel ne veut plus entendre parler de télécentre, le concept a évolué pour devenir « EspaceTel » ou « EspaceTel+ », « ces nouveaux concepts ont d’innovant la particularité d’assurer aux clients des appels effectués en toute quiétude, à l’abri des oreilles indiscrètes, mais aussi de proposer d’autres prestations aux clients » nous révèle B.N.
Contrairement au secteur du télécentre où la Sonatel exerce un monopole, l’accès à Internet est plus libéralisé, il n’est pas obligatoire de passer par la Sonatel pour avoir un abonnement, le marché est plus libre, et les opérateurs plus nombreux. L’exploitant est libre de choisir la formule qu’il estime plus avantageuse pour lui et de souscrire un abonnement auprès de cet opérateur.
Composition et tarifs du marché
Les exploitants de télécentres et de cybercafés sont d’origines diverses. Ce sont des particuliers, des représentants d’association, des commerçants, des artisans, des groupements d’intérêt économique. Plusieurs types de tarifs sont proposés, les télécentres offrent des prix variant de 65 F à 100 F. Pour les cybercafés, la fourchette de prix est comprise entre 250 F et 500 F pour une heure de connexion.
Ces deux activités sont rentables, pourvu que la gestion soit rigoureuse. La Sonatel propose 16 % de réduction, si la barre des 2 500 unités est atteinte, Pape Dieng révèle qu’ « avec une gestion rigoureuse, on peut faire des bénéfices de l’ordre de 250 000 F par mois, hors charges d’exploitation ».
Les charges d’exploitation qui s’avèrent déterminantes dans la fixation du tarif. Les exploitants propriétaires de leurs locaux sont généralement ceux qui proposent l’unité entre 60 et 65 F, les autres proposent plus, car ils doivent s’acquitter des charges d’exploitation.
Ce sont ces derniers qui militent pour une uniformisation des prix, une vision qui ne fait pas l’unanimité.
(Source Sud Quotidien 26 Août 2003)