Taxe mobile money au Sénégal : le gouvernement des fiscalistes rate-t-il le virage du numérique
lundi 15 décembre 2025
Le 16 décembre 2025, le Sénégal va marquer un tournant en arrière. Alors que l’Afrique entière accélère vers l’inclusion financière et l’économie numérique, Dakar choisit d’imposer une taxe de 0,5 % sur la monnaie électronique. Un pas de géant vers le passé.
LE MOBILE MONEY, UN LEVIER DE DÉVELOPPEMENT
Dans un pays où plus de 60 % de la population est exclue du système bancaire classique, le mobile money est devenu le poumon économique des quartiers populaires, des commerçants de rue, des femmes entrepreneures. C’est le compte bancaire du pauvre, le salariat sans banque, le commerce sans cash.
Et demain, l’État va le taxer.
UNE TAXE QUI TUE L’INCLUSION
Cette taxe, même réduite à 0,5 %, est un poison lent. Elle pénalise les plus vulnérables, ceux qui n’ont pas d’alternative. Elle freine la digitalisation, décourage l’innovation et refroidit les investisseurs dans le secteur des paiements numériques.
Pire : elle va à l’encontre des objectifs de l’UMOA, qui incite les États à promouvoir l’inclusion financière via les services numériques. La BCEAO a mis en place un cadre réglementaire moderne pour encadrer la monnaie électronique pas pour l’étouffer.
INTEROPÉRABILITÉ : BLOQUÉE PAR DES FISCALISTES QUI NE COMPRENNENT PAS LE NUMÉRIQUE
Alors que la BCEAO déploie l’interopérabilité pour réduire les coûts et fluidifier les paiements dans toute l’UMOA, le Sénégal choisit de la freiner.
Les fiscalistes qui orientent aujourd’hui la décision publique ne comprennent pas la logique numérique : pour eux, chaque innovation est d’abord une source de taxe, pas un moteur de croissance.
En taxant la monnaie électronique, ils cassent l’esprit même de l’interopérabilité, qui repose sur la fluidité et la baisse des barrières. Là où la région ouvre un système moderne, le gouvernement installe des obstacles.
LE SÉNÉGAL EST-IL EN RETARD ?
Oui. Et c’est un constat amer. Pendant que le Ghana, le Kenya ou même la Côte d’Ivoire font du mobile money un moteur de croissance, le Sénégal le traite comme une vache à lait. Pendant que les autres construisent des écosystèmes numériques, Dakar construit des barrières fiscales.
Le message envoyé aux jeunes, aux innovateurs, aux entrepreneurs ?
« Vos solutions ne sont pas les bienvenues ici. Allez ailleurs. »
CONCLUSION
Le 16 décembre ne sera pas qu’un jour de taxe. Ce sera un symbole : celui d’un gouvernement hors de phase avec son temps, qui taxe le futur pour sauver le passé. Et qui, peut-être sans le vouloir, condamne une génération à rester hors du système.
Le Sénégal veut être émergent. Il commence par émerger de l’ère numérique.
Dr Seydou BOCOUM
Premier docteur en Économie Numérique de l’UCAD
Source : groupe WhatsApp du RASA, 15 décembre 2025
OSIRIS