Soutien dans son bras de fer avec l’état : Des citoyens font de Sonatel une cause nationale
vendredi 28 octobre 2011
Surtaxe sur les appels entrants, parts des actions détenues par l’Etat au sein de la Sonatel, influence et stratégie de la société dans la sous-région... Ce sont autant de sujets qui ont été débattus hier à Dakar à l’occasion de la rencontre ayant pour thème ‘Sonatel, une cause nationale’.
En dépit d’une part de plus de 4 % dans le Produit intérieur brut (Pib) du Sénégal, des contributions importantes en matière fiscale, d’exportation, d’emploi, des responsabilités sociales...l’entreprise des télécommunications sénégalaise, Sonatel, fait néanmoins l’objet depuis plusieurs mois des plus grandes polémiques. C’est ce qu’a constaté le général Mouhamadou Mansour Seck, qui est à l’initiative, hier, d’une discussion autour du thème ‘Sonatel, une cause nationale’. Insistant sur la dimension apolitique et purement citoyenne de la rencontre, il a ouvert la séance d’échange, qu’il a baptisée ‘pencc’, en rappelant l’enjeu du secteur des télécommunications. ‘Il y a sept millions de portables au Sénégal. Tout le monde en a un aujourd’hui, quelles que soient les échelles sociales. La modernisation, c’est pour tous. Nous sommes un pays de Diaspora, il y a 3 millions de sénégalais à l’extérieur’, dit-il d’emblée. C’est pourquoi, l’ancien ambassadeur du Sénégal aux Etats unis d’Amérique estime que chaque citoyen doit s’impliquer dans le débat concernant la Sonatel, par ‘patriotisme économique’. Car, il pose les questions du développement économique du pays.
De ces débats, qui ont duré toute la matinée, le président de la Confédération nationale du patronat sénégalais (Cnes), Mansour Kama, retient qu’il urge de redéfinir les stratégies de développement du secteur des télécommunications. Ce, dans un objectif de conquête sous régionale et continentale. ‘La Sonatel est confrontée tous les jours dans la sous-région à des acteurs majeurs continentaux. C’est un constat qui nous conduit à dire qu’il ne faut pas remettre en cause sa croissance mais plutôt la renforcer’, déclare le patron des patrons de la Cnes. Kama recommande, concernant la surtaxe sur les appels entrants que le gouvernement veut faire appliquer, de fixer que les tarifs sur la base d’une concertation qui met en jeu des acteurs locaux et étrangers et qui doit répondre aux règles édictées par l’Uemoa. ‘La question qu’il faut se poser, c’est de savoir si cette surtaxe vaut la peine d’être appliquée, alors même que les risques sont patents concernant la perte d’emplois, de recettes et ont un impact important sur le développement économique’, s’interroge Kama. Qui pense que ce sont là des menaces et risques pouvant nécessiter une médiation avec les autorités pour remettre sur la table cette question des recettes de l’Etat dans le secteur des télécommunications.
Un expert de l’Uemoa, présent lors des discussions de la matinée, a pris une position très ferme, refusant les surtaxes que les pays seraient tentés d’appliquer sur les appels internationaux entrants. Semblant adhérer à cette thèse, le général Seck rappelle que le rôle de l’Etat doit être de créer un environnement favorable pour que la société puisse s’épanouir. ‘Il ne crée pas de ressources et ne doit pas s’impliquer directement dans cet espace de débat économique et de compétitivité. Ce n’est pas son rôle’, affirme le général qui pense que, même étant actionnaire, l’Etat a une place qu’il ne peut pas outrepasser.
Interpellé sur la volonté de l’Etat sénégalais d’acquérir 35 % des parts des sociétés de télécommunications opérant dans le pays, le directeur général de Sonatel, Cheikh Tidiane Mbaye, applaudit. Mais, trouve paradoxale la démarche de l’Etat. ‘Dire qu’on veut avoir une part incompressible de 35 % et faire ce qui est dissuasif pour attirer des investisseurs étrangers est paradoxal’, dit le directeur général de Sonatel. Et d’ajouter, en citant les parts de 27 % que l’Etat détient dans Sonatel : ‘rare sont les pays qui tirent autant de recettes d’une seule entreprise. Cela n’existe nulle part ailleurs. On contribue énormément pour l’Etat. Vouloir passer de 27 à 35 % c’est ajouter 8 %, sous prétexte qu’il est normal que l’Etat profite que des bénéfices de Sonatel’, s’indigne Cheikh Mbaye qui reste sceptique sur les possibilités de l’Etat de pouvoir sortir 300 milliards de francs Cfa pour se payer les 8 % de parts nécessaires pour atteindre ce pourcentage incompressible.
Anaïs Tankam
(Source : Wal Fadjri, 28 octobre 2011)