Décidément, le sort s’acharne injustement sur l’ancien Directeur général de l’Artp, Daniel Goumalo Seck. Tout se passe comme si Dame Justice avait retrouvé son sabre pour décapiter un homme déjà « puni » en perdant son poste. De quoi s’agit- il dans cette affaire menée tambour battant avec une célérité douteuse ? Il faut remonter au fameux contrat Sudatel, la troisième licence de téléphonie. Sur la somme globale du coût de cette licence, un décret présidentiel prévoit une prime pour l’Artp. Cette prime spéciale est de 2% de la somme globale, soit environ 1 milliard 600 millions du prix payé par Sudatel à l’Etat du Sénégal.
Pour cette prime spéciale légalement reconnue, le Conseil de régulation dans lequel se trouvent de hautes personnalités, décide lors d’une réunion de la clé de répartition. C’est ainsi que Daniel Seck se retrouve avec 135 millions, d’autres membres du conseil ainsi que certains responsables se partagent une bonne partie. Mais il faut aussi ajouter que l’Anoci à l’époque avait reçu une aide de 96 millions pour les besoins de la modernisation de son parc informatique.
Entendons nous bien : ce micmac tout en étant légal, n’est pas non plus moral. Mais ce qui est bizarre dans cette affaire, c’est que le rapport de l’Ige sur cette question avait été classée « top secret » jusqu’à ce que nos confrères de la « Gazette » le rendent public. Le cabinet juridique qui conseillait l’Artp lors des négociations avec Sudatel a été payé après avoir reconnu qu’il y a un décret présidentiel qui prévoit la fameuse prime. Dégommé en septembre 2009, Monsieur Seck est sommé en février dernier de restituer les 135 millions « indûment perçus « ». Par ailleurs, il était prévu qu’il disposait de trente jours pour donner une réponse à l’Agent judiciaire de l’Etat. Mais paradoxalement, avant la fin de ce délai, il est convoqué par le doyen des juges vendredi dernier pour s’entendre dire de revenir hier, mercredi 10 mars.
Entendu, il se propose via les avocats de faire une avance de 70 millions. Niet, c’est tout ou rien. Ses parents parviennent à réunir la somme et se rendent au Trésor pour payer. A leur retour, ils s’entendent dire que c’est trop tard parce que le mandat de dépôt a été déjà pris et qu’il fallait qu’aille en prison. On est en droit de se demander pourquoi cette diligence à laquelle on ne nous avait pas habitué dans ce pays où des centaines d’audits autrement plus graves dorment dans les tiroirs. Récemment encore, la presse a fait état d’audits de l’Armp qui ont épinglé plusieurs directeurs de sociétés, ministres. Pour l’heure, personne n’a été traîné devant le juge.
En tout état de cause, Daniel Seck, n’est pas convaincu d’avoir perçu « indûment » cet argent puisqu’il existe bel et bien un décret (2OO8-222 du 5 mars 2008) qui autorise cette prime de 2% sur le prix de la licence. En plus c’est le Conseil de régulation de l’Artp où siègent d’éminentes personnalités qui a décidé la clé de répartition de cette prime. Selon nos informations, sept personnes seront également entendues vendredi prochain dans le cadre de cette affaire.
Une chose reste évidente : si Daniel Seck n’accepte pas d’être l’agneau du sacrifice, il peut comme dirait l’autre, faire « sauter la République ». Mais le connaissant bien pour l’avoir côtoyé dans nos jeunes années et pour avoir milité avec lui, je crois pouvoir dire qu’il « fermera sa gueule » et payera seul une « faute » qu’il n’a pas commise et protégera à son corps défendant, des personnalités dont on se demande si elles le méritent.
(Source : Xalima, 13 mars 2010)