Piratage Suite à l’article de Sud Quotidien, publié sur Infostrat « Piratage des logiciels informatiques : Une moyenne de 82 % pour le Sénégal », une réaction s’est avérée nécessaire pour lutter contre ce mal afin que cela cesse tout en trouvant des moyens pour rétablir le droit à l’information avec l’appropriation de l’open source.
En dégageant cette piste de réflexion je me permettrai de vous proposer une communication que j’avais préparé pour les besoins du « Home Coming » de Re-source Sununet. Je rappelle que ce « Home Coming » des Sénégalais de la diaspora (la première du genre au Sénégal pour cette association de migrants), qui s’est tenu du 30 juillet au premier août au Cesag, a réuni une communauté forte de plusieurs cadres à hauts potentiels et professeurs d’université (enseignant intervenant dans les prestigieuses universités de Princeton, de Buffalo, et un peu partout dans le monde). Il était question de réfléchir à travers, des tables rondes et ateliers inscrits au menu, sur l’émigration, les flux de capitaux, les questions genre, les tics et sur les phénomènes et problèmes dont les peuples du sud et plus particulièrement les Sénégalais sont confrontés. Cette communication je l’ai intitulé « Enjeux de l’Open Source pour l’Afrique »
Problématique
Si Microsoft ne va pas vers le libre, l’open source doit aller vers les pays sud pour le rétablissement de la légalité et l’égalité de tous devant l’économie du savoir et le droit à l’information. Le sous-développement étant une charge particulière supportée par les habitants des pays pauvres, la société a sans doute une responsabilité sociale face à cette rupture de l’égalité devant les bénéfices liés à l’utilisation des tics. En effet, les toutes dernières mutations ont fait apparaître de nouvelles ressources souvent à dominante immatérielle et les organisations et/ou les populations, pour être compétitives et suivre la mouvance est obligé de recourir aux ressources rares comme l’information.
Du coup, toute survie exige la maîtrise de bout en bout la chaîne de l’information. C’est-à-dire, la collecte, le traitement et la protection des informations stratégiques et décisionnelles.
Au temps d’euphorie numérique lié à l’explosion des nouvelles technologies dans plusieurs pays a succédé le temps de la lutte contre la fracture numérique, c’est-à-dire, dans son acceptation la plus courante, la lutte contre les inégalités d’accès aux technologies numériques. Il est donc important dans cette ruée vers « l’égalité informationnelle » de comprendre la nécessité d’une démarche de système d’information à utiliser et à mettre en œuvre.
Devant cette question mondiale d’appropriation de l’information susceptible d’assurer la création de la valeur, l’adaptabilité, la pro activité et la compétitivité ; notre démarche suggère de revenir sur les outils open source et de montrer les enjeux liés à cette dynamique pour les Africains et pour le Sénégal particulièrement car les logiciels libres pourraient permettre de lutter contre la piraterie et dynamiser le secteur des TIC.
Logiciels libres
Il ne faut pas confondre logiciel libre et logiciel gratuit. Un logiciel libre n’est pas un logiciel qui n’a pas de licence mais un logiciel dont la licence vous garantit certaines libertés.
http://www.apitux.org/ donne une définition précise du logiciel libre basée sur les quatre libertés fondamentales. Les libertés d’utiliser, de copier, d’étudier et de modifier les logiciels ainsi que de redistribuer ; les versions modifiées constituent l’essence même du logiciel libre.
Nous résumerons ce modèle par cette pensée émise par Richard Stallman : « L’essor du logiciel libre permet le développement de nouveaux modèles économiques. Je peux décrire l’idée du logiciel libre en 3 mots : liberté, égalité et fraternité. »
* Liberté : La liberté de faire des copies, de diffuser des copies, de donner des copies aux autres, aux copains, et de publier des versions améliorées telles que la société entière en reçoive les bienfaits.
* Fraternité : Avec le logiciel libre, nous encourageons tout le monde à coopérer, à aider les uns et les autres.
* Egalité : Tout le monde possède les mêmes libertés en utilisant le logiciel.
Enjeux des logiciels libres
L’inégalité entre pays en développement et pays développés doit motiver aujourd’hui nombre d’acteurs à se mobiliser pour apporter aux pays en voie de développement des solutions accessibles et viables pour qu’ils puissent également profiter des avantages des tics.
C’est l’exemple de l’ordinateur à 100$ développé par le MIT, fonctionnant avec le logiciel libre Linux. Pour les pays en développement, les logiciels libres présentent de nombreux avantages.
Et faut dire que les enjeux vont au-delà du simple cadre informationnel
Enjeu pour l’éducation
D’abord, les logiciels libres permettent aux écoles d’économiser de l’argent. Même dans les pays riches, les écoles ont un budget très serré. Les logiciels libres donnent aux écoles, comme aux autres utilisateurs, la liberté de copier et de redistribuer les logiciels. Les logiciels libres permettent aux élèves et aux étudiants d’apprendre comment les logiciels fonctionnent. Le logiciel libre encourage tout le monde à apprendre. La communauté du logiciel libre rejette ce « culte de la technologie », qui maintient le grand-public dans l’ignorance du fonctionnement de la technologie.
Enseigner l’utilisation des logiciels libres aux élèves et étudiants et prendre part à la communauté des logiciels libres est une forme d’éducation à la citoyenneté. Les logiciels libres devraient être utilisés à tous les niveaux de l’École.
B. Un enjeu pour la société
Les Logiciels Libres pouvant être copiés légalement par tous, ils sont presque toujours téléchargeables gratuitement sur Internet. Cette gratuité permet aux populations les moins favorisées de ne pas être forcées d’avoir recours à la copie illégale pour bénéficier des avancées technologiques. Les logiciels libres sont par nature des outils de lutte contre la « fracture numérique ». Le fait que les Logiciels Libres soient diffusés avec leur code source permet de plus d’étudier les techniques qu’ils mettent en œuvre... Le mode de développement collaboratif au travers d’Internet utilisé par les développeurs de Logiciel Libre facilite les transferts de compétences par-delà les frontières.
Le Logiciel Libre est un bien non marchand et ceux qui le développent contribuent à la diffusion au plus grand nombre de la connaissance scientifique, d’un savoir-faire technique et de technologies permettant l’accès au savoir. Le projet GNU projet-phare du Logiciel Libre a d’ailleurs été classé Trésor du Monde par l’UNESCO.
Un enjeu économique
Le Logiciel Libre a permis le développement d’une économie dynamique dite de « coopétition » où les opérateurs mutualisent certains coûts de recherche et développement et se concurrencent sur les services autour de briques génériques. Aux Etats-Unis, en Europe, en Asie, par exemple une véritable économie de services s’est créée autour des logiciels libres.
Les entreprises du secteur se rémunèrent sur le support, la formation, l’intégration, le conseil et la spécialisation de briques génériques.
Le nombre d’entreprises utilisant des Logiciels Libres ne cesse de croître et partout dans le monde, des pans entiers des systèmes d’information d’États et de Collectivités basculent vers les Logiciels Libres.
Un enjeu stratégique
Le Logiciel Libre est de plus en plus perçu par les pouvoirs publics et les décideurs politiques comme :
– un outil de souveraineté et de politique industrielle ;
– un moyen de maîtrise des finances publiques ;
– un facteur de développement durable.
Les logiciels libres sont un exemple. Et les éditeurs comme Microsoft en sont conscients (avec la nouvelle version gratuite de sa suite logicielle Works). Mais cette solution simple, techniquement et économiquement efficace, est combattue sur plusieurs fronts par des puissances économiques qui cherchent à garder le contrôle des économies du nord comme du sud. De plus en plus, les logiciels sont et seront le vecteur incontournable de la communication, de la connaissance et de la culture. Ce peut être une chance pour le Sénégal, à condition de pouvoir les utiliser librement, en toute indépendance, en les adaptant à nos besoins et à notre génie propre.
Aboubacar sadikh Ndiaye
sadihhh@yahoo.fr
(Source : Infostrat, 4 aout 2007)