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Accueil > Articles de presse > Archives 1999-2024 > Année 2016 > Octobre 2016 > Plus loin avec Abdoulaye Fall, sociologue, doctorant-chercheur à l’IFAN : « (…)

Plus loin avec Abdoulaye Fall, sociologue, doctorant-chercheur à l’IFAN : « La banalisation de la sexualité au Sénégal n’existe pas dans les sphères domestiques, mais… »

mardi 4 octobre 2016

Usages et comportements

Entre le processus de socialisation de la société sénégalaise et une certaine « banalisation de la société » à laquelle on assiste au Sénégal, l’écart est grand. Toutefois, sociologue de profession, doctorant chercheur à l’Ifan, Abdoulaye Fall garde encore espoir que la pudeur sénégalaise est encore présente. A l’en croire, si aujourd’hui on parle de « banalisation de la sexualité » dans ce pays, il faut aussi tenir compte du fait que « ceci n’existe pas dans les sphères domestiques mais, dans d’autres canaux de rencontre et d’échange ».

De plus en plus, on assiste à ce qui ressemblerait à une « banalisation » de la sexualité au Sénégal. A votre avis, à quoi est dû cela ?

La sexualité a toujours été un sujet tabou dans la société sénégalaise en général et chez les jeunes en particulier, du fait notamment de la manière dont nous sommes socialisés, filles comme garçons. On n’en parle en effet que très rarement et à chaque fois que le sujet est abordé en public, c’est souvent à l’occasion de certains rites comme le mariage, l’excision, la circoncision etc. Et justement, ces pratiques sont directement liées à la sexualité ; du coup, on ne peut pas ne pas en parler. Alors, lorsqu’on évoque la question de la banalisation de la sexualité au Sénégal, elle n’existe pas en tout cas dans les sphères domestiques, mais plutôt dans d’autres canaux de rencontre et d’échange.

A l’exception de certaines familles nucléaires pour ne pas dire mononucléaires, « occidentalisées » que l’on rencontre le plus souvent dans les zones urbaines, la sexualité est encore difficilement abordée en famille au Sénégal, même si elle demeure du reste un sujet qui intéresse de plus en plus les jeunes. Ne pouvant en parler « sans tabou » dans leur entourage immédiat, du fait notamment de la notion de « kersa » qui entoure la question et, à l’ère du numérique et du foisonnement des réseaux sociaux, le débat sur la sexualité est transposé vers ces tribunes où tout peut être dit sans tabou, ni gêne.

Il est plus facile d’aborder la question à distance devant son écran d’ordinateur et son clavier que d’en parler in situ. C’est d’ailleurs ce qui semble indiquer qu’il y a une banalisation de la sexualité au Sénégal. On en parle certes de plus en plus mais, c’est souvent via Internet, les réseaux sociaux et les médias. La mondialisation, l’avancée technologique, la perte de repères et la démission des parents de l’éducation des enfants semblent être les facteurs les plus déterminants pouvant permettre de comprendre cette sorte de banalisation de la sexualité au Sénégal. La sphère domestique tente toutefois de résister notamment dans certaines contrées du pays.

Les réseaux sociaux servent aux personnes, surtout les femmes, de tribune ouverte pour exprimer leurs soucis d’ordre sexuel. Pourquoi ce choix et, plus ou moins, ce manque de pudeur ?

Les réseaux sociaux font partie des retombées de la mondialisation et offrent des possibilités de faire connecter des centaines de personnes sur une même et unique ligne partout où elles se trouvent à travers le monde. Ils sont également des espaces de dialogue et d’échanges qui présentent toutefois des avantages et des inconvénients suivant la manière dont les uns et les autres l’utilisent ou se l’approprient. Si d’aucuns investissent les réseaux sociaux pour la bonne cause, comme pour mieux faire connaître son entreprise, publier des offres d’emploi, communiquer des informations, entre autres. D’autres par contre en font un usage très débridé. C’est justement le cas de toutes ces femmes qui racontent, dans des groupes qu’elles supposent fermés, leur vie conjugale pour ne pas dire leur intimité dans les moindres détails. Ces messages qu’elles partagent font souvent le tour des autres groupes au grand dam de l’émettrice.

Autant dire que les réseaux sociaux sont de nos jours des lieux de rencontre, des espaces d’expression et de séduction où s’entrechoquent et s’acquièrent de nouvelles identités qui sont de loin celles véritables des membres. C’est des pseudo-identités qui ne révèlent pas toujours la personnalité réelle de l’individu pour ne pas dire de l’internaute. De ce fait, le manque de pudeur dont vous faites allusion peut être provisoire et non définitif chez ce dernier. Il n’existe en effet chez lui que lorsqu’il est connecté dans « son réseau » et disparaît dès qu’elle se déconnecte de celui-ci. Ce que les gens sont capables de dire ou de faire dans ces sphères, ils n’osent souvent pas le faire dans la réalité.

« Dans ces espaces d’échange et de rencontre, le manque de pudeur peut être provisoire et non définitif »

Je me rappelle qu’en 2010, une émission sur le business du sexe avait été source de polémique. Aujourd’hui, on en parle et ça ne heurte pas grand monde. Qu’est-ce qui est à votre avis, sur le plan sociologique, à l’origine de ce changement ?

Je serais tenté de vous dire que cette émission, dans laquelle d’ailleurs était intervenue ma directrice le Pr. Fatou Sarr, a joué un rôle important quant à l’évolution du débat public sur la sexualité au Sénégal. Enfin, des spécialistes sénégalais ont abordé publiquement la question dans toutes ses dimensions. Et si cela avait soulevé un certain tollé dans le pays, c’est parce que, non seulement la question intéresse les gens adultes comme jeunes, mais aussi la sexualité a longtemps été un sujet tabou dans notre pays que personne n’osait aborder jusque-là dans l’espace public.

Même si l’émission avait été finalement censurée et interdite de rediffusion, elle avait été une sorte de brise-glace qui a su libérer enfin tous ces businessmen du sexe, ces tradipraticiens, sexologues et autres spécialistes de la médecine moderne comme celle traditionnelle qui se font de l’argent, parce que détenant, à tort ou à raison, un remède curatif d’un certain dysfonctionnement sexuel chez l’homme ou la femme. Si depuis cette émission, le marché du « sexe » connaît un certain regain et une certaine évolution au Sénégal, il y a forcément anguille sous roche car, comme on le dit en économie, l’offre est souvent tributaire de la demande. Autrement dit, c’est parce que la clientèle existe que le marché est infesté de produits aphrodisiaques de toute sorte, exposés à même dans les rues sans que cela ne choque personne. C’est également ce qui justifie toute cette publicité autour de la sexualité dans les médias sénégalais, sans que cela ne froisse aucune conscience. Les gens sont tellement habitués à entendre les spots publicitaires relatifs au sexe que ça les laisse désormais de marbre.

Les femmes évoquent aussi des pratiques sexuelles rares, en tout cas méconnues jusque-là des couples sénégalais telles le sadomasochisme et même, on parle de partouze sur les réseaux sociaux. Ont-elles toujours existé ou est-ce nouveau au regard du processus de socialisation « pudique » des Sénégalais sur la sexualité ? Si ça a toujours existé, qu’est-ce qui est différent de nos jours pour qu’on dévoile cela au grand jour ?

Le Sénégal est un pays de valeurs et d’éducation, un Etat certes laïc, mais aussi une population fortement ancrée dans des valeurs cardinales de « kersa », « fulë », « fayda » et de « jom ». L’enfant sénégalais grandissait autour de ces valeurs, mais, avec l’avènement de la modernité, l’extraversion, l’indécence et la perversité gagnent de plus en plus de terrain et ces valeurs qui ont toujours caractérisé le Sénégal tendent à disparaître petit à petit.

Je ne peux pas par ailleurs me permettre d’affirmer que ces pratiques que vous avez citées n’ont jamais existé au Sénégal, mais dans tous les cas, au regard du processus de socialisation, et conformément aux résultats de recherche jusque-là disponibles, ceux notamment du Pr. Gora Mbodj qui a été l’un des premiers à travailler sur la question au Sénégal, filles et garçons sont différemment socialisés dans le contexte sénégalais.

Dans leur processus de socialisation, l’emphase est plutôt mise sur les rôles et statuts que doit ultérieurement assumer le futur adulte, selon qu’il soit « boroom kër » ou « boroom néék ». C’est pourquoi d’ailleurs, il parle « d’intelligence d’assimilation » chez la femme et « d’intelligence d’adaptabilité » chez le garçon. Voilà ce qui justifie la différence qu’il y a même dans la façon de masser le bébé, selon qu’il soit garçon ou fille. Le massage, « damp » en wolof, cherche à construire chez la fille « un corps harmonieux, malléable, souple, accueillant et gracieux » alors que chez le garçon, il vise à produire « une personne de labeur, de puissance, de force, une personne responsable, une personne protectrice ». Il s’agit chez le garçon de façonner un corps musclé, une personnalité de résistance et d’endurance physique et chez la fille une personne douce et tendre.

Au terme de leur socialisation primaire, l’enfant se sent investi d’un certain nombre de valeurs après notamment avoir été initié dans certains rites comme la circoncision pour les garçons ou le tatouage des lèvres « njam » pour ce qui est des filles. Ces rites initiatiques sont des moments privilégiés pour inculquer aux jeunes un certain nombre de valeurs mais aussi, une occasion pour les adultes d’aborder certaines questions taboues comme la sexualité.

Alors qu’est-ce qui a changé aujourd’hui ?

Ce qui a changé aujourd’hui, c’est que nous sommes à l’ère de la mondialisation et de l’internet accessible pratiquement partout. Le monde est devenu un village planétaire et l’accès au net est très facile en zone urbaine avec une floraison des réseaux wifi, des pass internet à 100 francs, une téléphonie mobile extrêmement sophistiquée, des chaînes de télévision occidentales qui diffusent des programmes à caractère pornographique et surtout la démission des parents qui n’ont plus le temps d’exercer leur devoir de contrôle sur leurs enfants.

Ne pensez-vous pas également que cette banalisation de la sexualité a des retombées sur la population, surtout les jeunes ? (toutes les danses sont aujourd’hui à caractère sexuel)

Sans nul doute, même si ce n’est pas un phénomène nouveau. Seulement, on en parle de plus en plus, à travers notamment les médias, mais le « sabar » traditionnel a toujours revêtu un caractère plus ou moins sexuel. Toutefois, il faut reconnaître qu’aujourd’hui, il n’y a plus de barrières infranchissables en matière de danse, notamment du côté des jeunes qui semblent rivaliser d’obscénité et prêts à exhiber publiquement et sans gêne les parties les plus intimes de leur corps juste pour le buzz.

Aïssatou Thioye

(Source : Enquête, 3 octobre 2016)

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