Plan Sarkozy anti-délocalisations : Le patronat sénégalais maintient la vigilance
jeudi 28 octobre 2004
L’arrêté anti-délocalisations signé Nicolas Sarkozy, ministre français de l’Economie, des finances et de l’Industrie continue de mobiliser, malgré le recul de son échéance. Le Conseil national du patronat(Cnp) appelle ainsi les acteurs sénégalais à la vigilance, et les autorités sénégalaises à procéder à l’adoption d’une loi sur la protection des données.
La satisfaction est bien réelle chez les acteurs des télé-services au Sénégal, après la suite donnée à l’arrêté anti-délocalisations d’entreprises du gouvernement français dont le dossier a été finalement bloqué, jusqu’en 2005. Au terme de l’action qu’il a menée auprès des autorités et du patronat français, en collaboration avec la mission économique de l’ambassade du Sénégal en France et des autorités sénégalaises, pour faire reculer ce plan de tous les dangers sur le secteur des télé services au Sénégal, le Conseil national du patronat du Sénégal (Cnp) invite tout de même à la vigilance.
Par ailleurs, l’Organisation patronale dirigée par Baydi Agne appelle les autorités sénégalaises à mettre à niveau le secteur des télé-services comme c’est le cas en France, sur certains aspects importants comme la protection des données.
Dans le plan anti-délocalisation, les autorités françaises mettent en exergue la nécessité de protéger les données fournies par les citoyens français protégés par la loi française. Aussi, les acteurs des centres d’appel, regroupés au sein du Cnp, appellent-ils le gouvernement du Sénégal à abonder dans le même sens. Sur leur communiqué général, ils ont fait savoir qu’ « il s’avère plus urgent que nos autorités procèdent à l’adoption d’une loi sur la protection des données ». Cette mesure permettra aux Call Center sénégalais d’être au même niveau de compétitivité que les centres d’appèle français. Cette requête traduit la vigilance que le patronat sénégalais met en bandoulière dans son combat face à cette mesure « sarkozienne », qui menace plus de 1500 emplois et plus d’une dizaine de milliards de F Cfa d’investissement réalisés ces dernières années au Sénégal. Aujourd’hui, disent-ils, les autorités françaises ont certes repoussé la mise en application de cette loi jusqu’en décembre prochain. Ce qui apparaît sûr, c’est que la partie sénégalaise ne compte pas baisser les bras. Lors de leur rencontre d’hier avec la presse, Abdoulaye Sarré, directeur de Pcci (Premium contact center international Sénégal) qui a jugé cette mesure française « de raciste, de xénophobe et de populiste », a suggéré que « le gouvernement français s’amuse à se faire peur pour rien ». Selon lui, « la menace sur l’emploi, brandie par les autorités françaises est un faux problème car certains centres d’appel en France peinent à trouver de la main d’œuvre pour satisfaire la demande de leur clientèle ». Son homologue de l’entreprise Call Me, Malick Seck, appelle les acteurs sénégalais à se rapprocher de leurs pairs marocains et tunisiens, pour former un bloc puissant devant cette mesure qu’il assimile à "un instrument cherchant à affaiblir les niches que les entreprises africaines ont trouvé dans le marché français ».
Rappelons que le projet d’arrêté français précise que ’tout fournisseur de biens ou de services qui utilise les services d’un centre d’appel pour émettre ou recevoir des communications téléphoniques est tenu d’informer ses correspondances de la localisation géographique de ce centre d’appel".
Les responsables du CNP se sont également interrogés sur les réelles motivations de la France sur cet arrêté de délocalisation. Pour eux, dans la mesure où le Nouveau partenariat pour le développement (NEPAD) veut faire du secteur technologies de l’information et des communications (Tics) un secteur prioritaire, ‘’on se demande si réellement la France souhaite le développement de l’Afrique’’.
Ils ont à ce propos lancé un appel à la mobilisation afin que cette mesure ne voit jamais le jour, tout en souhaitant que les autorités du sénégalaises, les secteurs privé et public se dressent ensemble pour combattre ce projet.
Bacary DABO
(Source : Sud Quotidien, 27 octobre 2004)