Les enjeux de l’intelligence artificielle au menu d’une conférence scientifique à l’UIDT
jeudi 29 février 2024
Le laboratoire des matériaux énergétiques d’économie et d’électricité de l’Institut universitaire de technologie (IUT) de l’Université Iba Der Thiam de Thiès a organisé, mercredi, une conférence scientifique pour sensibiliser des étudiants et des lycéens aux enjeux de l’intelligence artificielle, une nouvelle donne qui va révolutionner plusieurs secteurs de la vie, a constaté l’APS.
Animée par le Professeur Cheikh Sarr, vice-recteur, en charge des Etudes, de l’Innovation pédagogique et de la vie universitaire de l’Université Iba Der Thiam de Thiès (UIDT), cette conférence sur le thème « Intelligence artificielle et données au service de l’innovation et du développement durable », a été une occasion de passer un éventail d’applications de l’intelligence artificielle.
L’intelligence artificielle (IA) est un moyen par lequel, la machine grâce à l’expérience et l’accumulation de données, peut accomplir des tâches traditionnellement réservées à l’être humain.
« Ces domaines ne sont pas récents, mais ont connu une application assez récente », a relevé le conférencier, en face d’une audience composée d’étudiants de lycéens et d’autres collègues enseignants.
L’IA est déjà présente dans beaucoup d’applications sur les smartphones et sur Internet. C’est le cas de la reconnaissance vocale, de la reconnaissance faciale, Google Translator, entre autres, a-t-il noté.
« Selon une étude, d’ici 2030, 40 à 70% des métiers seront impactés par l’intelligence artificielle », a noté Cheikh Sarr. Ils vont des professions de l’écriture, comme ceux de secrétaire, de traducteur et de journaliste, à ceux de l’agriculture, en passant par les métiers des finances, de la construction, du transport de l’enseignement, du marketing, de la justice, etc.
Le secteur de la santé, notamment l’imagerie médicale, est un des secteurs qui « ont le plus boosté l’intelligence artificielle », a relevé l’universitaire, lauréat du prix international de recherche Next Einstein Forum (NEF 2019) pour ses travaux de recherche sur la mise en place d’un prototype de voiture autonome, connectée utilisant des capteurs pour les personnes à mobilité réduite.
L’IA peut s’appliquer au diagnostic médical, au développement de médicaments, aux dossiers électroniques des patients ou à la robotique chirurgicale pour des opérations plus précises. Il n’y a cependant pas lieu de s’alarmer laisse entendre l’enseignant chercheur, précisant que pendant que certains métiers disparaîtront, d’autres naîtront.
L’essentiel, rassure le Professeur Salif Gaye, c’est d’être conscient des enjeux et de préparer sa reconversion ou son adaptation, « pour ne pas être pris au dépourvu ».
Les étudiants et lycéens ont été imprégnés, lors de cette conférence, des composantes de l’IA, y compris les données qui sont essentielles pour son fonctionnement. C’était aussi une occasion de promouvoir les sciences auprès des lycéens dans un contexte où le pays compte 80% de bacheliers littéraires, a dit le Professeur Gaye.
A l’UIDT, il y a deux masters dans le domaine spécifique de l’IA. Il s’agit d’un master IA et smart tech, et d’un autre sur les sciences de données, hébergés respectivement par deux UFR.
Ces masters complètent les formations en informatique « pour contribuer à l’un des objectifs de l’Etat dans sa stratégie de développement de l’IA », a dit Sarr, à savoir former 90.000 personnes spécialisées dans les domaines de l’IA et de traitement des données dans les cinq ans à venir, d’ici 2028.
A travers cette stratégie nationale et feuille de route, les autorités cherchent à faire du Sénégal un « hub IA en Afrique de l’Ouest ». Le projet qui se veut « inclusif », devra prendre en compte l’équité sociale, dit-il. Un cadre juridique est déjà élaboré pour encadrer l’aspect éthique de l’IA.
Pour le Professeur Cheikh Sarr, l’idée de cette rencontre était de « lancer la réflexion et le travail pour que dans les années à venir qu’on prenne l’IA comme une discipline à part entière, qui doit être intégrée dans les formations universitaires ».
Il a salué l’initiative d’y inviter des lycéens, futur « vivier » de l’université, afin qu’ils comprennent les possibilités qui s’offrent à eux pour des besoins d’orientation.
L’Etat a commencé à accompagner le développement de l’IA au Sénégal à travers des financements mis en place, pour essayer d’impacter ce secteur et d’essayer de l’amplifier dans les années à venir, a-t-il fait valoir.
Toute une infrastructure technologique est en train d’être mise en place, épauler cette dynamique avec le cas du supercalculateur et le data center de Diamniadio. « Dès qu’on est capable de faire un stockage de données important, on est capable derrière de faire de l’apprentissage et de mettre en place des systèmes d’intelligence artificielle », a-t-il dit.
Il a insisté sur les risques d’une mauvaise utilisation de l’IA, qui selon lui, devrait servir de « complément dans la formation plutôt que (d’)outil (devant) remplacer la réflexion humaine ».
« Il y a une chose que l’IA ne peut pas vous garantir ; c’est la fiabilité ou pas de l’information qu’elle vous donne », poursuit-il, non sans ajouter que c’est l’être humain qui, à travers ses recoupements et ses recherches, doit en vérifier la véracité.
« C’est pourquoi, on aura besoin de l’enseignant pendant très longtemps, pour régler ce genre de problématiques », estime Cheikh Sarr, même s’ils devront enseigner autrement à des apprenants qui ont accès aux mêmes connaissances qu’eux, sinon plus grâce à l’IA. Des élèves peuvent recourir à des applications comme ChatGPT, pour traiter des exercices à leur place, à générer des textes, ou résumer des textes.
« La quatrième révolution industrielle est celle du numérique et rien ne peut se faire sans (lui) », a relevé Salif Gaye, soulignant la nécessité de se mettre à jour. La trentaine d’enseignants chercheurs membres de ce laboratoire transversal de l’IUT, entendaient jouer leur partition dans cette mise à jour, à travers cette conférence inscrite dans l’animation scientifique de l’UIDT.
Pour le professeur Sarr, il faudra à défaut de combler le gap, développer l’IA qui nous sépare des pays occidentaux notamment les Etats-Unis d’où, part l’initiative, adapter l’IA à notre contexte pour répondre à des problématiques qui nous sont propres.
(Source : APS, 29 février 2024)