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Accueil > Ressources > Points de vue > 2025 > New Deal Technologique, le challenge du Jubanti

New Deal Technologique, le challenge du Jubanti

samedi 15 mars 2025

Point de vue

Le New Deal Technologique (NDT) a ressuscité nos rêves d’antan d’une administration publique digitalisée au Sénégal. Au-delà des effets d’annonce avec les formulations digitales qui sont en vogue, il est important de prendre en considération l’historique de l’écosystème, au risque de restreindre cette dynamique à un rattrapage d’un déficit d’investissement dans la perspective d’une transformation digitale de toute la société sénégalaise.

La digitalisation des procédures (process) peut être considérée comme l’élément moteur de la stratégie. Celle-ci doit aussi jouer un rôle important d’entraînement dans la consommation populaire de l’IA (Intelligence Artificielle). Le New Deal doit aussi jouer un rôle d’impulsion du secteur privé, pour créer des champions sectoriels d’envergure continentale dans la digitalisation des administrations publiques. C’est la bonne animation de ce trépied qui fera le succès de ce New Deal. New Deal parce qu’il y a eu effectivement des anciens Deals technologiques. D’abord par l’émergence en 2004 de l’ADIE (Agence De l’Informatique de l’Etat), ensuite qui a été remplacée en 2021 par Sénégal Numérique, sans oublier la création de l’ARTP en 2011. Sans revenir dans le détail des missions de chacune de ces entités. Globalement elles ont été présentées avec le mirage d’amener l’efficacité dans l’administration publique par une appropriation des nouvelles technologies pour utiliser le jargon d’antan ou, pour faire moderne, de transformer digitalement l’Etat et d’amener la connectivité à toutes et partout. S’il faut un nouveau Deal, pourquoi les Deals antérieurs n’ont pas atteint leurs objectifs ?

En 2001, nous avons eu le privilège de piloter le premier programme e-gov du Sénégal ou e-Sénégal. C’était un programme en « fast track » qui bénéficiait des reliquats de financement de la Banque Mondiale sur le bug de l’an 2000. Il fallait sur une durée d’une année environ procéder à l’ensemble des décaissements. Nous avions mis en place une stratégie pour poser les fondations d’une administration numérique par la fourniture des services de bases bureautiques aux administrations centrales et l’infrastructure pour soutenir les futures digitalisations des procédures administratives. Une grande partie des infrastructures prévues ont été mises en place mais il n’y a pas eu de résultat sur la digitalisation des procédures. Pourquoi ? Principalement parce qu’à la fin du programme, l’entité bénéficiaire s’était recentrée presque exclusivement sur la partie infrastructure. Ce n’est pas nouveau, les projets informatiques pour un grand nombre, n’aboutissent à rien de tangible et ceci à l’échelle mondiale. Dans l’administration publique sénégalaise, on est dans l’exception pour les projets de transformation digitale qui ont eu des résultats à la hauteur des objectifs ciblés. Ceci impacte négativement le développement de la transformation digitale de l’administration et par extension de tout l’écosystème digital du pays notamment les sociétés “informatiques”. L’Etat étant le plus grand client du secteur privé. Depuis longtemps, la digitalisation de l’administration publique sénégalaise était essentiellement localisée au niveau du ministère des Finances et dans une moindre mesure au ministère de l’Intérieur. En écoutant il y a quelques jours, le ministre des Finances lister les solutions quant aux manquements sur les dettes de l’Etat et le besoin d’amélioration de la gestion des finances publiques, j’ai cru revenir 20 ans en arrière. En 2005, un diagnostic avait été fait sur le déficit d’interfaçage entre les trois régies financières (Douanes, Impôts et Comptabilité) et le problème de conciliation des chiffres entre leurs systèmes respectifs.

J’ai le même ressentiment lorsque j’entends le besoin de transparence dans le foncier également. Il faut se rappeler que l’un des premiers projets informatiques dans l’administration a été sur le cadastre fiscal. C’était avant les années 1990. Tout le déploiement avait été fait en termes de matériels et de logiciels. Toutefois le système n’a jamais fonctionné. La digitalisation du foncier est un cas d’école, vu la multitude de projets qui se sont attaqués à cette problématique et les dizaines (voire centaines) de milliards de francs CFA qui se sont dissipés dans le sable du foncier.

Je pourrais en citer encore pour donner une idée des montants importants qui ont été investis en vain dans cette problématique de digitalisation dans l’administration publique. Ceci pour dire que le problème est loin d’être une absence de mobilisation de ressources. L’un des commentaires lors de la cérémonie de présentation du New Deal, m’a conforté dans cette certitude. Il faisait état plus ou moins d’un investissement à l’emporte-pièce dans le Sénégal Numérique.

Digitalisation

Le système Gaïndé de la Douane sort un peu du lot dans ce tableau figé. Nous avons eu à piloter le premier projet de modernisation de ce système vers les années 2002. Sa grande particularité était son orientation à valoriser pleinement l’expertise privée locale. Ainsi, au-delà d’avoir été un précurseur dans l’utilisation de méthodes de développement d’avant-garde en ce temps, il a été un tremplin pour un certain nombre de sociétés informatiques dans leurs expansions dans la région sub-saharienne. Elles ont pu capitaliser leurs expériences dans ce projet d’envergure. Comme dans tous les secteurs, la commande publique est un levier essentiel pour faire des champions en termes de savoir-faire exportables. Pourtant c’est un système qui est né au forceps à cause des grandes résistances à son déploiement. Ce système ne serait peut-être pas arrivé à ce “succès”, si son Directeur Général de l’époque, n’avait pas usé de toute sa poigne pour imposer sa mise en service, au risque de bloquer tout le cordon douanier. Ce procédé d’implémentation au forceps est courant dans la mise en production des systèmes informatiques des administrations publiques et généralement sous le diktat des bailleurs de fonds ou bien parce que l’on est dos au mur. Si la pression n’est pas là, ça échoue généralement à « Terou Baye sogui ».

L’expérience que l’on peut tirer de tout ce gâchis est que sans une volonté ferme de Jubanti au plus haut niveau, à la limite du « quoi qu’il en coûte », le New Deal Technologique rejoindra les anciens Deals, quelle que soit l’ingéniosité des sommités qui le pilotent. Ceci pour trois raisons fondamentalement :

– On apprend très vite dans les administrations que l’information donne le pouvoir. La digitalisation qui pourrait libérer les informations des tiroirs menacent les intérêts d’un grand nombre. Les tranchées se creusent rapidement.

– Les esprits corrompus ne s’intéressent qu’aux moyens de décaissement rapides et d’envergures. L’implémentation des infrastructures est de loin plus favorable à ce type de scénario.

– Les projets doivent être orientés à la production de contenus par la digitalisation des procédures administratives dans leurs cycles de vie. Et non dans l’implémentation d’infrastructures qui pourront servir plus tard à une production de contenus hypothétiques.

D’où l’importance d’une stratégie « content driven » et non « infrastructure driven ». Je suis arrivé à être un peu jusqu’au-boutiste : marre de voir des infrastructures informatiques (Datacenter, Backbone Telecom, …) flambant neuf mais qui roulent à vide en direction des cimetières. Ce dernier point n’est pas une exclusivité sénégalaise mais un problème de fond dans l’optimisation des investissements informatiques presque à l’échelle mondiale [1]. La digitalisation des procédures administratives publiques a des exigences sans commune mesure avec l’implémentation d’une infrastructure. Elle est essentiellement tributaire de la capacité à conduire des changements en profondeur dans les entités publiques. D’aucuns peuvent se permettre de surdimensionner, sans un regard dans le porte-monnaie. Mais un pays pauvre ou émergent pour certains, où des enfants passent la nuit avec la faim, des femmes accouchent aux cimetières et des malades capitulent sous la douleur, il faut être sans cœur pour gaspiller un centime du bien public.

Dans un pays, où tout est urgent, la rentabilisation des investissements est fondamentale. C’est pourquoi, il faudrait savoir raison garder sur la marée de l’Intelligence Artificielle (IA). Effectivement, c’est une grande opportunité pour l’Afrique en termes de raccourci ou Quick-win. Cependant il faut savoir jouer dans sa catégorie en attendant mieux. Il n’est pas possible de rivaliser même dans le moyen terme avec les ténors dans ce domaine.

Des mastodontes en digitalisation comme l’Inde sont plus ou moins largués dans cette mouvance. Mais ceci n’empêche aucunement de pouvoir comme consommateur l’exploiter autant que les grands et se préparer à prendre notre part dans les versions 10 ou 11 de l’IA. Ça ne tient qu’à une chose : rendre les langages de codage informatique populaire, pour tous et partout. Il faudrait donc revisiter le contenu pédagogique des collèges et des lycées, pour arriver à capter la conscience jeune au détriment du football et du lamb. D’autant que l’impact de l’IA dans le système éducatif sera assez violent. L’exemple type est l’apprentissage des langues.

Langage du futur

J’ai entendu récemment le Ministre de l’Education Nationale prêcher pour l’introduction de l’anglais dans les cursus élémentaires. Une perspective à moyen terme de l’IA est de permettre de lire et discuter dans n’importe quelle langue. Je parlerai français et mon interlocuteur chinois m’entendra dans sa langue. Je parcourrai des textes en allemand pour les lire en français. Le concept du bilinguisme sera « has been » ainsi que d’autres fondements du contenu éducatif actuel. D’où la nécessité d’un changement de paradigme avant qu’il ne soit trop tard. La base infrastructurelle existante permet d’initier la digitalisation de l’administration publique. Il s’y ajoute que les concepts d’infrastructures élastiques permettent d’arrimer son expansion à la montée en charge des applications, pour contourner les investissements en avance de phase. Il faudrait donc lancer en priorité les grands chantiers de facilitation des procédures des administrations publiques et adapter l’infrastructure en fonction de la progression du premier.

L’effet moteur du bouillonnement de la digitalisation, doit aussi favoriser l’émergence d’entreprises championnes dans un des secteurs clés des domaines publics que sont : les finances, la santé, la gestion des identités, l’agriculture, l’environnement, etc. L’administration publique en termes d’envergure peut offrir le cadre idéal pour amener à maturité le savoir-faire technique des plus entreprenants.

In fine, dans le New Deal technologique, le challenge n’est pas technique. La condition nécessaire à son succès est d’abord la volonté et la fermeté de ses sponsors, au plus haut niveau de l’Etat, d’imposer le cap dans le cadre maîtrisé d’une conduite du changement, en perspective d’une transformation de la structure publique en profondeur. Le challenge sera principalement la capacité à organiser et accompagner les sociétés informatiques locales dans l’implémentation de projets d’envergures nationales. Il y en a qui ont la capacité technique mais à cette échelle il faut avoir une expérience dans l’organisation du détail des détails. Il faudrait qu’à mi-parcours on puisse percevoir entre autres les champions dans la digitalisation de l’écosystème santé, l’écosystème de l’état-civil étendu, l’écosystème de la justice, l’écosystème des finances publiques, etc.

Enfin, l’appropriation des nouvelles technologies par la masse populaire, notamment l’IA, sera un tournant dans la capacité de notre pays à se faire une place dans le monde de demain. Ça nécessite un changement de paradigme total dans le cursus académique. Il faut savoir parler le langage du futur au risque de rester dans les tribunes.

Boubacar Khouma

(Source : Sud Quotidien, 15 mars 2025)


[1] Sujet traité plus en détail dans mon ouvrage « Une gouvernance informatique disruptive »

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