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Accueil > Articles de presse > Année 2025 > Novembre 2025 > Le mobile money à l’épreuve du fisc : Laffer qui risque de déraper ?

Le mobile money à l’épreuve du fisc : Laffer qui risque de déraper ?

vendredi 28 novembre 2025

Fiscalité

Le célèbre économiste Arthur Laffer avait théorisé sur l’effet de l’excès de l’impôt sur la viabilité de l’impôt. Aujourd’hui le gouvernement du Sénégal mise sur la taxation des transferts d’argent pour renflouer ses caisses à hauteur de 220 milliards FCFA sur 3 ans, les économistes et opérateurs redoutent un effet boomerang. Entre nécessité budgétaire et étouffement de la finance digitale, la ligne de crête est en effet étroite. La mesure envisagée dans le cadre du « Plan de redressement » du gouvernement est jugée contre-productive, car elle risque de décourager plus qu’elle ne rapporte, avec toutes les probabilités de « tuer » le secteur fintech / mobile money.

Les critères de convergence dans l’UEMOA, faut-il le rappeler, fixent le seuil de pression fiscale à 20% du PIB, mais le Sénégal qui affiche un taux qui tourne autour de 19% est décidé, du moins le gouvernement, à investir les niches fiscales du secteur du numérique et de taxer davantage les consommateurs et l’économie. Dans le cadre de son « Plan de redressement », le gouvernement envisage d’instituer un prélèvement sur les activités liées au numérique et d’instaurer une nouvelle taxe sur les transactions d’argent mobile.

Ainsi, jadis calé sur les factures de téléphone et internet (environ 1-2% du montant) et payé par les opérateurs, puis répercutée sur les abonnés finaux, le prélèvement de la RUTEL (Redevance pour l’utilisation des télécommunications) sera désormais étendu au mobile money et autres transactions électroniques.

La décision visant à réviser la RUTEL (instituée en 2009) a fait l’objet d’un projet de loi n°18/2025, adopté le 10 septembre dernier en Conseil des ministres et modifiant la loi n°2008-46 instituant la RUTEL, examiné le 15 septembre 2025 par l’Assemblée nationale, dans le cadre de l’examen du projet de loi portant révision du Code général des impôts.

Avant son abrogation partielle en 2012, la RUTEL générait quelque 50 milliards FCFA par an. A travers ledit projet de loi qui porte sa révision, le gouvernement actuel cible des recettes fiscales de l’ordre de 220 milliards sur 3 ans. Le projet de loi instaure l’application d’une taxe au taux de 0,5 % sur chaque transfert d’argent et un de 1,5 % sur les paiements marchands via mobile money. A l’échelle du consommateur, cela représente une augmentation de 50% sur les frais opérateur puisque, pour un transfert d’un montant de 10 000 FCFA (+ 100 ou 80 FCFA de frais selon l’opérateur), il faudra désormais ajouter 0,5% soit 50 FCFA ou 40 FCFA de plus. En clair, l’opérateur ajoute la taxe à ses frais habituels de cash-in- cash-out, ou de transfert, ce qui renchérit immédiatement la transaction. Idem pour le paiement effectué par usage d’un code marchand, le montant reçu par le titulaire du code marchand fera l’objet d’un prélèvement de 1,5 % par l’opérateur de transfert d’argent. Il y a là un risque d’affaiblissement des services marchands (Commerçants, TPE, PME) en rendant certains paiements électroniques moins attractifs par rapport au cash, freinant par la même occasion la formalisation du commerce.

Seuls les opérateurs de dépôt d’espèces pour conversion en monnaie électronique auprès des opérateurs de transfert d’argent, sont exonérés de ce prélèvement, comme tous les retraits d’espèces au niveau des guichets de transfert, lorsque le montant retiré en une journée ne dépasse pas 20 000 francs Cfa. Au-delà de ce montant, le retrait est frappé du prélèvement de 0, 5%, plafonné à 2000 francs Cfa.

Retour au cash ?

La valeur estimée du marché des transactions numériques au Sénégal est de 15 300 milliards de FCFA en 2025 (OSIRIS) et traduit l’importance systémique de ces plateformes. En 2021 déjà, tous les paiements numériques (y compris monnaie électronique) au Sénégal ont atteint près de 17 395 milliards FCFA, pour environ 998 millions d’opérations (Senenews) et en 2022, Wave a enregistré environ 12 000 milliards de FCFA de transactions (socialnetlink.org).

Si la taxation du mobile money est une niche de recettes, son application inconsidérée est susceptible d’une part, de ralentir fortement l’adoption du numérique, et de pénaliser les petits commerçants et, d’autre part, de susciter l’exclusion financière et donc d’affaiblir un secteur stratégique.

Dans ce contexte, les petits paiements fréquents sont les plus sensibles , car une taxe additionnelle augmente le coût d’usage et risque de freiner l’adoption ou de pousser au cash, surtout pour les ménages à faible revenu.

En outre, 1,5% sur les paiements marchands pèse sur les marges déjà faibles des petits commerçants qui vont répercuter le coût sur les consommateurs voire refuser carrément le paiement mobile. « Une taxe sur les transferts numériques agit comme un frein psychologique », explique l’économiste S.G. “Dès que les usagers perçoivent une perte sur chaque transaction, ils ont tendance à revenir au cash”, souligne-t-il.

Or, le Sénégal a adopté des textes visant à lutter contre les mouvements de fonds en espèces (droits de timbre de 1% sur tout paiement en espèces supérieur à 100 K afin de réduire les flux de transactions en espèces.

Cette fiscalisation à outrance des transactions met la pression sur la rentabilité et sur l’investissement fintech, surtout au niveau des petites qui risquent de voir leurs unités économiques détériorées, du fait de la baisse de volumes, et de la compression des en plus des coûts opérationnels (collecte, reporting fiscal).

Plutôt que de taxer le client final, les opérateurs de monnaie électronique, à travers l’Association des fintechs et émetteurs de monnaie électronique, avaient proposé à l’Etat de taxer plutôt les revenus,« parce qu’on n’a pas encore atteint la maturité du paiement marchand et il ne faut pas tuer le business dans l’œuf », explique l’Expert Oumar Diallo. La proposition faite alors à l’Etat semble alléchante puisqu’il serait question de recettes de l’ordre de 530 milliards de Fcfa (contre une projection de 230 milliards Fcfa) à l’horizon 2027, sur la base d’une taxation de 2,5% sur les revenus des fintechs. « Sauf que la loi avait été déjà votée », regrette M. Diallo.

Toujours est-il qu’en renchérissant les coûts, les couches marginales (zones rurales, personnes à faible revenu) sont susceptibles de « bouder » l’usage du mobile money, portant de ce fait, un sacré coup à l’inclusion financière que nos Etats s’échinent à améliorer. Reste à analyser l’effet budgétaire de cette mesure sous l’angle du coût économique et social.

Pas trop serrer la vis

S’il est vrai que l’État peut certes engranger des recettes conséquentes (estimation 200–220 milliards FCFA/3 ans), une contraction du volume des transactions peut, non seulement réduire les recettes attendues, mais aussi engendrer des coûts sociaux (moins d’activité numérique, perte d’emplois liés au mobile money). Le principe de l’élasticité fiscale négative veut que, lorsqu’on augmente ou crée un impôt, les assiettes (ici, l’usage du mobile money) se contractent plus que proportionnellement entraînant une chute de la recette attendue. En clair : plus la baisse des volumes est forte, moins l’État gagne de l’argent, tout en fragilisant l’écosystème. C’est le principe central de la courbe de Laffer : « trop d’impôt, tue l’impôt ! » Par Analogie, c’est comme serrer une vis trop fort : au lieu d’augmenter la pression, vous cassez le support. Autrement dit, « ne pas tuer la poule aux œufs d’or »

L’autre risque est relatif aux levées attendues (ex. objectif de mobilisation domestique) qui pourraient être remises en cause par un effet de second tour (baisse des volumes). En clair, la mesure fiscale visant les transferts d’argent pourrait se propager et finir par impacter d’autres secteurs économiques (biens et services, commerce informel) par le biais d’une augmentation des prix généralisée, transformant une taxe spécifique en un vecteur d’inflation ou en un frein à la formalisation de l’économie.

En simulant l’impact de la taxe mobile money (0,5%) selon différents scénarios de baisse d’usage inspirés de cas réels en Afrique, on peut faire quelques déductions : sans effet (0%) → l’État collecte 50 milliards FCFA/an ; une chute de -10% (style Kenya) → les recettes tombent à 45 milliards FCFA/an ; -20% (style Ghana) → 40 milliards FCFA/an ; -30% (style Tanzanie) → 35 milliards FCFA/an ; -40% (style Ouganda) → 30 milliards FCFA/an.

Mêmes causes, mêmes effets

Dans les années 1970, l’économiste Arthur Laffer montrait qu’au-delà d’un certain seuil, trop d’impôt tue l’impôt. En d’autres termes, plus le taux augmente, plus l’assiette se rétrécit, jusqu’à faire chuter les recettes fiscales. Appliqué au mobile money, le principe est redoutable. En Ouganda, une taxe similaire de 1 % avait fait plonger les volumes de transactions de 24 % en un trimestre. En Tanzanie, la baisse avait dépassé 40 %, forçant le gouvernement à revoir sa copie.

Le cas du Kenya (2013–2020) est cependant quelque peu différent. En effet, il n’y a pas eu d’effondrement comme en Ouganda/Tanzanie, mais une hausse du coût pour les usagers, suite à l’introduction progressive de taxes (sur les frais facturés par opérateurs, puis sur certaines transactions). Certaines couches vulnérables sont revenues partiellement au cash et si le marché a tenu, c’est parce que M-Pesa (service kenyan de paiement par téléphone mobile) est quasi incontournable du fait d’un effet d’“inélasticité” (Le service est dominant et incontournable plus fort) : la taxe réduit l’inclusion mais ne détruit pas le système.

En somme, officiellement, il s’agit pour le gouvernement de mobiliser de nouvelles ressources pour renflouer le budget national. Officieusement, c’est un pari risqué sur la tolérance des utilisateurs et la maturité du marché. « Tout dépendra de la finesse de mise en œuvre. Si la taxe devient punitive, elle ralentira l’adoption. Si elle s’intègre dans une logique d’investissement dans le numérique, elle peut au contraire renforcer la confiance dans l’écosystème », conclut notre économiste.

(Source : Le Journal de l’Economie sénégalaise, 28 novembre 2025)

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