Le Fonds de solidarité numérique à l’agonie : La fracture est encore ouverte
mercredi 28 octobre 2009
Ayant constaté l’échec du Fonds de solidarité numérique mis en place pour combler le gap entre les pays du nord et ceux du sud, le chef de l’Etat, qui s’est fort indigné de cette situation, considère, avec ses partenaires, que le Fonds n’est plus viable dans sa forme actuelle.
Le Fonds de solidarité numérique, une initiative du président de la République du Sénégal, créé pour combler la fracture numérique entre les pays du nord et l’Afrique s’est soldée par un échec. Un échec qui reste à travers la gorge du chef de l’Etat. Car pour Me Abdoulaye Wade, qui revendique la propriété intellectuelle de ce projet, « il y a un détournement d’objectif », à l’origine de l’échec. « La fondation créée à Genève n’a pas suivi ce que je pensais, en tant que fondateur », a déploré le président de la République qui croit d’ailleurs qu’il en a été écarté. « Je me suis senti moi-même marginalisé pour une vision financière qui n’était pas la mienne. »
Mais le chef de l’Etat impute ce manquement à Alain Clerc, le Secrétaire général de la fondation numérique, qui avait hérité de ce poste suite à la démission du maire de Genève, qui en est un membre fondateur. Le président de la République souligne que beaucoup d’argent était dépensé pour des voyages. Selon les résultats de l’audit cités par le Président, pour des fonds de 7 800 000 000 francs Cfa, plus de la moitié, soit 5 200 000 000 frs Cfa vont en frais de fonctionnement, là où le Secrétaire général affirme n’avoir dépensé que 2 800 000 frs. Et le plus bizarre dans tout cela, pour Wade, c’est que « nous n’avons aucune preuve de l’existence de son projet ». C’est de ce constat d’échec que la rencontre de Bamako a été tenue, en vue de prendre certaines décisions. Au sortir de celle ci, il a été convenu de mettre un terme aux fonctions de M. Clerc. C’est ainsi qu’il sera décidé de confier au Président Wade les rênes de la fondation pour une période transitoire, ce qui lui confère aussi le droit de procéder à la dissolution de la fondation en Suisse. Cette entreprise, Wade va l’entamer en s’attachant les services d’un avocat commis pour suivre les procédures de dissolution, et un auditeur, qui a procédé aussi à l’audit de la Fondation.
Et l’audit aurait révélé des insuffisances dans la gestion du Secrétaire général. Seulement, les avis sont partagés sur la question, car d’aucuns estiment que c’est plutôt un détournement de fonds, là où d’autres voient une faute de gestion. En tout cas, la religion du Président Wade a été faite : « C’est un détournement de biens sociaux collectés par les pays membres de la fondation numérique, auquel vient se greffer une usurpation de fonction. » Maître Abdoulaye Wade signale qu’après la décision de mettre fin à ses fonctions de Secrétaire général, Alain Clerc « a continué à se prévaloir de son ancien titre », en faisant des déclarations et convoquant des assises, comme celles qui ont eu lieu à Abuja.
Pour hier, le chef de l’Etat sénégalais avait pour mission de convoquer une nouvelle Assemblée générale, un nouveau conseil de la fondation. Mais après le constat de ces insuffisances, il a préféré convoquer une réunion d’urgence, tenue hier à l’hôtel Méridien en présence des autorités d’autres pays membres de la fondation.
Unanimité sur la dissolution de la fondation. Les membres du Fonds numérique de solidarité se sont accordés à mettre fin à cette fondation et de créer une nouvelle qui sera relancée sur des bases claires où le rôle de chacun sera déterminé. Mais la question est de savoir où domicilier cette nouvelle fondation qui va voir le jour après l’ancienne. On s’attend pour certains à ce qu’elle soit une exclusivité de l’Afrique et pour d’autres, il faut inclure les autres puissances. Et c’est ce que pense le père de cette fondation qui voudrait l’élargir aux autres pays mais en gardant le contrôle de son esprit. Wade pense que si les puissances mondiales dirigent cette structure, elles ne seront pas contrôlables par les Africains. Alors que son objectif, c’est d’arriver à voir chaque africain avec un ordinateur pour résorber cette question de la fracture numérique.
Justin Gomis
(Source : Le Quotidien 28 octobre 2009)