Daniel Sarr, Directeur général d’ODS :”Notre ambition est de créer une communauté agissante de mentors qui accompagneront l’émergence des futurs champions de l’entrepreneuriat sénégalais”
samedi 30 novembre 2024
Daniel Sarr, Directeur général de ORBUS Digital Services (ODS), répond aux questions de Le Tech Observateur suite à la mise en œuvre de la première saison du programme Sunu Seonbae, un projet ambitieux de mentorat destiné à soutenir les entrepreneurs sénégalais. Il revient sur le bilan de la première phase, les défis rencontrés et les perspectives.
Le Tech Observateur : Quel bilan faites-vous de la première phase du programme Sunu Seonbae en termes de formation des mentors et d’accompagnement des entrepreneurs ?
Daniel Sarr : La première année du programme Sunu Seonbae, fruit d’une collaboration entre le consortium KPC, la KOICA et le Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, a démontré le potentiel du mentorat dans l’écosystème startup au Sénégal. Ce programme incarne notre vision de construire une communauté dynamique et diversifiée de mentors pour soutenir la prochaine génération d’entrepreneurs sénégalais. Voici quelques chiffres clés : sur 409 candidats initiaux, nous avons présélectionné 50 profils, retenu 30 candidats au démarrage, pour finalement voir 23 mentors compléter avec succès le programme. Cette sélection nous a permis de réunir des experts aux profils variés, couvrant des domaines comme le digital, les industries culturelles et créatives, l’agritech, la finance et l’environnement.
Le programme de formation, intense et complet, s’est déroulé sur trois mois, comprenant 86 heures de cours, des workshops pratiques et des séminaires. Ces moments ont été ponctués d’événements de networking riches en émotions, permettant de tisser des liens solides au sein de la communauté.
Aujourd’hui, nous entamons la phase cruciale du programme : la mise en relation de nos mentors certifiés avec 25 startups sélectionnées. Cette première cohorte n’est que le début d’une aventure plus large. Notre ambition est de créer une communauté agissante de mentors qui accompagneront l’émergence des futurs champions de l’entrepreneuriat sénégalais.
Le Tech Observateur : Quels impacts concrets avez-vous observés chez les entrepreneurs soutenus, et pouvez-vous partager un exemple marquant de réussite ?
Daniel Sarr : Le programme de mentorat est encore dans sa phase initiale, et il serait prématuré de parler d’impacts transformationnels. Cependant, les premiers signaux sont encourageants : 25 startups ont déjà bénéficié de sessions de mentorat, et l’enthousiasme manifesté par les participants, ainsi que les nouvelles demandes que nous recevons, témoignent de la pertinence de notre approche.
Fort de ces premiers retours positifs, nous travaillons avec notre partenaire KPC pour structurer davantage la phase de mentorat. Dès décembre 2024, nous lancerons un appel à candidatures formalisé pour les startups. Cette approche nous permettra d’optimiser l’adéquation entre mentors et mentees, un facteur clé du succès de tout programme de mentorat.
Les startups sélectionnées bénéficieront d’un accompagnement intensif de trois mois par notre communauté de mentors à partir du mois de janvier. Cette durée nous permettra de mettre en place des indicateurs de performance précis et d’évaluer l’impact réel du programme sur l’écosystème entrepreneurial sénégalais.
Nous prévoyons d’avoir un recul suffisant et des résultats mesurables à partir de la deuxième année du programme. Cette patience dans l’évaluation reflète notre engagement à mesurer non pas simplement l’activité de mentorat, mais son impact concret sur le développement et la réussite des startups accompagnées.
Le Tech Observateur : Quels ont été les principaux défis rencontrés lors de cette première phase, et comment comptez-vous les surmonter dans les prochaines étapes ?
Daniel Sarr : Nous avons été confrontés à plusieurs défis, qui se sont révélés être de précieux enseignements pour la suite. Le contexte politique tendu, marqué par les tensions électorales, nous a contraints à une grande agilité, nous obligeant à reporter le démarrage du programme et à adapter plusieurs fois notre approche. Cette situation nous a toutefois permis de développer une résilience organisationnelle qui nous servira pour les futures éditions.
L’un des défis majeurs a concerné la gestion du temps des mentors. Le caractère intensif du programme s’est parfois heurté aux contraintes professionnelles de ces cadres, consultants et dirigeants expérimentés. Cette expérience nous a conduits à réfléchir à un format plus flexible pour les prochaines éditions, avec notamment la mise en place de modules hybrides combinant sessions présentielles et virtuelles.
L’hétérogénéité des profils au sein de la cohorte, si elle constituait une richesse indéniable, a également représenté un défi en termes d’animation et de contenu pédagogique. Nous avons constaté des différences significatives dans les attentes et les besoins des participants. Pour y répondre, nous envisageons de créer des parcours plus personnalisés, adaptés aux différents niveaux d’expérience et domaines d’expertise.
Un autre point important a été la nécessité de clarifier le rôle exact du mentor. Nous avons observé une certaine confusion entre mentorat, coach et consultant. Cette situation nous a amenés à développer une charte du mentor plus détaillée, définissant clairement les contours de cette fonction et les attentes mutuelles dans la relation mentor-mentoré.
Enfin, nous avons été confrontés à une demande très forte de la part des startups pour bénéficier de mentorat, dépassant notre capacité d’accompagnement actuelle. Cette situation, bien que positive car démontrant la pertinence du programme, nous pousse à repenser notre modèle de scaling pour les prochaines phases, notamment en développant des outils digitaux de mise en relation et de suivi des relations de mentorat.
(Source : Le Techobservateur, 30 novembre 2024)