Cybersécurité : un impératif pour la transition numérique du Sénégal
mercredi 20 novembre 2024
Le Sénégal, comme la plupart des pays africains, est pleinement engagé dans la révolution technologique. Le pays multiplie les investissements dans le secteur, noue des partenariats stratégiques, mais rencontre des difficultés sur un segment important.
L’Union internationale des télécommunications (UIT) classe le Sénégal dans la catégorie Tier 3 avec un score de 67,17 sur 100 à l’indice de cybersécurité, loin derrière les leaders sous-régionaux comme le Ghana et le Bénin. C’est qu’a révélé le rapport « Global Cybersecurity Index 2024 » paru en septembre qui met en lumière la situation des pays du monde en matière de cybersécurité.
Selon l’UIT, les pays appartenant à cette catégorie sont ceux « faisant preuve d’un engagement de base en matière de cybersécurité ». Avec le lancement en octobre dernier du « New Deal Technologique », les ambitions du Sénégal dans le secteur du numérique vont au-delà du simple engagement de base sur le segment de la cybersécurité. D’après le ministère de la Communication, des Télécommunications et de l’Economie numérique, le but est de positionner le pays en leader et catalyseur de l’innovation numérique sur le continent.
Ces dernières années, le Sénégal s’est imposé comme l’une des places fortes du numérique en Afrique de l’Ouest. A l’indice d’adoption des TIC, il affiche un score de 69,3, supérieur à la moyenne africaine qui s’est établie à 50,3. De plus, dans le rapport « E-Government Survey 2024 Accelerating Digital Transformation for Sustainable Development » des Nations unies paru en septembre dernier, le Sénégal figure parmi les 19 champions africains à l’indice de développement de l’administration en ligne (EGDI).
Ce score élevé à cet indice est notamment porté par un indicateur : l’indice de l’infrastructure des télécommunications (0,7328 sur 1). Il permet d’apprécier la capacité des infrastructures technologiques d’un pays à soutenir des services numériques modernes et une connectivité de qualité. Avec ces scores, le pays peut se targuer d’être l’une des plaques tournantes du numérique dans la sous-région ouest-africaine.
Est-ce un colosse aux pieds d’argile ?
Avec des systèmes de cyberdéfenses loin des meilleurs du segment, le pays est exposé aux cyberattaques. Le 26 mai 2023, les sites de la présidence et ceux utilisant le domaine gouv.sn ont été paralysés par une attaque par déni de service, a indiqué Abdou Karim Fofana, le porte-parole du gouvernement sénégalais d’alors. Bien que ce type d’attaque ne soit pas destiné à dérober des informations, il a le mérite de mettre hors service ses cibles. Dès le lendemain, tout est revenu à la normale, mais cet incident a mis en évidence la vulnérabilité des systèmes publics sénégalais, un enjeu majeur dans un contexte où les attaques cybernétiques en Afrique augmentent de manière exponentielle.
Dans un rapport publié en octobre 2023, le cabinet kényan Serianu a estimé les pertes liées aux cybercrimes en Afrique à 10 milliards $ sur l’année 2022. Selon la dernière édition du rapport Security Navigator 2024 d’Orange Cyberdefense, les pertes dues aux cyberattaques en Afrique sont estimées à environ 10% du PIB du continent.
Le New Deal technologique comme solution
L’ensemble des actions basées sur ce document de stratégie repose sur quatre piliers dont l’un est la mise en place d’infrastructures pour une souveraineté technologique. C’est dans cette dynamique que le gouvernement sénégalais s’est associé à l’américain Google pour la mise en place d’un cloud souverain. Cette décision amorce cette nouvelle ère puisque quelques semaines plus tard, les autorités ont inauguré le Programme de digitalisation de l’administration publique (PRODAP).
Pourtant, ces décisions ne s’inscrivent pas dans le cadre du renforcement de la position du Sénégal en matière de cybersécurité. A l’indice de cybersécurité de l’UIT, le Sénégal a obtenu de mauvais scores au niveau des mesures organisationnelles (9,06 sur 20) et du renforcement des capacités (9,31 sur 20). Il faudrait songer à mettre en place des plans d’action nationaux pour renforcer les capacités, des programmes de formation et d’éducation en cybersécurité, ou encore des initiatives pour améliorer les compétences techniques et organisationnelles des parties prenantes.
En ce qui concerne les mesures techniques, les mesures légales et la coopération régionale et internationale, les autres composantes de l’indice, le pays s’en sort plutôt bien. Il a respectivement affiché des scores de 14,41, 15,56 et 18,83 sur 20.
Adoni Conrad Quenum
(Source : Agence Econfin, 20 novembre 2024)