Controversé, le décret portant contrôle et taxation des appels téléphoniques internationaux l’a été jusqu’au bout. On se rappelle, au début, la levée de bouclier de la part des opérateurs téléphoniques, notamment la Sonatel qui avait saisi l’Autorité de régulation des marchés publics pour dénoncer un « gré-à-gré » dans le contrat de partenariat liant l’Agence de régulation des télécommunications et des postes (Artp) et Global voice group S.a, chargé de contrôler et de taxer les appels internationaux entrants.
Le Comité de règlement des différends (Crd) de l’Armp avait accédé à la demande de la Sonatel, en ordonnant l’annulation du contrat, dans sa décision n° 127/10 du 15 septembre 2010.
Le président d’alors, Me Abdoulaye Wade, décide de suspendre certaines dispositions du texte, avant de remettre l’affaire sur la table, en août 2011, tout en annonçant des pertes pour l’Etat de l’ordre de 60 milliards de francs Cfa durant la période de suspension. Me Wade émettait même l’idée de voir l’Etat racheter les parts de France Telecom dans la Sonatel.
Pour la société de télécommunication, la taxation des appels internationaux entrant au Sénégal est synonyme de manque à gagner à coup de milliards de francs Cfa mais aussi de hausse des tarifs à partir de l’extérieur, au grand dam des émigrés sénégalais. Le trafic téléphonique baissait à l’arrivée de 8,5 % soit 82,2 millions de minutes de moins qu’en 2009, selon un rapport.
Gabriel Fal de Cgf Bourse, qui s’occupe du titre Sonatel à la Bourse régionale des valeurs mobilières (Brvm), mettait les contreperformances de l’action de l’entreprise, entre autres causes, sur le compte de ce bras de fer avec l’Etat.
Le titre Sonatel Sn a reculé de janvier à septembre 2011 à la Brvm. « Nous estimons l’impact direct de la nouvelle taxation à environ 25 milliards de francs Cfa sur la marge brute de la Sonatel.
L’impact indirect lié à la chute du volume des appels entrants et à la réciprocité que la plupart des opérateurs étrangers ne manqueront pas d’appliquer à la Sonatel est estimé à environ 25 milliards de francs Cfa aussi, soit en tout un manque à gagner d’une cinquantaine de milliards de francs Cfa, en année pleine », déclarait M. Fal dans les colonnes du quotidien Le Soleil, en décembre 2011.
Hier, le directeur général de la Sonatel avait estimé les pertes à 35 milliards de francs Cfa (lire par ailleurs). Le syndicat des travailleurs de la Sonatel avait fait une union sacrée avec l’entreprise et s’était mobilisé pour mener la bataille contre l’Etat, jusqu’à l’heureux épilogue d’hier.
Malick Ciss
(Source :Le Soleil, 7 mai 2012)