Bokhol (Dagana) - un village à l’heure des technologies de l’information et de la communication
vendredi 23 février 2007
Malgré les nombreuses difficultés qu’il rencontre (voir notre édition d’hier), le village de Bokhol peut se glorifier d’avoir été doté d’un centre multimédia communautaire (Cmc) dont une radio communautaire, grâce aux actions combinées de l’Agence suisse pour le développement et la coopération et de l’Unesco dans le cadre de son programme d’implantation à grande échelle de centres multimédias communautaires (Cmc).
Ces centres multimédias communautaires participent à la réduction de la « fracture numérique » et mettent les technologies de l’information et de la communication au service du développement des communautés marginalisées. Une belle originalité, d’ailleurs, saluée ici par la directrice de la radio, une dame de plus de 50 ans, Ndèye Arame Sarr, qui affirme que ces centres multimédias constituent une plate-forme unique, intégrant la radio et un centre d’accès communautaire : le télécentre, le centre de ressources, le cyber-espace.
Les communautés de Bokhol, surtout les jeunes, ont là une occasion unique pour se familiariser avec les technologies de l’information et de la communication (Tic). Et la nouvelle structure fait déjà la fierté des populations du village. Elles s’estiment heureuses et demandent même que la tranche horaire réservée à la diffusion des émissions de la radio soit augmentée. Celle-ci est baptisée « Sédor Fm » et émet quotidiennement sur la 92.0 FM pendant 5 heures : 2 heures le matin (de 8h à 10h) et 3h le soir (de 18h à 21h). « C’est pas suffisant pour nous » lance un gérant de télécentre du village. Khalifa Guèye, enseignant, gestionnaire du centre multimédia et gérant du cyber, nous dit que les membres du conseil de gestion ont pris bonne note de cette demande et vont l’étudier. La radio communautaire a un impact important. « Et il est de développement sur plusieurs dimensions », estime Khalifa Guèye. Ses animateurs, bien qu’étant des bénévoles, travaillent sur différents domaines, notamment la santé, l’éducation, la culture, l’environnement. Il y a également des émissions consacrées aux jeunes et aux femmes, qui sont axées sur les questions de développement.
« C’est pour cette raison que les populations émettent cette demande d’augmenter la tranche horaire », ajoute Khalifa Guèye. Mais, le fonctionnement n’est pas sans difficultés, même si la radio bénéficie déjà d’une bonne appréciation. La directrice, Ndèye Arame Sarr, évoque le manque de matériels de reportage, car souvent ils sont obligés d’aller sur le terrain pour des enregistrements d’émissions. Les animateurs n’étant que des « intermédiaires » entre la radio et les populations, des spécialistes sont souvent sollicités pour des interventions.
« En fait, nous n’avons que des échantillons de matériel en quelque sorte », souligne la directrice. Le technicien de service, Babacar Mbengue, explique qu’à chaque fois qu’une émission passe, il n’y a plus de possibilité de faire des enregistrements. L’émetteur aussi n’est pas protégé par manque de régulateur et est exposé aux incessantes coupures de courant dans la zone. « Nous n’avons même pas de groupe électrogène », se désole-t-il.
Le cyber n’est pas encore connecté au réseau Adsl, même s’il dispose de quatre ordinateurs, le cinquième servant de serveur. La promesse est venue de la Sonatel, selon Khalifa Guèye. Mais il faut reconnaître que celle-ci « semble impuissante face au réseau de Mauritel qui couvre toute la zone ». Le réseau portable est toujours hors ligne dès qu’on accède à ces localités, qui longent le fleuve Sénégal et à proximité de la Mauritanie. « Il y a toujours des problèmes d’interférence. Les communications téléphoniques posent problème à Bokhol. Il y a un travail à faire ici », estime Khalifa Guèye.
Mohamadou Sagne
(Source : Le Soleil, le 23 Février 2007)