Attribution de nouvelles fréquences télé : Mactar Sylla parle d’une nébuleuse
vendredi 4 août 2006
D’aucuns ont applaudi lorsque l’Etat a décidé de mettre fin au monopole dans l’espace audiovisuel. Avec la création effective ou programmée de nouvelles chaînes télé, le Sénégal est en passe de franchir un pas important vers la démocratisation de l’espace audiovisuel. Mais si une telle mesure vient à point nommé, l’ex-directeur général de la Rts, Mactar Sylla, considère que l’Etat n’y met pas la forme.
Alors que dans des pays africains comme le Mali ou le Cameroun, la question de la libéralisation de l’espace audiovisuelle est un débat dépassé, le Sénégal s’ingénie à passer le cap des balbutiements. L’avènement de Canal Info et celui annoncé d’autres chaînes télé témoignent de la volonté de l’Etat de casser le monopole. Cependant, la deuxième étape de ce processus de libéralisation fait grincer des dents. ‘C’est le non respect du cadre juridique et des règles élémentaires régissant l’attribution des chaînes’ qui posent problème à l’ex-directeur général de la Rts Mactar Sylla. ‘J’avais fait office de candidature pour l’exploitation d’une fréquence télé en octobre 2005. J’avais envoyé dans ce sens une correspondance au président de la République pour le lui annoncer et m’enquérir des conditions et formalités à remplir conformément aux lois et règlements nationaux’, fait savoir l’actuel directeur des chaînes télé de la Stv Groupe au Cameroun. ‘Cette correspondance n’a pas eu de suite et je ne comprends pas que, dans un pays organisé comme le Sénégal, on puisse délivrer des licences d’exploitation sans que cela n’ait fait l’objet d’une offre publique’, sans que ‘les règles élémentaires de transparence et de bonne gouvernance ne soient respectées’.
Ces règles qui marquent le souci d’une rationalisation de chaque paysage audiovisuel national, se fondent, de l’avis de Mactar Sylla, sur des principes institutionnels et des objectifs fondamentaux. Or les fréquences déjà attribuées se sont faites en violation, par l’Etat du Sénégal, des textes et de la liberté d’informer.
Ce qui choque le directeur de la Stv Groupe, c’est également la quasi absence dans ce débat sur la libéralisation, de l’Agence de régulation des télécommunications (Art) qui est vidée, selon l’ex-patron de la Rts, de son sens. Et, ajoute-t-il, ‘l’institution au niveau de chaque pays d’une autorité indépendante de régulation à compétences élargies qui veille à l’application des textes, à l’égalité de traitement et à la non discrimination est partie de ces principes fondamentaux’, note Mactar Sylla. En outre, il attire l’attention de l’Etat sur la nécessité de se conformer aux textes, non sans rappeler à l’ordre ceux qui seraient tentés de faire de l’attribution de ces fréquences une affaire de clan. ‘Les fréquences audiovisuelles sont des ressources nationales au même titre que toutes autres ressources dont la concession doit répondre, souligne-t-il, à un certain nombre de principes et règles’. Ces principes, selon Mactar Sylla, fondent les caractéristiques de l’Etat de droit, en termes d’égal accès aux services et traitement des citoyens, du respect de la liberté d’entreprendre, des principes de neutralité et de non discrimination.
Maïmouna Ndour FAYE
(Source : Wal Fadjri, 4 août 2006)