8,2 milliards de FCfa dans des transactions immobilières opaques
jeudi 31 mai 2012
Un montant de 8,2 milliards de francs Cfa a été versé par l’Artp pour l’acquisition de deux immeubles dans des conditions opaques. L’autorité somme l’homme d’affaires Papa Cheikh Amadou Amar de rembourser cet argent.
L’Artp a envoyé une mise en demeure à l’homme d’affaires Papa Cheikh Amadou Amar pour lui demander le remboursement d’un montant global de 8,2 milliards de francs Cfa représentant le prix de l’acquisition de deux immeubles que, respectivement, Touba Real Estate et Amar Holding devaient vendre à l’Artp.
A la base de l’acquisition du premier immeuble, il y a le décret 2011-648 du 23 mai 2011, portant affectation de ressources financières issues de la vente de licence par l’Etat, qui met à la disposition de l’Artp les 3,5 milliards de francs Cfa provenant de l’extension de la licence de la Sonatel à l’exploitation des services du 3G.
Achat d’un immeuble qui n’existait pas encore
Selon l’actuel directeur de l’Artp, cet argent a servi à acquérir, auprès du promoteur Touba Real Estate, ledit immeuble qui « n’existait même pas encore de manière virtuelle ».
C’est-à-dire, les plans n’étaient même pas encore arrêtés. Le terrain sur lequel devrait être bâti l’immeuble fait partie du domaine mis à la disposition du promoteur par l’Etat à Ouakam Aéroport, précise Thierno Alassane Sall.
Tandis qu’à la même date, l’Artp disposait déjà d’un immeuble acquis auprès d’Amsa Assurance au motif de lui servir de siège social. Toujours est-il qu’à la suite du décret du 23 mai 2011, l’Artp verse, « directement et hors de la comptabilité du notaire », une avance de 2 milliards de Fcfa au promoteur.
C’est seulement après, « pour mettre la forme », que les deux parties se sont attaché les services d’un notaire. En clair, à la date du 26 septembre 2011, l’Artp a déjà versé le montant intégral représentant le prix d’acquisition de l’immeuble sans que la première pierre soit posée.
Pour le directeur de l’Artp, pour qu’une telle opération soit possible, des personnes ont certifié que les travaux avançaient selon le planning prévu « alors qu’il n’en n’était rien ».
Ce qui laisse supposer des complicités au sein de l’Artp. Mais sur ce point, il se garde de mettre le personnel entièrement en cause. « Peu de personnes (7 sur les 120 que compte la structure) étaient au courant de ces transactions douteuses », dit-il.
Autre anachronisme, le caractère « dérisoire des pénalités de retard prévues par les deux parties (10.000 francs Cfa par jour pour un immeuble de 2000 m2 répartis en quatre étages).
De même, ajoute M. Sall, « l’acte de vente de ce premier immeuble n’a jamais été authentifié ». Donc, sans être dûment enregistré, la somme de 595,56 millions de francs Cfa n’a jamais été versée par l’Artp, explique M. Sall.
Plus surprenant, à son avis, « pendant que le premier immeuble était presque entièrement soldé sans qu’une pierre ne sorte de terre, l’Artp contracte avec Papa Cheikh Amadou Amar pour l’acquisition, sur le même site, d’un second immeuble, sur fonds propres ».
Là aussi, 2 milliards de francs Cfa ont été versés en dehors de la comptabilité du notaire : un premier virement de 1,5 milliard de francs Cfa le 28 juillet 2011, suivi d’autres versements sans le couvert d’un notaire, précise le directeur de l’Artp.
Selon lui, le décret n° 2011-648 du 23 mai 2011, par sa singularité, est à l’origine de toutes ces transactions opaques. Ainsi il (le décret) affecte directement des ressources publiques à l’Artp sans que la représentation nationale n’en soit informée alors que l’Artp disposait d’un immeuble à l’époque et, « de toute évidence », elle avait les ressources pour financer cette opération si besoin en était. Sans compter que la partie contractante était nommément désignée dans le décret.
Seydou ka
(Source : Le Soleil, 31 mai 2012)
Cheikh Amar, homme d’affaires : « Je suis prêt à leur retourner l’argent »
Papa Cheikh Amadou Amar a affirmé que l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (Artp) ne lui a pas encore payé intégralement le prix pour l’acquisition d’un immeuble, précisant toutefois qu’il peut restituer l’argent qu’il a déjà reçu. « Je n’ai pas l’habitude de m’épancher dans la presse (...). Maintenant, c’est trop, c’est trop (…). L’immeuble est en cours de construction et puis, elle ne m’a pas payé intégralement mon argent », a déclaré l’homme d’affaires, sur la Rfm (privée), en wolof. « Ces membres ne m’ont pas payé cash. L’immeuble est en cours de construction, c’est visible. Il y a 10.000 mètres carrés de surface. Il faut le diviser pour pouvoir faire l’évaluation. Ils ont exercé une pression sur moi pour que je leur vende l’immeuble. C’est passé en Conseil de surveillance (…) », a dit M. Amar. « Je suis un vendeur, je n’ai de problème avec personne (…). L’immeuble est là, je peux leur retourner leur argent, mais ils vont payer des pénalités parce que plus de 10 personnes m’ont contacté pour que je leur vende l’immeuble », a-t-il poursuivi.
(Aps)