4ème conférence du CODESRIA sur l’édition numérique : Le « savoir », maitre-mot pour un continent émergent
jeudi 31 mars 2016
Officiellement ouverte dans la matinée d’hier, mercredi 30 mars à Dakar, la 4ème conférence du Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique (Codesria), sur l’édition numérique, a permis de faire le point sur un certain nombre de défis qui interpellent l’Afrique : le libre accès à un savoir « déprivatisé », sans la contrainte des « barrières financières », pour les étudiants comme pour les chercheurs eux-mêmes, la visibilité des publications de chercheurs africains etc.
La cérémonie d’ouverture officielle de la 4ème conférence du Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique (Codesria) s’est tenue dans la matinée d’hier, mercredi 29 mars dans un hôtel de la place, autour du « mouvement pour le libre accès et l’avenir de l’économie africaine du savoir ».
D’éminents savants, chercheurs et professeurs d’Afrique et d’ailleurs ont honoré cette session de par leur présence, entre partages et échanges pour disent-ils, le « libre accès » au savoir, pièce maitresse du développement d’un pays.
Ce qui passe selon eux par la promotion des nouvelles technologies, pour faciliter à la masse l’accès aux publications et autres résultats de recherches des universitaires africains.
Professeur à l’université nigériane d’Ibadan, M. Ebert reviendra d’ailleurs sur les acquis de son pays en matière de formation d’universitaires et d’accompagnement dans la recherche car dit-il, « les étudiants apportent beaucoup de choses à la recherche », et il faudrait donc leur faciliter l’accès aux différentes publications.
L’enjeu, selon les spécialistes, consiste surtout à « déprivatiser le savoir » pour que tout le monde y ait accès, en plus de faire en sorte que l’on puisse utiliser « un article, le citer sans barrières financières », avoir accès aux journaux numériques entre autres.
Mais c’est aussi important que d’autres savants aient accès aux revues africaines, ne serait-ce que pour une bonne visibilité de ce que font les uns et les autres.
D’où la « Revue des pairs » pour améliorer les choses, à l’image de ce qui se fait en Amérique et un peu partout dans le monde, et de façon à ce que « les référentiels soient en phase avec les normes universelles ».
Ce « trou béant entre l’Amérique et l’Afrique »...
Pour le recteur de l’université du Cameroun M. Thimbeu, « les pays qui ont le plus de savoir sont les plus développés ».
Il ajoute aussi que cette fracture ou « ce trou béant entre l’Amérique et l’Afrique est une rupture dans le domaine du savoir ». Ce qui implique selon lui la « diffusion des innovations du savoir », parce que la plupart des pays africains « ont un programme d’émergence ».
L’heure est à l’investissement dans le savoir, l’Afrique doit impérativement bâtir une économie du savoir pour « émerger », d’abord « produire », ensuite « diffuser via le libre accès », sans oublier l’ « appropriation » du savoir par les masses et enfin la « gestion » de la connaissance...
Même si les conditions d’accès ne sont pas toujours réunies selon le secrétaire exécutif du Codesria, Ibrahima Sall, qui pointe du doigt l’accès difficile à l’information scientifique, parce que la « privatisation » du savoir a atteint son summum ».
Pour avoir accès aux meilleures revues, il faut souvent avoir assez d’argent pour pouvoir « s’abonner », ce que le Codesria a très tôt compris, en faisant en sorte que le « savoir reste un domaine public » quand on sait que les recherches sont financées par l’argent public.
C’est dans cette même logique qu’interviendra le directeur de Cabinet du ministère de la Culture et de la Communication, Rémi Sagna, qui soutient qu’à ce grand rendez-vous les « défis ne manquent pas », et qu’il faudrait surtout que les acteurs du secteur puissent se retrouver autour d’une même table, parce qu’il y a de « brillantes publications à promouvoir dans le monde entier », et cette « conférence est une parfaite illustration de ce qui peut être fait ».
Rémi Sagna invitera aussi les chercheurs à poursuivre la recherche, parce que leurs réflexions pertinentes « permettront d’éclairer les décideurs politiques que nous sommes », pour que l’engagement des gouvernants se traduise « en actes concrets ».
Cependant les différents conférenciers ont partagé le fait que la « prudence s’impose par rapport à l’euphorie du libre accès » : « La connaissance est libre mais elle n’est pas accessible », ce qui est un paradoxe, sans oublier que la création de recherches doit être protégée.
La 4ème conférence du Codesria, qui se poursuit jusqu’à ce vendredi 1er avril, rassemble donc des chercheurs venus des pays d’Afrique, d’Asie, d’Europe et d’Amérique.
Sophia Diouf
(Source : Sud Quotidien, 31 mars 2016)