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Propos de Makhtar Diop Vice-président de la Banque mondiale pour les Infrastructures

mercredi 5 juin 2019

Sept mois après sa nomination à la tête du département des Infrastructures, Makhtar Diop fait de la grande initiative Digital Transformation for Africa un des axes majeurs de l’action de cette institution. Ce qui signifie un basculement complet dans l’univers du numérique.

Entretien avec Hichem Ben Yaïche, envoyé spécial aux Spring Meetings de la Banque mondiale, Washington

Comment l’adaptation s’est-elle opérée pour vous, en passant de l’Afrique à ce département global de la Banque mondiale ?

Sans trop de difficultés, car une grande partie du portefeuille de la région Afrique, comme vous le savez, porte déjà sur les infrastructures. Nous savons tous depuis longtemps que le déficit des infrastructures sur le continent est une des contraintes essentielles. C’est la raison pour laquelle la Banque mondiale a beaucoup investi dans les programmes régionaux dont une grande partie porte sur les transports tels que les corridors routiers, ou l’énergie comme le West African Power Pool. Dans chaque pays, les pouvoirs nationaux sont articulés autour de la question des infrastructures.

Il était donc naturel que je m’occupe particulièrement de ces questions en tant que vice-président régional. Par ailleurs, lors de ma carrière, j’avais occupé les fonctions de directeur de ce qu’on appelait le FPSI (Financement, développement du secteur privé et infrastructures) pour l’Amérique latine. C’est un secteur qui m’est donc familier. J’ai d’ailleurs gardé dans mon équipe actuelle de nombreux membres qui travaillaient avec moi à cette époque.

Le programme Digital Transformation for Africa représente un changement de logiciel sur un enjeu majeur. Comment s’est opérée, en coulisses, la préparation de ce basculement ?

Nous vivons aujourd’hui la quatrième révolution industrielle. Très vite, nous avons compris que les développements que nous avons connus en Afrique – je pense à des innovations telles que M-Pesa – pouvaient vraiment développer les économies du continent. Nous avons assisté à une croissance énorme… Clairement, l’exemple le plus évident où l’Afrique a fait un bond en avant dans le numérique est l’argent mobile. Il est le moteur de l’inclusion financière en Afrique où le nombre de comptes a doublé pour atteindre 21 % entre 2014 et 2017. En parallèle, les besoins sont grandissants. L’accès à Internet reste une chimère pour la plupart des habitants du continent, dont seulement 22 % sont connectés selon les chiffres de 2017.

Vous basez votre démarche sur des études précises ?

Oui, les études existent. Si l’on compare l’Afrique à d’autres marchés numériques, le continent dans son ensemble ne va pas assez vite. Sur les 25 pays les moins connectés au monde, 20 se trouvent en Afrique. Cependant, même si nous avons commencé très bas, je peux vous dire que l’Afrique est sur la bonne voie et que nous redoublerons d’efforts pour réduire ce fossé entre l’Afrique et les autres continents. De plus, les services numériques ont permis de rapprocher les services des citoyens, par exemple pour payer leurs taxes. L’une de mes premières expériences – lorsque j’étais ministre, il y a près de vingt ans – a été la numérisation des passeports. À l’époque, la diaspora sénégalaise devait se rendre au pays pour en obtenir la délivrance. Aujourd’hui, cela se règle en 24 heures de n’importe où. Nous avons également amélioré les procédures douanières pour le secteur privé.

L’Afrique s’est-elle préparée à cette étape majeure ? C’est une révolution culturelle, une transformation en profondeur qui nécessite beaucoup d’investissements et suppose l’implication de tous les secteurs de l’économie et de la société…

Oui, bien sûr, l’Afrique s’est préparée. Le secteur privé est prêt, et d’ailleurs, beaucoup de choses se passent déjà – Jumia vient de passer à la cotation à Wall Street – ce qui nous montre que le marché international des capitaux reconnaît l’importance du secteur privé africain et sa transparence. On n’accède pas à la Bourse des capitaux sans un certain niveau de transparence et de viabilité financière ! Les entreprises privées sont dynamiques mais il reste beaucoup à faire. Avec une population de plus de 1,2 milliard d’habitants, l’Afrique ne compte que trois « licornes », ces sociétés privées dont la valeur est estimée à plus d’un milliard de dollars. La transformation numérique en Afrique est un objectif qui nécessitera un engagement résolu en faveur des réformes et une augmentation considérable des investissements dans les infrastructures. Et il faudra exploiter l’investissement privé et l’expertise du secteur privé.

Comment articuler cette démarche – celle de basculer dans le digital – avec vos partenaires (UA et autres), et surtout, pour être dans l’opérationnalisation, la traduction en actes, qui est l’étape la plus importante ?

Il est très important de rappeler que cette grande initiative de transformation numérique en Afrique, que nous poussons, vient des pays africains. Amani Abou-Zeid qui occupe actuellement les fonctions de Commissaire pour le numérique et l’énergie de l’Union africaine, en a donné la vision que les chefs d’État appuient, depuis deux ans. Le sommet Transform Africa, qui regroupe les acteurs du secteur, est aussi une rencontre importante. Cette grande initiative présente un caractère fédérateur des actions publiques : les gouvernements et les régulateurs vont devoir travailler ensemble et regarder les meilleures pratiques internationales pour les appliquer à nos pays. Nous devons libérer les capacités du secteur privé national et international.

Cela suppose des capitaux.

Bien entendu ! Nous n’ignorons pas cette question. Nos collègues de la IFC (Société financière internationale) travaillent aujourd’hui sur plusieurs objectifs, notamment sur la prise de participation dans certaines entreprises du secteur numérique, à travers la mise à disposition de lignes de crédit. Nous-mêmes y travaillons.

De son côté, le secteur privé international porte un intérêt accru sur le numérique en Afrique.

Comment éviter la fracture numérique dans une Afrique inégalement développée ? De nombreuses « zones d’ombre » demeurent sur le continent.

Cette question a été évoquée lors des discussions qui ont accompagné l’initiative de Transformation numérique. Nous devons réduire la fracture spatiale – les inégalités entre les régions – et la fracture du genre. Les femmes ne doivent pas être laissées pour compte. Nous devons travailler à ces deux sujets de manière claire et convergente, de manière à ce que chacun puisse participer à cet effort. Pour cela, nous devons poursuivre nos initiatives et les accélérer. Pour ce qui est des moyens, nous avons publié récemment un rapport sur les différents modèles d’extension de la fibre optique.

Le dark fiber – la fibre noire – constitue l’un des plus simples et des plus immédiats de ces moyens : les entreprises publiques d’électricité utilisent souvent la fibre optique, dans laquelle les gouvernements ont investi, pour la gestion de leurs réseaux, mais elles ne l’utilisent pas à 100 % de sa capacité qui excède leurs besoins.

Nous souhaitons examiner avec les gouvernements la possibilité pour le secteur privé d’utiliser cet excédent. Sur la côte Est, un câble sous-marin a été installé. L’Égypte, qui vient de prendre la présidence de l’UA, constitue, à cet égard un hub intéressant : dix-sept lignes de câbles sous-marins convergent vers ce pays, qui a récemment signé des contrats avec des partenaires privés pour l’installation de lignes de fibre terrestres reliant le continent. Un contrat similaire est en vue, pour relier l’Égypte au Sénégal.

Tout cela devrait permettre d’aider les pays les plus pauvres, qui sont souvent enclavés, à accéder à la fibre optique. Il faut également augmenter la capacité à l’intérieur de ces pays, et c’est précisément ce que prévoit notre grande initiative en matière d’infrastructures, afin de financer d’autres lignes de fibre : lorsqu’une route est construite, il est systématiquement prévu de doubler son tracé d’une ligne de fibre optique, ce qui permet de ne pas avoir à procéder deux fois à des travaux de terrassement.

Nous allons également utiliser des initiatives régionales comme celle de la Corne de l’Afrique, qui fait actuellement l’objet de discussions avec les gouvernements, autour du lac Tchad, du Sahel, afin que les pays de cette région, qui sont fragiles, puissent bénéficier de l’accès à la fibre optique et à Internet, et à terme, de la création d’emplois et d’une amélioration des services rendus aux populations.

Comment l’Afrique peut-elle réussir à relever ce défi de masse de la révolution numérique ?

Des progrès énormes ont été réalisés. Les problèmes de production d’électricité que j’avais constatés dans la région, en 2012, sont aujourd’hui résolus, pour l’essentiel. Nous rencontrons surtout des problèmes de distribution. Les coupures de courant sont le plus souvent dues à la vétusté du réseau de distribution, même dans les zones où il y a de l’électricité. Ce réseau manque de capillarité, et sa qualité laisse à désirer à cause de la situation financière difficile dans laquelle se trouvent les entreprises de distribution, ce qui les empêche d’investir dans la maintenance. Nous avons achevé récemment une étude sur la question des infrastructures en général – pas seulement sur l’électricité – qui révèle que pour un dollar dépensé dans l’investissement, un dollar doit être affecté à la maintenance.

Vous touchez du doigt le point faible de l’Afrique…

Tant que ce dollar ne sera pas affecté à la maintenance, nous serons condamnés à dépenser cinq dollars pour réinvestir à nouveau dans les infrastructures. Le défaut de maintenance génère un coût énorme ! C’est un défi important pour les prochaines années : nous avons une croissance importante des infrastructures sur le continent, mais il est maintenant indispensable de veiller à ce qu’elles soient maintenues afin que l’existant ne se dégrade pas comme on l’a vu dans certains pays.

En matière d’intégration continentale, il s’agit de travailler de manière concertée autour des grandes régions africaines, pour ensuite monter en puissance. La Zone de libre-échange continentale répond-elle à cette exigence ?

Je sais que l’UA et les organisations économiques régionales sont aujourd’hui en train de travailler pour établir entre elles une bonne jonction et une bonne interface, afin de mener à bien ce programme continental. Lors d’une réunion, au printemps, les priorités m’ont été clarifiées par le président de la Cedeao, sur le tracé des corridors routiers Abidjan-Lagos et Abidjan-Praia, via Dakar – dont une partie maritime entre Dakar et Praia – qui ont été adoptés en partie par les chefs d’État de la Cedeao. D’ailleurs, le traité inter-États qui devrait permettre la construction du tronçon Abidjan-Lagos est déjà signé. Le grand programme PIDA est une autre priorité. Les choses avancent.

Nous assistons à l’éclosion d’un nouveau terme, « le dividende numérique ». Pensez-vous que l’Afrique connaît une croissance qui permettrait d’atteindre un seuil satisfaisant en matière de développement et de bien-être des populations ?

C’est une réalité ! La question ne se pose même pas. Les populations ont su faire un bon usage de la téléphonie mobile dès qu’elles y ont eu accès, avec un impact fort sur la création de services au niveau des quartiers, des télécentres, etc. L’accès à l’Internet a été source de création de business, comme la livraison à domicile qui se développe dans certaines villes d’Afrique, lesquelles disposent d’une version africaine d’Amazon. Rien de cela n’aurait été possible sans le numérique.

Dans certains pays comme le Nigeria, les paysans ont accès, par leur téléphone, aux informations sur les prix des matières premières, et peuvent recevoir des paiements. Autre aspect important, l’investissement dans les ressources humaines – c’est la clé de tout ! – revêt plusieurs dimensions. La première porte sur les compétences de base et les fondamentaux. La seconde partie est constituée des emplois qui pourraient être créés avec des capacités techniques pas trop élevées, telles que le basic coding.

Des programmes ont été lancés pour former rapidement des milliers de codeurs en Afrique. Ce sont des types de formation qui n’exigent pas d’études supérieures trop élevées et qui peuvent toucher un nombre important de personnes. Il y a aussi des métiers plus avancés qui exigent une formation supérieure.

L’idée serait de recentrer l’enseignement supérieur vers ce que la révolution numérique impose, ce qu’on appelle le big data, l’intelligence artificielle, le machine learning… Nos universités doivent offrir de plus en plus des formations dans les métiers de l’informatique, car ce sont les métiers d’aujourd’hui. Tout cela devrait permettre de développer des solutions adaptées pour aider les pays africains à améliorer les services, mais aussi pour leur donner l’opportunité d’exporter certains de leurs savoirs.

Un ministre kenyan me citait l’exemple du football américain qui se base à de nombreux égards sur les statistiques, pour aider les coachs à définir la bonne stratégie. Aujourd’hui, au Kenya, des équipes visionnent les matchs, dressent des statistiques sur le nombre de passes, et les envoient aux États-Unis. Des emplois sont ainsi créés.

Les techniques de reconnaissance faciale peuvent aussi être une source d’emploi, car de nombreuses images, encore aujourd’hui, doivent être validéees par l’être humain. Sur l’Internet, on vous demande souvent de reconnaître ce que représente une image, une maison, un chien… Sans le savoir, vous travaillez pour ces entreprises car vous les aider à affiner. Aujourd’hui, toute une industrie est en train de se développer. C’est un travail qui n’exige pas beaucoup de qualification et qui grâce à l’Internet, offrirait des emplois à de nombreux Africains.

Pour ne pas être à la traîne, l’Afrique doit se positionner dans du haut de gamme, en matière d’innovations et de contenus. À quelle échéance pourrait-elle atteindre cet objectif majeur ?

Nous dépensons de l’argent dans notre système d’enseignement supérieur, qui doit absolument se centrer sur les nouvelles technologies. Pour un nombre important de personnes, il s’agira de donner une formation numérique de base. Mais les ressources que nous possédons dans l’enseignement supérieur doivent être aussi investies dans des secteurs porteurs. Cela est possible et cela existe déjà, mais il faut redoubler d’efforts.

Aujourd’hui, seuls 22 % des étudiants sortant d’universités africaines ont un diplôme dans le domaine des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques. Ce n’est pas ainsi que nous réussirons la transformation structurelle de nos économies, qu’elles soient industrialisées ou non. D’ailleurs, dans le cadre d’une collaboration financée par la Banque mondiale à travers le projet du Grand Abidjan, une formation de master en Transports urbains va être délivrée en Afrique grâce à un partenariat inédit entre l’École nationale des ponts et chaussées de France et l’Institut national polytechnique Félix Houphouët-Boigny de Yamoussoukro.

Il ne s’agit plus d’envoyer les étudiants dans des universités étrangères, mais de construire sur le continent africain une formation d’enseignement supérieur – et de qualité – dispensée par et pour les Africains, afin de former la prochaine génération d’expertes et experts africains sur le sujet.

Nous devons former des ingénieurs en nombre suffisant. Tant que nous n’aurons pas atteint la masse critique, les quelques ingénieurs que nous formerons seront attirés par le monde extérieur.

L’intelligence artificielle pourrait aussi aider à résoudre les problèmes des pays africains, notamment dans le secteur de l’agriculture, dans celui de la gestion de l’eau et de l’amélioration des transports urbains. Toutes les grandes villes africaines sont confrontées au problème des embouteillages. Aujourd’hui, les nouvelles technologies, notamment le big data, permettent de développer des algorithmes qui améliorent la circulation routière et diminuent ainsi le temps de trajet des populations pour se rendre à leur travail.

Quel est le modèle d’inspiration pour l’Afrique ? Il y a des exemples tels que la Chine, l’Inde…

Je ne suis pas un grand fan des « modèles ». Nous pouvons regarder et nous inspirer de ce qui se fait de meilleur dans chaque pays. L’Inde n’a pas copié purement et simplement ce qui se passait dans la Silicon Valley, mais a développé un modèle spécifiquement indien. Singapour, qui a développé aussi son modèle, est un bon exemple, même si les échelles ne sont pas les mêmes.

Leur philosophie consiste précisément à rechercher ce qu’il y a de mieux un peu partout dans le monde et à l’adapter aux réalités du pays. Le terme « écosystème » est un mot-clé. Nous devons absorber les exemples étrangers en utilisant la culture de nos pays, nos institutions, le dynamisme de nos populations, pour créer quelque chose qui soit adapté à nos réalités, et qui puisse influer en retour sur le reste du monde. Je nourris l’espoir qu’un jour, un des modèles créés par l’Afrique, sera utilisé partout. C’est déjà le cas : aujourd’hui, les pays développés copient ce que fait M-Pesa au Kenya. Nous devons prendre confiance en nous-mêmes.

Comment concilier le développement de l’Afrique avec les crises et les conflits qui affectent le continent ?

Précisément, la technologie peut nous aider sur ce point. Les données dont nous disposons aujourd’hui sur l’accès à l’électricité, les services de base et le chômage des jeunes, permettent de prévoir, grâce à des algorithmes, les risques et les probabilités de conflit. Ce mode d’analyse se développe, s’affine, et devient chaque jour plus sophistiqué.

Cela ne permet pas, bien sûr, de tout prédire, mais de donner des indications sur les zones de fragilité. La technologie peut aussi prévenir ces conflits en apportant plus de services et en contribuant au développement des zones les plus défavorisées. Les conflits ne naissent pas d’une volonté de se battre, mais de mauvaises conditions de vie qui limitent les ressources de chacun et tuent l’espoir. Si vous augmentez la capacité de développement et d’acquisition de nouveaux revenus, vous contribuez à la stabilité.

L’argent reste toujours le nerf de la guerre. Comment la Banque mondiale se détermine-t-elle, à cet égard, face à ses partenaires du secteur privé qui constitue un élément clé ?

Le secteur privé n’est pas lié qu’aux nouvelles technologies, mais aussi aux infrastructures. Aujourd’hui, les rendements sur les investissements en Afrique sont beaucoup plus élevés que ce qu’un certain nombre d’investisseurs institutionnels reçoivent en retour de leurs investissements dans les pays de l’OCDE. La différence est qu’en Afrique, ils ont une incertitude sur le risque et l’instabilité de certains pays. De plus, les projets n’y sont pas toujours suffisamment préparés pour leur permettre d’investir.

Nous travaillons sur ces deux fronts, et je ne vous cache pas que beaucoup reste encore à faire. Notre plateforme Global Infrastructure Facility aide les pays à préparer leurs projets. Dans mon département, nous aidons aussi les pays à développer une capacité performante en matière de partenariats public-privé qui puissent générer des projets.

Enfin, notre travail dans les infrastructures, que ce soit dans l’énergie ou les transports, ne se limite pas à aider à la construction de routes, mais aussi à faire changer les politiques pour attirer le secteur privé. L’IFC présente un portefeuille d’investissements aux investisseurs privés afin qu’ils prennent des participations.

L’Afrique est un bon risque ?

Oui, bien sûr. Je ne crois pas qu’il y ait un meilleur endroit aujourd’hui, d’autant que les besoins sont énormes. Selon l’étude de Marianne Fay, Beyond the Gap, l’Afrique subsaharienne investit seulement 2,6 % de son PIB dans les infrastructures, loin des 4,1 % du PIB consacrés aux investissements en infrastructures dans les pays en développement. De plus, en Afrique, l’écart entre les besoins en investissement et les investissements réels atteint 3 % du PIB.

Je peux vous donner aussi quelques informations sur ce que nous faisons dans le reste du monde. Le plus grand portefeuille de la Banque porte aujourd’hui sur l’énergie et le transport, deux secteurs que je couvre et qui pèsent 38 % du portefeuille global. Dans mon département, nous couvrons aussi le financement des infrastructures, les garanties, et tout ce qui touche au numérique. Sachant que le numérique va prendre encore plus de volume…

À cet égard, je peux d’ores et déjà annoncer un investissement initial de 4,5 milliards de dollars pour une série de projets récemment approuvés ou déjà en cours en Afrique. Cela financera des opérations telles que : le financement de la politique de développement de l’inclusion financière et de l’économie numérique au Maroc (700 millions $) ; un projet d’identification régionale pour l’Afrique de l’Ouest (310 millions $) ; un programme sur les fondations numériques dans la Corne de l’Afrique (500 millions $).

Ce n’est donc pas un gadget…

Non, ce n’est pas un gadget. C’est essentiel. Aujourd’hui, dans les secteurs des transports et de l’énergie, le numérique est partout.

L’Afrique a un point de faiblesse important : l’appropriation de ses données. Comment peut-on admettre que ces données – le big data – soient entre les mains d’acteurs extérieurs à l’Afrique ?

Ce problème n’est pas spécifique à l’Afrique. Le monde entier est concerné. Nos données doivent-elles rester en Afrique ou être stockées dans des serveurs extérieurs ? Ce sont des questions complexes. Nous y réfléchissons et des discussions très pointues sur la localisation des données sont en cours.

Nous devons combiner la libre disposition de ces données dans les pays ainsi que dans le reste du monde. C’est un élément essentiel pour pouvoir converser, échanger et faire du e-commerce. Garder ces données pour soi ne mène pas très loin. Maintenant, ces échanges doivent être entrepris dans le cadre de ce qu’on appelait il y a quarante ans « informatique et libertés » et aujourd’hui data privacy.

Enfin, il y a une chose essentielle dont on ne parle pas assez : l’Afrique va poursuivre des efforts pour l’accès à Internet. Mais si nous ne travaillons pas en même temps sur la cyber-sécurité, nous risquons de rencontrer des difficultés sérieuses sur le continent. Certains pays connaissent déjà des attaques sur le système bancaire, ce qui représente un risque important de déstabilisation. Sans efforts sur la cyber-sécurité, nous demeurerons exposés à ce risque.

Avec la collaboration de Guillaume Weill-Raynal

Hichem Ben Yaïche

(Source : Le Magazine de l’Afrique, 5 juin 2019

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