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Vérification financière et administrative de l’IGE à l’ARTP en 2007 : Cas pratique de dérégulation

samedi 19 septembre 2009

Une mission de contrôle effectuée par des éléments de l’Inspection générale d’Etat (Ige) sur l’Agence de régulation des Télécommunications et Postes en 2007 a permis de révéler les différents maux dont souffre l’entité. Ils ont pour noms : absence de politique et de stratégies cohérentes, manque de clarté des règles et rôles, violation systématique du code des marchés, népotisme, gaspillage, tutelle presque inexistante ou pas clairement définie...

Au terme de leurs investigations en cours durant l’année 2007, portant sur la vérification financière et administrative de l’Agence de régulation des Télécommunications et Postes (ARTP), les inspecteurs généraux d’Etat, Mamadou Moustapha Tall, chef de mission, Falilou Diop et Mamadou Diop, ont dressé des conclusions accablantes contre ladite agence. En effet, compte tenu des fortes présomptions de détournements de deniers publics qui pèsent sur le Directeur général et les membres du Conseil de Régulation, les vérificateurs en sont arrivés à proposer l’ouverture d’une information judiciaire.

Un rapport complémentaire dit spécial a par ailleurs été rédigé et communiqué aux personnes concernées pour observations éventuelles. Sans occulter le fait que toutes leurs constatations ont fait l’objet de propositions de directives soumises à la très haute autorité du Président de la République. Parmi ces constatations on peut citer : les déclarations de retenue à la source qui n’ont été ni faites, ni déposées auprès des services fiscaux compétents. La retenue de 5% n’a pas non plus été systématiquement opérée sur les assujettis et reversée à l’Etat. Sans perdre de vue le fait que la taxe sur la valeur ajoutée (Tva) précomptée depuis 2004 n’a jamais été reversée. Il est aussi à remarquer que le régime fiscal de l’Artp dérogeant au droit commun fait perdre au Trésor public d’énormes ressources.

LE DG SOUS LE COUP DES DISPOSITIONS DU CODE DES MARCHES

En même temps, les investigations effectuées par le chef du centre des services fiscaux de Ngor-Almadies, à la demande des vérificateurs, ont démontré que le Directeur général, Daniel G. Goumalo Seck tombe sous le coup des dispositions du code général des impôts.

Au chapitre des droits simples dus, le total est évalué à quatre milliards trois cent huit millions seize mille neuf cent dix neuf francs (4 318 376 919 FCFA). Alors que les pénalités légales dues font trois milliards six cent vingt neuf millions cinq cent vingt et un mille cent quatre vingt douze francs (3 629 521 192 FCFA). Ce qui, cumulé, donne un total général de sept milliards neuf cent quarante millions huit cent quatre vingt dix huit mille cent onze francs (7 947 898 111 FCFA). Si l’on se réfère à l’article 1005 paragraphe un et alinéa deux de la loi n° 92-40 du 09 juillet 1992, modifié, portant Code général des impôts, il ressort que « sans préjudice des sanctions fiscales prévues au présent code, est passible d’une amende de 100 000 à 5 000 000 francs et d’un emprisonnement de deux à cinq ans, pour quiconque se soustrait frauduleusement ou tente de soustraire frauduleusement à l’établissement ou au paiement total ou partiel des impôts, droits et taxes prévus au présent code. Qu’il s’agisse de dissimulation ou de tout autre procédé frauduleux, notamment en ne reversant pas une taxe, un droit, un impôt retenu, facturé ou collecté ».

UNE GESTION FAITE DE GASPILLAGE, NEPOTISME, MALVERSATIONS...

Par ailleurs, concernant la situation budgétaire, financière et comptable, la gestion de l’agence est marquée par le gaspillage, le népotisme, les conflits d’intérêts et les malversations financières facilitées par une violation systématique du Code des marchés publics et du Code général des impôts. Sur un autre plan, à la fin de leurs investigations, les vérificateurs ont constaté que les membres du Conseil de Régulation et le Directeur général se sont partagés, sans base légale ou réglementaire, la somme d’un milliard six cent millions de francs (1 600 000 000 FCFA) censée provenir de la contrepartie financière versée à l’Etat suite à l’attribution de la licence globale à la Société de droit soudanais, dénommée Sudan telecom company Ltd (Sudatel).

Or, le décret 2008-222 du 05 mars 2008, fixant le pourcentage à accorder à l’Agence de Régulation des Télécommunications et des Postes dispose en son article 2 : « la somme équivalente au pourcentage fixé à l’article premier (2%) est virée dans les comptes de l’Artp, à la diligence du Trésorier Payeur Général, dès le versement total ou partiel de la contrepartie financière de la licence ». L’article 3 du même décret précise : « la somme susvisée est destinée à la réalisation des missions de l’Artp et sa répartition est faite dans le budget approuvée par le Conseil de Régulation ». Il y a lieu de noter que cette contrepartie financière n’a été encore ni répartie, ni prise en compte par une loi de finances rectificatives. Ce qui signifie que le ministère de l’Economie et des Finances n’a pas encore notifié le montant qui revient à l’Artp pour l’exécution de ses missions, à fortiori lui avoir versé un montant quelconque à répartir dans le budget.

Le Directeur général et les membres du Conseil se sont donc personnellement partagés la somme d’un milliard six cent millions de francs (1 600 000 000) tirée des comptes bancaires de l’Artp.

LE CODE DES MARCHES SYSTEMATIQUEMENT VIOLE

La quasi-totalité des marchés a été passée soit par régularisation, soit par entente directe, notamment avec la société de droit suisse, Code Africa, sans tenir compte des prescriptions de l’article 76 du décret n° 2002-550 portant code des marchés ; soit par appels d’offres restreints sans l’autorisation préalable de la Commission nationale des contrats de l’administration (Cnca) et sans respect des conditions fixées par le code des marchés. Prés du 1/3 des sommes décaissées au titre des marchés l’a été au profit de la société Code Africa.

Pour ces manquements, volontaires et notoires, les inspecteurs en charge de la mission de contrôle ont proposé des poursuites contre les Directeurs généraux, Daniel Goumalo Seck (pour la période du 16 juin 2005 à nos jours) et son prédécesseur, Malick Guèye (période du 28 mai 2003 au 16 juin 2005) pour gabegie et non transparence avec de fortes présomptions de concussion et de corruption dans la gestion des deniers publics. Ils ont également préconisé la suspension pendant cinq ans, de la société Code Africa, de toutes les souscriptions aux marchés de l’Artp, pour avoir bénéficié dans des conditions non transparentes de commandes publiques.

En outre, certaines rubriques de dépenses de l’Artp ont connu un accroissement exponentiel non justifié par l’activité de l’agence. Ainsi, la masse salariale a été multipliée par huit (8), en seulement cinq ans. Elle est passée de deux cent quarante huit millions vingt huit mille cinq cent cinquante neuf francs (248 028 559 FCFA) en 2002 à deux milliards cinquante trois millions cent quarante huit mille cent vingt deux francs (2 053 148 122 FCFA) en 2006. L’effectif est passé pendant la même période, de trente quatre (34) à quatre vingt quinze (95) agents. Au moment où ils bouclaient leurs investigations, les vérificateurs ont constaté que ce nombre est passé à cent seize agents (116).

Toujours dans le registre des dépenses, le poste « mission et frais de voyage » a connu une augmentation importante non maîtrisée. Que dire des loyers et charges locatives qui constituent des exemples éloquents de mauvaise gestion des ressources de l’agence. La procédure utilisée pour le choix des immeubles et la détermination du montant des loyers ont manqué de transparence. L’Artp a systématisé dans la quasi-totalité des contrats, le paiement annuel et par avance des loyers, notamment la location du siège et de l’annexe. Les Inspecteurs généraux d’Etat en charge de la vérification estiment que l’optimisation des ressources aurait commandé l’acquisition d’un terrain et l’édification d’un immeuble pouvant abriter les services de l’agence et éventuellement, héberger à titre onéreux, d’autres structures.

Par ailleurs, les honoraires payés par l’Artp au titre de consultance sont en constante augmentation. De seize millions neuf cent quatre vingt un mille sept cent soixante francs (16 981 760 FCFA) en 2002, ils sont passés à un milliard cent quarante six millions huit francs (1 146 406 008 FCFA) en 2004. Deux ans plus tard (2006), ces honoraires ont été évalués à un milliard soixante treize millions quatre cent un mille deux cent quatre vingt et un francs (1 073 401 281 FCFA). Une évolution qui s’est faite parallèlement à l’accroissement des frais de formation, de colloque, séminaires et conférences, alors que les deux postes ne devraient pas évoluer dans le même sens.

En outre, l’appui institutionnel dont le montant a atteint en quatre ans et demi le chiffre d’un milliard neuf cent quarante neuf millions quatre cent six mille cinq cent soixante treize francs (1 949 406 573 FCFA) est versé à des services, en violation de l’article 51 alinéa 3 de la loi n° 2001-15 du 27 décembre 2001. Cet article stipule : « les ressources de l’Artp sont entièrement et exclusivement utilisées pour l’exécution de sa mission »

ABSENCE DE DEFINITION PRECISE DE LA TUTELLE DE L’ARTP

Les textes en vigueur ne font référence qu’à un rattachement au Secrétariat général de la Présidence. Ce concept étant différent de la tutelle qui répond à une définition précise. L’Artp adjointe au Secrétariat de la Présidence de la République, conformément aux décrets portant répartition des services de l’Etat et du contrôle des établissements publics, des sociétés nationales, et des sociétés à participation publique entre la Présidence, la Primature et les Ministères, ne peut pas être placée sous sa tutelle. La loi n° 2002-23 prévoit du reste que « la tutelle est assurée par le Ministre chargé des Finances et celui en charge de la tutelle technique du secteur régulé. » Dès lors, en l’état actuel de la réglementation, l’Artp n’est placée, de jure, sous l’autorité d’aucune entité.

Les attributions des organes de l’agence sont mal réparties. En effet, le Directeur jouit d’importants pouvoirs et même les actes à grande incidence financière qu’il prend, ne sont soumis à aucun contrôle. La répartition des attributions entre le Conseil de régulation et le Directeur général est très déséquilibrée, au profit de ce dernier qui dispose en réalité des pouvoirs de gestion et de régulation.

Pour conclure, le Conseil de régulation agit comme un organe à la fois consultatif et délibérant. Il exerce ses compétences essentiellement dans le domaine de la régulation, c’est-à-dire, là où il devait avoir de réels pouvoir de régler, par ses délibérations, les affaires de l’agence. Aussi, le Conseil a souvent violé la réglementation en vigueur, notamment, en octroyant, par des délibérations, des avantages à ses membres, alors que l’article 9 du décret n° 2003-63 du 17 février 2003 fixant les règles d’organisation et de fonctionnement de l’Artp précise : « La rémunération et les avantages en nature des membres du Conseil de régulation sont fixés par décret ». Dès lors, il résulte une absence de base juridique pour les indemnités ou primes payées aux membres qui doivent restituer les sommes indûment perçues. Précision

Incriminé par le rapport de l’Inspection Générale d’Etat (Ige) aussi bien en 2007 qu’en 2008 (au même titre que son prédécesseur, Malick Guèye et sept membres du Conseil de Régulation), Daniel Goumalo Seck reste injoignable. Sa Secrétaire avec qui nous sommes entrés en contact à trois reprises certifie lui avoir répercuté notre volonté de recueillir sa réaction sur la question. Toujours selon l’Assistante, M. Seck lui a, à chaque fois, promis de rappeler. Ce qu’il n’a pas fait jusqu’au moment où nous mettions sous presse ce dossier.

Alioune Badara Coulibaly

(Source : La Gazette, 19 septembre 2009)

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