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Quatrième licence de téléphonie : Bonne ou mauvaise décision ?

dimanche 24 mars 2013

La décision du Président Macky Sall d’attribuer une licence à un quatrième opérateur télécom n’a pas manqué de susciter des interventions et contributions sur son opportunité. Pour les opérateurs en place, à travers la plume de certains de leurs employés, cette décision n’est pas opportune. Pour d’autres, des considérations préliminaires doivent être prises pour réformer le secteur avant de finaliser le cahier des charges. Mais en dernier lieu, pour apprécier simplement cette décision, et sans se perdre dans les chiffres, il faut se poser la question de savoir quels critères doivent être considérés dans la décision d’octroyer cette nouvelle licence. Cela permet de simplifier l’évaluation de cette décision et d’en apprécier l’opportunité dans les circonstances actuelles.

On peut citer 7 critères décisifs.

1. La densification du réseau de distribution des services télécoms. Le Sénégal a besoin de renforcer la densité de son réseau. Nous sommes déjà dans la société de l’information, de la communication numérique et des réseaux d’échanges de de données. La densification des réseaux est dans cette perspective un objectif à renforcer, une condition critique à réaliser comme on le ferait pour un tissu industriel avec une panoplie d’acteurs partenaires qui ensemble, concourent à offrir une plateforme de réseau national de télécommunications intégré de manière à réduire les gaps entre les différentes zones géographiques aussi bien au niveau national qu’international, dans des modalités de coûts soutenables.

2. La diversification des services de télécommunication. Renforcer la diversification des services de télécommunication est aussi un objectif visé pour exploiter toutes les niches de clientèle et ainsi offrir des services ciblés sur les besoins spécifiques dans un marché qui va se différencier progressivement dès lors que les services de base, par nature homogènes dans la phase initiale, auront atteint leur seuil de maturité et devront se différencier selon ces segments de manière compétitive.

3. Le renforcement de la concurrence entre opérateurs. La concurrence, aussi bien sur les prix que sur les services, comme dans tous les secteurs, permettra d’offrir des produits plus compétitifs au profit du client. Les coûts en services de télécommunication peuvent aujourd’hui être considérés comme faisant partie du panier de la ménagère tant communiquer par les médias modernes mobiles est aujourd’hui devenu une banalité. Il ne faut pas sous-estimer l’impact d’une baisse des prix sur les clients de manière générale. La baisse de ces prix aura aussi un effet sur la pénétration des services TIC dans les foyers, les écoles, les institutions, les lieux publics, etc. Les services de télécommunication vont de plus en plus devenir des services de base comme l’électricité et l’eau. La baisse du prix a son importance dans cette massification de la consommation et sa diffusion générale.

4. L’élargissement de l’offre des services télécom intermédiaires. L’élargissement de l’offre pour des produits et services intermédiaires aux opérateurs de télécommunication sera développée et renforcée par l’arrivée d’un autre opérateur, puisqu’il renforcera les clients potentiels des fournisseurs de services en infrastructures télécoms intermédiaires. Les réformes envisagées par l’ARTP devraient permettre de renforcer l’émergence de ce segment qui précisément a aussi besoin de clients dans une situation de concurrence réelle et non d’une position oligopolistique étroite.

5. L’investissement. L’arrivée d’un opérateur, c’est aussi forcément de nouveaux investissements de plusieurs centaines de milliards. L’importance de ces investissements dépend certes de plusieurs facteurs dont le potentiel du marché, la stratégie de l’opérateur, mais aussi et surtout sa taille. Un grand opérateur avec des moyens aussi importants que ceux du plus grand opérateur actuel aura des ambitions à la mesure de ce concurrent. De ce point de vue, disposer d’un grand opérateur est un must pour rétablir l’équilibre. Expresso et Tigo ne font pas le poids avec Orange en termes de capacité d’investissements quelle que soit la créativité et l’agressivité de leurs offres commerciales.

6. L’emploi. L’arrivée d’un opérateur est créatrice d’emploi. Penser que l’arrivée d’un quatrième opérateur fera perdre des emplois dans notre pays est un vue catastrophique sans rapport avec la réalité. Les exemples de fusions d’opérateurs télécom données par certains sur la question pour expliquer les stratégies développées par des opérateurs télécoms pour faire face à la concurrence ne sont pas propres au secteur des télécoms. Dans les services financiers cette stratégie de consolidation est développée tout comme dans le secteur industriel sans que cela soit dû à la morosité du secteur. Elle procède souvent du besoin de renforcer sa position en s’alliant avec d’autres acteurs du secteur.

Un nouvel opérateur dans le contexte actuel, c’est aussi l’amélioration de la mobilité potentielle des ressources humaines qualifiées du secteur qui naturellement bénéficieront de la concurrence des opérateurs. De ce point de vue encore, il faut un grand opérateur capable d’offrir des packages concurrentiels pour recruter ou garder ses cadres.

L’emploi, c’est aussi le réseau de distribution des petits revendeurs qui peut être renforcé, de manière marginale cependant, par un nouvel opérateur.

L’impact peut aussi être répercuté sur le développement des services en TIC et les entreprises qui utilisent directement les services des opérateurs. C’est le cas des services de transfert d’argent, des paiements en ligne et des entreprises de l’économie numérique de manière générale. Aussi bien sur l’emploi direct que sur l’emploi indirect et l’amélioration des facteurs de compétitivité, les effets nets attendus seront positifs.

7. Les revenus. L’arrivée d’un nouvel opérateur c’est le paiement de la licence qui devrait rapporter au moins 100 ou 125 milliards comme droits de porte, des redevances annuelles à payer et finalement des taxes qui remplissent les caisses de l’Etat. Dans un pays comme le nôtre, cette manne est très appréciable, encore que dans l’usage, on peut se poser la question de savoir à quoi servent réellement les revenus générés si ce n’est pour les engloutir dans nos dépenses publiques inefficaces.

C’est l’occasion de plaider pour que les ressources de la quatrième licence soient consacrées exclusivement à l’emploi des jeunes qui souffre d’une indigence notoire en moyens pourtant si essentiels à la lutte contre ce fléau. En réservant par acte législatif le prix de la licence et l’intégralité des redevances de la 4ème licence au financement de programmes ciblés sur l’emploi des jeunes, on met ainsi à profit ces nouvelles ressources pour agir sur la croissance et l’emploi des jeunes sans dépendre des arbitrages annuels du ministère des finances, d’un premier ministre et du président de la République beaucoup plus soucieux des problèmes d’électricité et de la satisfaction des revendications des syndicats que du problème de l’emploi des jeunes. A tort.

Mais tout ceci, il faut le dire, nécessite que l’ARTP, le maillon faible du secteur des télécoms au Sénégal soit renforcé et mis à niveau. Comme arbitre et planificateur, elle doit renforcer les conditions d’une compétition concurrentielle et avoir les moyens de surveiller le secteur tout en gardant une capacité de perspective qui lui permettra d’anticiper sur les changements et l’évolution du secteur. C’est ce manque de perspective qui explique le bradage initial de la licence à Tigo. De ce point de vue, Mr Djibril Lô, technicien d’Orange France qui dans une récente contribution dans la presse, plaidant pour son employeur, remet en question l’opportunité du 4ème opérateur, a raison de noter les insuffisances de l’ARTP.

Mais, il faut aussi encourager les décisions récentes et actions que l’ARTP compte déployer pour réformer le secteur avant la finalisation du cahier des charges. Ces réformes, à terme, devront rendre le secteur plus ouvert et plus concurrentiel. Le quatrième opérateur est juste annoncé, mais l’élaboration du cahier des charge et l’attribution subséquente seront précédées par ces réformes. La décision du gouvernement de donner une quatrième licence n’est donc pas une précipitation. C’est une bonne décision.

La décision qu’il faut peut-être dénoncer est celle d’attribuer une extension de licence globale à Tigo tout simplement pour régler un contentieux juridique alors même qu’une nouvelle équipe avec une nouvelle orientation était en voie de se mettre en place avec des réformes en vue. L’empressement du gouvernement à conclure cet accord avec Tigo, à la surprise de tous, renforce l’argument qui voudrait que l’ARTP soit extraite de la présidence de la République pour ne pas la laisser sous les décisions impulsives d’autorités qui vivent sous des pressions budgétaires permanentes. Les 50 milliards perçus de cet accord avec Tigo sont surement déjà dépensés et digérés sans que l’on ait pensé à orienter ces revenus exceptionnels vers des investissements exceptionnels. Les revenus de la quatrième licence doivent échapper à une telle utilisation.

Les jeunes méritent de bénéficier des ressources qui seront générées par cette quatrième licence. Sur 15 ans, les revenus consolidés de cette licence peuvent générer 300 milliards qui iront exclusivement au financement d’opportunités à leur endroit. Mais puisque rien n’est donné dans ce pays pour qui ne sait pas se faire entendre devant le brouhaha des priorités nationales légitimes face aux ressources publiques limitées, peut-être bien qu’il faudra qu’ils paient de leur personne pour l’exiger. Encore et encore jusqu’à ce que justice leur soit rendue. A bon entendeur, salut.

Amadou Guèye, Consultant et Président de l’UNIS

(Source : Dakar Actu, 24 mars 2013)

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