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Quatre ans après son introduction au Sénégal, Internet bouscule les habitudes

mardi 27 juin 2000

Deuxième en Afrique sub-saharienne derrière l’Afrique du Sud, le Sénégal a fait au cours de ces dernières années des avancées notables dans le domaine des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC). Mais avec une densité de 1,54 téléphones pour 100 habitants et un nombre d’internautes estimé à 15.000, le pays se situe encore loin derrière la moyenne des pays développés. Si les équipements informatiques sont encore d’un coût élevé, les ressources humaines du Sénégal lui confèrent cependant de sérieux atouts dans le domaine des services.

Des élèves assis depuis de nombreuses heures devant des ordinateurs profitent (abusent ?) largement du service gratuit qui leur est offert pour naviguer sur Internet. "Il y a beaucoup de personnes qui veulent surfer mais ils (les élèves, Ndlr) refusent de se lever pour céder la place à d’autres qui veulent naviguer sur le net ", commente une femme debout dans le stand d’une entreprise informatique présente parmi la cinquantaine d’exposants qui ont pris part à ce banquet des Nouvelles technologies de l’information et de la communication (Ntic) qu’a abrité la capitale sénégalaise. Ce 5ème Salon international de l’informatique et de la communication (Sinec) s’est tenu à Dakar, au Centre international du commerce extérieur du Sénégal (Cices) au mois de mai dernier.

Il a constitué, pour ces jeunes, une occasion rêvée de s’exercer pendant des heures, et sans bourse délier, à la manipulation d’outils dont le taux de pénétration au Sénégal est encore faible. Avec une pointe d’égoïsme et la dévotion du néophyte, ces jeunes n’ont plus pensé à ceux qui les attendaient quand,devant l’écran, ils ont été comme envoûtés par le contact du clavier, de la souris, des disquettes, entre autres équipements qui leur ont permis, à l’aide de logiciels et d’un modem, de s’adonner à des applications qu’ils n’ont jamais faites. Ils ont ainsi exploré un univers encore fermé pour nombre de leurs condisciples et personnes de leur âge. Privilège rare dans un pays où l’accès à ces outils est encore un luxe. Pourtant, dans le classement des pays africains, le Sénégal affiche une relative bonne performance. Deuxième en Afrique au sud du Sahara, derrière le géant sud-africain, les nouvelles technologies de l’information et de la communication (Ntic) attendent d’être démocratisées. La dépendance technologique envers l’Occident est tout aussi grande. Un participant ne s’y est pas trompé quand, à l’enthousiasme débridé de certains devant le caractère "high tech" de certaines machines exposées lors de ce cinquième Salon international de l’informatique et des nouvelles technologies de la communication (Sinec), il ramenait les choses à leurs proportions en affirmant avec forces convictions : "Les exposants étrangers sont venus nous vendre leurs machines. C’est tout. Or, ce qui est important, c’est surtout la maîtrise de la technologie et dans ce domaine, le Sénégal a encore un énorme retard ", indiquait-il après avoir sans doute mesuré le niveau de pénétration des nouvelles technologies de l’information et de la communication (Ntic) au Sénégal. Par le vocable Ntic, les spécialistes désignent une gamme de produits allant de la radio, la télévision en passant par le téléphone portable, Internet etc... Domaine où les innovations se font à un rythme très rapide mais dans lequel le Sénégal tire parti d’équipements et de ressources humaines qui le placent parmi les premiers pays africains.

"Le Sénégal qui dispose d’ingénieurs informaticiens certifiés auprès des leaders mondiaux du génie logiciel a de sérieux atouts pour participer aux développements de logiciels pour le marché international ", affirme Abdoulaye Ndiaye, consultant-chercheur en Ntic. A ces ressources humaines dont la qualité est éprouvée mais qui sont encore insuffisantes, il faut ajouter l’existence d’équipements de communication qui lui confèrent une place de choix . Avec un réseau téléphonique entièrement numérisé et en mesure de porter Internet partout où le téléphone est disponible, le Sénégal a réalisé depuis quelques années des percées notables. Les derniers chiffres indiquaient qu’en 1999, il y avait au Sénégal 15000 internautes. 98% de ces internautes étaient basés à Dakar, selon les indications données par Mactar Seck , directeur du Conseil supérieur de l’Industrie au ministère de l’Industrie, des mines et de l’artisanat. Mais parmi ces 15.000 internautes, seuls 8000 étaient abonnés à Internet.

Ainsi, une bonne part des internautes ne peuvent utiliser le réseau mondial que quand ils sont au bureau. Ils profitent des installations de leur administration dans une société où l’informatique, particulièrement l’accès à Internet, est à un niveau parcellaire à cause de son coût élevé. "Depuis deux ans, Internet a stagné au Sénégal. Le taux de croissance des abonnés a fortement baissé à cause des coûts d’accès et du prix des équipements informatiques", commente un chercheur sénégalais.

Pour une connexion Internet, les frais sont élevés ainsi que l’explique un fonctionnaire du ministère de l’Industrie. "Il faut 25.000 F Cfa de frais d’installation en plus une redevance mensuelle de 10.000 francs en hors taxe à ajouter au temps de communication. Un professionnel qui se connecte pendant une heure de temps par jour doit consommer quotidiennement une somme tournant autour de 4500 F Cfa . Dans le mois , cela fait environ 50.000 F Cfa. Cette facture à payer est élevée. Elle est hors de portée de la plupart des Sénégalais".

Disponible au Sénégal depuis mars 1996, le service Internet est fourni par la Société nationale des télécommunications du Sénégal (Sonatel), partenaire stratégique de l’Etat sénégalais et filiale de France Telecom, une multinationale française.

La Sonatel offre aujourd’hui deux liaisons à Internet grâce aux services de Teleglobe Canada et Mci Usa qui sont deux sociétés informatiques comptant parmi leurs spécialités le routage du trafic Internet. Mci Usa permet une liaison à l’aide d ’équipements de 64 kilobits alors que Teleglobe Canada offre une technologie d’une puissance de1 mégabit. Mais l’offre de la Sonatel est encore loin de satisfaire la demande. C’est ainsi que, selon Abdoulaye Ndiaye, consultant-chercheur en Ntic , après l’extension et la modernisation du réseau téléphonique sénégalais, une autre phase devrait suivre. Elle consiste à accéder au "backbone Internet " avec une vitesse supérieure. "Des pourparlers sont en cours avec Teleglobe (Canada) et Mci-USA qui contrôle 45% du trafic mondial en vue d’augmenter la bande passante. Actuellement, l’ensemble des fournisseurs d’accès Internet au Sénégal se partage une bande passante de 1 mégabits/s, ce qui est largement insuffisant pour les besoins de connexion du pays", indique notre source. A cette étroitesse de la bande passante, s’ajoute, pour ce qui est des contraintes vécues au Sénégal, la cherté des équipements informatiques. Les machines sont d’un coût élevé. Il faut un minimum de 500.000 F Cfa pour avoir un bon ordinateur.

LA SONATEL LOUE SES LIGNES A 14 FOURNISSEURS D’ACCES

La Sonatel, à travers Mci Usa et Teleglobe Canada, relie le Sénégal au "backbone" d’Internet. Elle loue ensuite les lignes aux fournisseurs de service Internet (providers) qui sont, pour le moment, au nombre de 14 au Sénégal. Tout abonné à Internet est obligé de passer par ces fournisseurs parmi lesquels il y a la Primature, l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad), Aupelf-Uref, Enda, Telecomplus (filiale de la Sonatel à 100%), Metissacana, Cyberbusiness Center, Arc Informatique, Point Net, Sillicon Valley etc..

Ces fournisseurs de service Internet comprennent aussi des cybercafés. Les plus importants sont Metissacana et Telecomplus.

Ces percées dans le domaine des Ntic n’ont été possibles que grâce au relatif succès connu par le téléphone au Sénégal au cours de ces dernières années. Avec une moyenne de 1,54 téléphones pour 100 habitants, le Sénégal a la densité la plus élevée de la sous-région. Mais cette densité est encore faible.

L’augmentation du parc téléphonique sénégalais est surtout visible avec l’accroissement des télécentres privés. Au 30 septembre 1999, il y avait au Sénégal 9130 locaux privés qui permettaient la gestion de 10.551 lignes, selon les chiffres fournis par Modou Diouf, chercheur en Ntic . Ce parc téléphonique était pour l’essentiel concentré à Dakar qui en comptait 4698. Ces télécentres permettent de nombreuses applications. "Le succès extraordinaire des télécentres privés est une source importante d’enseignements dont l’exploitation pourrait être utile dans la stratégie de dissémination des services", affirme pour sa part Abdoulaye Ndiaye. C’est ainsi qu’outre le service téléphonique qui y est prépondérant, certains de ces centres de communication permettent l’utilisation de télécopieurs, de minitels pour accéder aux bases d’informations locales et internationales, de photocopieurs et de micro-ordinateurs équipés de logiciels de traitement de textes.

Il y a même actuellement au Sénégal des télécentres qui offrent un service téléphonique permettant une liaison avec Internet sans passer par la Sonatel. C’est l’exemple de Net 2 phone qui permet de correspondre avec l’étranger mais grâce à un équipement qui coûte encore relativement cher. Il faut pas moins de 150.000 F Cfa pour acheter l’appareil de liaison pour une qualité d’écoute inférieure à celle de la Sonatel, selon les indications fournies par les utilisateurs. Somme toute, c’est une concurrence sérieuse pour la Sonatel. Les télécentres ont profondément pénétré dans le milieu rural sénégalais. Ils ont permis de créer plus de 10.000 emplois et font vivre plus de 12.000 familles, selon les indications données.

En attendant une nouvelle enquête qui ferait établir des chiffres plus récents, ces télécentres apportent une contribution non négligeable à la formation du Produit intérieur brut (Pib). Cette contribution est passée de 0,24% en 1994 à 0,37% en 1995 pendant que le chiffre d’affaires passait de 5523 millions de F Cfa à 9226 millions de Fcfa.

Ces Nouvelles technologies de l’information et de la communication (Ntic) ont également fait une irruption dans les établissements scolaires sénégalais. En 1999, 40 écoles (lycées et collèges) ont été connectées à Internet. Elles ont été équipées par le programme Worldlink de la Banque mondiale (Bm) qui l’a exécuté en collaboration avec l’Organisation des Nations-Unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco), le ministère de l’Education nationale et la Sonatel . L’Unesco et la Banque mondiale (Bm) ont acheté les machines alors que de son côté, la Sonatel faisait une réduction de 50% sur le coût des factures téléphoniques. Mais les écoles sénégalaises ont souvent du mal à prendre en charge les frais induits par l’utilisation de l’outil informatique ainsi que le faisait remarquer un internaute lors du colloque organisé à l’occasion du cinquième Sinec tenu au mois de mai dernier au Centre international du commerce extérieur du Sénégal (Cices). " Beaucoup d’écoles ne parviennent pas à supporter le coût du téléphone. Après une certaine période, la connexion est supprimée parce qu’elles ne sont pas en mesure de payer la facture ", indiquait-il.

PROMOUVOIR UNE SOCIETE INFORMATIQUE

Pour favoriser une plus grande pénétration des nouvelles technologies de l’information et de la communication (Ntic) dans la société sénégalaise, plusieurs organismes ont été créés au cours de ces dernières années.

Parmi ces organismes, il y a le Réseau des parlementaires sur les technologies de l’information et de la communication, le projet Acacia et l’Observatoire sur les inforoutes et les réseaux d’informations au Sénégal (Osiris). Osiris est un organisme qui regroupe la plupart des opérateurs privés intervenant dans les Ntic.

A ces deux organismes, il faut ajouter Infosen. C’est " un des tout premiers organismes créés depuis 1995 et regroupant à la fois le secteur public et le secteur privé et qui a pour vocation de promouvoir les Ntic au Sénégal par le biais de la formation et en offrant des accès à Internet".

Le quatrième organisme est relatif au chapitre sénégalais d’Internet Society qui gère le nom de domaine "sn ". Quant à la Fondation Trade Point, elle est une association qui regroupe les secteurs public et privé. Elle est dotée d’une autonomie de gestion.

Malick Rokhy BA

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INTERNET EN CHIFFRES

- Bande passante internationale : 172 Gbps
- 4 FAI (Orange, Arc Télécom, Waw Télécom et Africa Access)
- 19 266 179 abonnés Internet

  • 18 595 500 abonnés 2G+3G+4G (96,58%)
    • 2G : 12,95%
    • 3G : 24,60%
    • 4G : 62,45%
  • 334 642 abonnés ADSL/Fibre (1,71%)
  • 334 875 clés et box Internet (1,71%)
  • 1162 abonnés aux 4 FAI
  • Internet fixe : 1,74%
  • Internet mobile : 98,26%

- Liaisons louées : 3971

- Taux de pénétration des services Internet : 106,84%

(ARTP, 30 septembre 2023)

- Débit moyen de connexion mobile : 23, 10 Mbps
- Débit moyen de connexion fixe : 21, 77 Mbps

(Ookla, 31 janvier 2023)


- 9 749 527 utilisateurs
- Taux de pénétration : 56,70%
(Internet World Stats 31 décembre 2021)


- + de 10 000 noms de domaine actifs en .sn
(NIC Sénégal, décembre 2023)

TÉLÉPHONIE EN CHIFFRES


Téléphonie fixe

- 3 opérateurs : Sonatel, Expresso et Saga Africa Holdings Limited
- 382 721 abonnés
- 336 817 résidentiels (88,01%)
- 45 904 professionnels (11,99%)
- Taux de pénétration : 1,67%

(ARTP, 30 septembre 2023)

Téléphonie mobile

- 3 opérateurs (Orange, Free et Expresso)
- 21 889 688 abonnés
- Taux de pénétration : 123,34%

(ARTP, 30 septembre 2023)

FACEBOOK

3 050 000 utilisateurs

Taux de pénétration : 17,4%

- Facebook : 2 600 000

- Facebook Messenger : 675 200

- Instagram : 931 500

- LinkedIn : 930 000

- Twitter : 300 000

(Datareportal, Janvier 2023)

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