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Le futur digital du Kenya pourrait s’assombrir avec les contenus numériques bientôt taxés

mercredi 10 juin 2020

En 2018, les utilisateurs Ougandais de Facebook, Twitter et WhatsApp ont fait l’amer constat qu’ils devaient dorénavant payer une taxe de 200 shillings par jour avant d’avoir accès aux réseaux sociaux. A travers la prise de cette décision, l’objectif affiché par le pouvoir de Kampala était de lutter contre les fausses rumeurs et les mensonges.

Depuis l’entrée en vigueur de cette décision, d’autres pays africains ont emboité le pas à l’Ouganda. En effet, après la Zambie, le Kenya souhaite procéder à l’adoption d’une nouvelle réglementation sur les contenus en provenance du net.

Le projet Kenyan entend implémenter une taxe sur la valeur ajoutée qui s’applique au téléchargement des applications et autres contenus numériques. Pour l’heure, l’Autorité fiscale du Kenya a pris le soin de solliciter l’avis du grand public. Il convient cependant de dire que si cette mesure est adoptée, l’accès à Internet deviendra plus cher dans ce pays d’Afrique de l’Est qui inspire le monde entier pour ses prouesses technologiques.

En effet, sur le continent Africain, le Kenya fait partie des pays qui ont effectué ce que de nombreux spécialistes des télécoms appellent un saut de grenouille. De fait, le pays est passé directement à l’utilisation du téléphone portable, sans recourir au développement massif des lignes téléphoniques fixes comme les pays industrialisés.

Par la suite, le Kenya en a profité pour gagner une longueur d’avance, y compris sur l’Occident grâce au légendaire portefeuille électronique M-PESA.

Si l’influence de l’innovation technologique est grande au Kenya, le futur digital de ce pays pourrait toutefois s’assombrir. Il se pourrait en effet que les vidéos, les logiciels, les podcasts et autres contenus disponibles en téléchargement sur le web deviennent des sources de recettes fiscales pour l’Etat Kenyan.

Dans l’immédiat, le projet est toujours en cours d’élaboration. Son aboutissement n’est cependant pas exclu car le recours aux télécoms dans la recherche du cash-flow est grandissant sur le continent.

En RDC, les autorités congolaises ont procédé par exemple à la promulgation du décret n°20/005 du 9 mars 2020 portant sur la certification des appareils mobiles. A travers ce décret, Il est demandé à tout utilisateur d’un téléphone mobile en RDC de payer, via son opérateur téléphonique, une taxe de 1 dollar USD pour les appareils mobiles 2G et 7 dollars USD pour les appareils mobiles 3G, 4G .

Il s’agit d’une manne financière que le régulateur Congolais souhaite obtenir afin de faire face au manque de moyens auxquels il est confronté. Même son de cloche au Kenya car la mesure en gestation serait une réponse aux difficultés économiques que rencontre le gouvernement depuis le début de la pandémie du COVID-19.

Cette traque aux niches fiscales fait malheureusement craindre le pire. En RDC, il s’agit de la sixième taxe qui se rajoute aux cinq premières taxes prélevées depuis février 2012 et qui vise encore une fois à générer des revenus afin de soutenir l’action du régulateur Congolais.

Par ailleurs, cette nouvelle taxe risque d’entraîner une augmentation du coût d’utilisation des appareils mobiles en RDC. Au Congo, certains consommateurs estiment que le secteur des télécoms est déjà soumis à une forte pression fiscale. Ces derniers craignent par conséquent que cette mesure affecte leur portefeuille, déjà surtaxé avec la perception de la taxe des accises sur Internet et celle de 40% du prix du téléphone par la douane.

Au Bénin, le gouvernement qui a organisé une campagne politique exclusivement médiatique cette année, s’empressa deux ans plus tôt de pousser l’agence de régulation des communications électroniques et de la poste à revoir la grille de tarification internet à la hausse. Pourtant au même titre que le gouvernement congolais, le gouvernement béninois entend faire la promotion du numérique à travers son plan d’action politique.

En république du Bénin, certains observateurs de la scène politique estiment que la hausse des tarifs internet participe du désir du gouvernement de taire les critiques sur les réseaux sociaux. Or, à l’image des Maliens, de nombreux Béninois ont reçu des messages du gouvernement sur les réseaux sociaux durant la campagne politique exclusivement médiatique cette année.

Lors des élections présidentielles de 2018 au Mali par exemple, la startup Quintly qui propose un outil d’analyse statistique spécialisé dans les données sociales et en particulier provenant des pages Facebook, a mené une étude sur les habitudes des mobinautes maliens de janvier 2018 à Avril 2018. S’il est possible de se réjouir du fait qu’on peut diffuser sur Internet des spots de campagne, l’utilisation des réseaux sociaux favorise la manipulation des opinions politiques.

Le Cameroun a ainsi fait appel à Facebook afin de lutter contre les fausses informations en prélude aux élections du 07 octobre 2018. A l’ère de la communication politique digitale, il est également possible de recourir aux techniques de marketing individualisé.

En général, ces techniques permettent de cibler le comportement des électeurs lors d’une campagne exclusivement médiatique. En 2017 par exemple, l’élection organisée par le Kenya avait été qualifiée par Hillary Clinton de projet Cambridge Analytica. Durant la campagne qui précéda le vote, les kenyans ont reçu sur leurs téléphones un flot abondant de rumeurs, de photomontages, de faux articles de presse et de faux reportages.

Selon certaines sources, l’entreprise Britannique continuerait de se servir des données issues de l’utilisation de Facebook afin de faire prospérer ses activités dans de nouveaux pays.

Ces dernières années, certains pays ont aussi procédé à la mise en place de la biométrie pour enregistrer les votants. Toutefois, la modernisation des documents ayant trait à l’identité des votants soulèvent de nombreux enjeux.

A titre d’exemple, le traitement d’une photo biométrique permet d’inférer une vingtaine de conditions médicales. A l’échelle mondiale, ces précieuses informations attirent la convoitise des sociétés pharmaceutiques qui sont prêtes à payer de fortes sommes pour les acquérir. Dans le contexte de crise actuelle, marqué par la Covid-19, les fausses informations et plusieurs revendications sociales, il reste à savoir si la nouvelle taxe kenyane sera adoptée.

Dr Qemal Affagnon [1]

(Source : Digital Business Africa, 10 juin 2020)

[1] Dr Qemal Affagnon, est le responsable Afrique de l’Ouest de l’ONG de défense des droits numériques, Internet Sans Frontières. Dans le cadre de ses travaux de recherche, il a publié plusieurs articles académiques sur la multifonctionnalité de l’Internet et des réseaux sociaux dans la pratique de la religion. Il est également spécialiste en stratégie de lutte contre les coupures internet, la cybercriminalité et l’éducation aux médias sociaux. En sa qualité d’expert électoral, il a observé des scrutins électoraux en RDC, en Afrique du Sud et au Mozambique.

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(Datareportal, Janvier 2023)

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