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Le contrôle des télécommunications en Afrique

lundi 16 novembre 2020

La guerre économique sino-américaine a pris un nouveau tournant depuis l’arrivée de la 5G dans le monde. Huawei étant sous la coupe du Parti Communiste Chinois (PCC), c’est une guerre technologique indirecte entre les deux puissances. L’Afrique se retrouve au milieu de ces « tirs croisés ». Le continent, étant extrêmement prometteur par son développement économique et sa très forte croissance démographique, est devenu un marché très convoité. Les Chinois implantés depuis un certain temps dans la région se voient désormais malmenés par les États-Unis qui semblent prêts à tout mettre en œuvre pour stopper l’ascension de Huawei. Mais derrière ces différents épisodes à rebondissement se profilent des stratégies d’encerclement et de contre encerclement cognitif.

Le marché africain, au cœur de la stratégie chinoise

La Chine a très vite compris la richesse que ce continent représentait. Dès le début du 21e siècle, elle s’est imposée comme un acteur économique fort et nécessaire au développement de l’Afrique. Cela s’est rapidement confirmé par l’arrivée de Huawei à la fin des années 1990 ; la compagnie est aujourd’hui présente dans les 63 pays où elle propose des services très variés : la vente de smartphone, la formation universitaire, service de cloud, réseau internet, système de surveillance, ville intelligente. Huawei, contrairement à ses concurrents, a bien pris en compte les critères du marché africain, et propose des smartphones et des services 15% moins cher que Nokia et Ericsson, permettant dès lors d’acquérir une plus grande part de marché.

Cet argument de « services de haute qualité à bas prix », Huawei en a fait sa plus grande force, au point qu’elle couvre actuellement plus de 60% des installations 3G-4G et souhaitant faire d’autant plus sur le marché de la 5G. C’est cette ascension fulgurante qui, aujourd’hui déstabilise les intérêts américains – hégémons de ce secteur stratégique depuis ses débuts.

C’est ce qui explique les sanctions américaines de mai 2019. Le département du commerce américain plaçait l’entreprise Huawei ainsi que ZTE (autre entreprise de télécommunication chinoise) sur liste noire afin de les priver de leur marché et de les empêcher par ce biais d’espionner, de surveiller les citoyens, les institutions et les entreprises américaines.

Une tentative américaine de reprise en main du continent africain

Les États-Unis ayant loupé le coche de la 5G, se retrouvent finalement devancés par le géant chinois, qui compte bien profiter de son avance technologique. Si Donald Trump refuse de perdre la face vis-à-vis de son rival, reprendre l’avantage semble quelque peu complexe. En 2019, Washington a débloqué un fonds de 60 milliards de dollars pour aider au développement des pays africains. Donald Trump a voulu marquer le coup en exprimant sa volonté de mettre en place une aide financière pour tous les pays non-développés qui seraient prêts à renoncer à leur collaboration avec Huawei. Ce levier d’influence nous rappelle quelque peu les stratégies utilisées par les américains à la fin de la Deuxième Guerre mondiale pour contrer l’influence de l’URSS dans les pays européens.

Au-delà des armes financières, les États-Unis livrent une réelle guerre de l’information, ne cessant de prôner le danger que représente l’entreprise chinoise pour la sécurité et la souveraineté des pays et des citoyens. Les accusant sans cesse d’espionnage et de surveillance de masse, relayant les accusations révélées par Le Monde concernant l’espionnage demandé par le PCC à Huawei de l’Union Africaine. La première puissance mondiale ne cache pas sa volonté d’apparaître, encore une fois, comme protectrice de la démocratie et des libertés, en étant celle qui dénonce les ennemis de ces principes. Les États-Unis veulent gagner la guerre de l’opinion.

L’objectif ultime : une domination technologique dans le monde immatériel

La puissance mondiale américaine est prête à tout pour freiner l’expansion de Huawei, derrière laquelle se cache le gouvernement chinois. L’ambition de Xi Jinping est de pousser l’extension de l’entreprise afin de prendre définitivement l’ascendance sur les Américains. Cela a été très clairement revendiqué par le chef des services de propagande du PCC qui a affirmé la volonté chinoise de devenir une « grande puissance du cyberespace ».

Comme dans chaque conflit le but de l’adversaire est de soumettre son ennemi. C’est cette bataille pour la 5G qui s’avère être la vitrine de l’affrontement entre les deux puissances pour la suprématie technologique dans le monde immatériel. Pour décrédibiliser l’adversaire, les États-Unis divulguent des informations dénonçant l’espionnage par Huawei de certains de ces clients au profit du PCC.

Les États-Unis ont aussi recouru à une certaine forme de « chantage » au regard de la vente de puces électroniques, essentielles à Huawei. Ce à quoi la Chine a riposté en menaçant l’arrêt de l’approvisionnement de terres rares nécessaire à la fabrication de celles-ci. Un affrontement sans fin entre les deux qui a conduit Huawei à sortir de l’ombre pour s’affirmer publiquement. Le président et directeur général Ren Zhengfei a dénoncé la volonté américaine de nuire à son entreprise simplement pour protéger l’hégémonie américaine dans ce secteur, et n’a pas hésité à faire savoir que l’entreprise ne cèderait pas aux menaces américaines.

Les Etats-Unis se sont alors servis de leur arme technologique, les GAFA pour bloquer Huawei. Google, en 2019, a décidé de supprimer toutes ces applications des smartphones Huawei. Face à cette nouvelle attaque, l’entreprise a réagi efficacement promettant des applications de substitutions à ces consommateurs.

Dans la bataille qui s’illustre entre les deux grandes puissances, la Chine est bien déterminée à ne pas se laisser devancer par les Américains. Huawei cherche ainsi à éliminer tous les leviers que les Américains pourraient exploiter pour les atteindre, verrouillant également le marché des télécoms africains.

Une rivalité qui s’inscrit sur le moyen/long terme

Les États-Unis, par leur guerre d’information, sèment le doute sur Huawei. L’idée étant d’empêcher des pays de conclure de nouveaux accords avec la Chine. Ce que les autorités américaines ont réussi à faire dans leur sphère d’influence. L’Australie, Le Canada, le Royaume Unis, le Japon, Singapour et la Nouvelle Zélande ont pris des mesures très restrictives à l’encontre de l’entreprise chinoise.

Mais les Etats-Unis ne sont pas à l’abri des accusations de surveillance illégale par le biais des technologies de l’information, comme cela a été démontré à la suite des révélations d’Edward Snowden en 2013. La Chine n’a pas utilisé cet argument de manière officielle car il ne lui permettait pas d’évacuer les soupçons portant sur des démarches intrusives de sa part par la biais de technologies de l’information similaires.

Toutefois, si les allégations américaines contre Huawai s’avèrent véridiques, on peut se demander jusqu’où l’Empire du milieu serait prêt à aller. Le contrôle des individus dans la société chinoise est au cœur de la politique du Parti Communiste Chinois. Politique rendue possible grâce aux technologies déployées par le gouvernement. Si Huawei met en place ces mêmes technologies en Afrique, le gouvernement chinois pourrait exercer pour le compte de certains gouvernements africains un contrôle dont il tirerait des informations utiles sur ce continent si prometteur.

Alizée Sentilhes

(Source : Infoguerre, 16 novembre 2020)

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