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Le Défi des TIC : L’Afrique est-elle condamnée à rester à la traîne ?

vendredi 4 juillet 2008

Lorsque le Pr. Maurice Kamto m’a fait l’honneur de me solliciter pour que j’intervienne sur le thème « technologie et développement » dans le cadre d’un livre collectif sur l’Afrique, j’avoue m’être interrogé sur la meilleure manière de concevoir une contribution qui soit à la fois utile, pertinente et efficace. Ayant eu l’occasion, à diverses reprises, de participer à plusieurs réflexions et débats sur le thème du développement de l’Afrique, j’avais à cœur de ne pas me répéter, même si les problématiques restent évidemment les mêmes. C’est ainsi que j’ai pris le parti de procéder par un récit, un témoignage. Ce témoignage concerne l’Université virtuelle africaine (UVA), institution d’enseignement à distance de référence que j’ai contribué à créer en Afrique. En effet, à travers l’UVA, ce que je me suis efforcé de porter et promouvoir, avec d’autres, c’est le projet d’une Afrique numérique. Au demeurant, l’exemple de l’UVA illustre à mes yeux la manière exacte dont les Africains doivent s’y prendre pour s’attaquer à des projets d’envergure. Ils ne doivent pas hésiter, le cas échéant, à naviguer à contre courant. En relatant l’expérience de l’UVA, je voudrais mettre en relief la force des choses et la nature des hommes. C’est en fait une « étude de cas ».

Contrairement à une idée largement répandue, la Banque mondiale n’est pas à proprement parler à l’origine de la création de l’UVA. En réalité, elle s’y est tout d’abord opposée. Ce n’est que plus tard, autant par réalisme que par opportunisme, qu’elle a fini par rallier le projet qui était déjà en marche. L’UVA a en réalité été créée en 1997, sur le papier, par le burundais Etienne Baranshamaje, un fonctionnaire dissident de la Banque mondiale qui, manifestant une certaine défiance à l’égard de son employeur, entendait faire de son idée un projet personnel. Mal lui en prit car, lassé de consacrer une bonne part de son énergie à éviter les « peaux de banane », il finit par claquer la porte et abandonner son projet futuriste et novateur.

Lorsque, vers le milieu de l’année 2000, la Banque mondiale vient me solliciter chez Microsoft pour porter le projet de l’UVA, elle sait qui je suis, d’où je viens et connaît les responsabilités que j’ai exercées. Je n’appartiens pas à l’establishment du développement. Et qui plus est, je ne suis pas à la recherche d’une position ou d’un job ! Plus encore, je n’ai jamais intrigué pour faire carrière et, en homme libre, je suis toujours disposé à m’en aller en cas de désaccord profond. So what ? Ma liberté par rapport à ce projet est donc totale, avantage considérable s’il en est. Pour autant, j’accepte de me lancer dans cette nouvelle aventure tout en continuant à assumer mes responsabilités normalement chez Microsoft, cette solution m’apparaissant la meilleure, dans l’intérêt même de l’UVA. Les tâches s’avèrent gigantesques, le travail écrasant, mais passionnant.

De quoi s’agissait-il ? L’idée était d’utiliser les nouvelles technologies, les TIC, au premier rang desquelles, bien sûr, le satellite et Internet, pour diffuser des cours de qualité et, au moyen d’une pédagogie innovante, former ainsi à moindre coût toute une population qui, sans cela, n’y aurait jamais eu accès. Quoiqu’il en soit, l’UVA est née d’une contradiction. Créée à partir de la Banque mondiale, elle a été en butte à l’hostilité de plusieurs responsables de cette institution, y compris un vice-président africain, qui se sont efforcés de bloquer sa réalisation et son développement. Ils estimaient que ce projet n’était rien d’autre qu’une vue de l’esprit et ne parvenaient pas à voir comment et pourquoi les Africains pourraient se précipiter vers la technologie alors qu’ils étaient aux prises avec d’autres priorités telles que la crise de l’alimentation ou la lutte contre le Sida par exemple. Ce raisonnement à courte vue était stupide. Toujours est-il que c’est dans ce contexte délétère qu’il a fallu se battre sur plusieurs fronts pour mettre sur pied, contre vents et marées, ce projet avant-gardiste. Quand, vers le milieu de 2001, nous avons inauguré le siège de l’UVA à Nairobi, tous ceux qui s’y étaient opposés furent bien entendu les premiers à se bousculer pour être sur la photo, répétant à l’envi combien l’entreprise était fabuleuse...

Comme je le dis souvent, les hommes comptent beaucoup. Un projet, aussi fort, novateur et révolutionnaire soit-il, ne vaut que par la qualité des hommes qui le portent. Et l’UVA, confrontée à tant d’embûches, n’aurait certainement pas existé sans James Wolfensohn, alors Président de la Banque mondiale. Car à la différence de nombre de responsables de l’institution, son président a toujours manifesté un soutien sans faille au projet jusqu’à ce qu’il quitte ses fonctions en 2005. Les Africains se doivent de savoir que Wolfensohn aura été notre chance. Il s’est révélé en l’espèce un leader visionnaire, bienveillant et pragmatique. Quant à moi, aussitôt élu PCA, je vais bénéficier, en m’installant, d’une chance exceptionnelle : le soutien et la confiance de Wolfensohn et de mes collègues du conseil. Cela me permettra de marquer mon autorité personnelle et surtout, de me montrer inflexible sur la direction que je prendrais.

Au total, parmi les réalisations dont je suis le plus fier figure, à n’en pas douter, l’accord de partenariat qu’en ma qualité de PCA de l’UVA, j’ai eu l’occasion de signer à Montréal en juin 2004 avec le Président Diouf, Secrétaire général de la Francophonie qui, en cette qualité, représentait l’Agence Universitaire de la Francophonie. Il s’agissait d’examiner ensemble nos problèmes dans le but de nous porter mutuellement appui, d’éviter les concurrences plus coûteuses qu’efficaces. Il était évident que d’intéressantes et prometteuses synergies pouvaient être dégagées entre les deux institutions. Encore fallait-il se donner les moyens de les mettre en place ! Ce fut en quelque sorte la consécration de l’ouverture et de la dimension internationales de l’UVA. Tout cela répondait à l’objectif que je m’étais assigné, et j’en étais très heureux pour les Africains. Tout cela montrait aussi comment, par des effets d’entraînement, par un effort constant et soutenu, bien sûr aussi par les relations personnelles, l’on peut accomplir une mission qui paraît impossible.

Si au terme de mon mandat, j’ai souhaité passer la main, je n’ai évidemment pas abandonné mon engagement au service de cette cause passionnante et si riche de potentialités pour l’Afrique que je ne perds pas une occasion de présenter et promouvoir auprès de mes interlocuteurs du monde entier. Pour les Africains qui me liront, je rappellerai simplement que nous avons, en seulement six années, réussi un assez beau palmarès pour inscrire l’UVA dans la réalité mondiale du 21e siècle. Nous avons transcrit le projet UVA du papier sur lequel Étienne Baranshamaje l’avait imaginé vers la réalité d’un monde qui va trop vite. Aujourd’hui, l’UVA a formé plus de 50.000 étudiants donc 40% de femmes. Au nombre des succès, celui-ci me tient particulièrement à cœur car il ne constitue pas un mince exploit à l’échelle d’un continent où, dans de nombreux pays, les filles n’ont pas accès à l’enseignement. J’y vois un signe fort et porteur d’espoir.

Bien entendu, ces succès restent fragiles et doivent être pérennisés, car l’UVA est un projet à très long terme. Nous le savions au départ. L’impulsion étant aujourd’hui donnée avec force et compétence, je souhaite pour ma part que les Africains puissent la prolonger par d’autres initiatives.

Jacques Bonjawo
Seattle (Washington, USA)

(Source : Sud Quotidien, 4 juillet 2008)

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