e-commerce : Jumia en pleine restructuration face à une recession du marché
mercredi 11 décembre 2019
Après son départ du Cameroun et de la Tanzanie, Jumia vient d’annoncer qu’elle mettrait un terme à son activité de livraison au Rwanda, en janvier. Le géant de l’e-commerce en Afrique est dit-on en pleine restructuration de ses activités.
« Nous regrettons de vous informer que Jumia suspendra ses opérations de livraison à la demande au Rwanda le 9 janvier 2020« , pouvait-on lire dans un communiqué de l’entreprise. Cette fermeture intervient moins de deux semaines après la fermeture de Jumia Tanzanie.
Success story. Surnommé l’Amazon africain, Jumia avait commencé ses activités au Nigeria en 2012. Son concept de base est de proposer un « big bazar » en ligne. De l’électroménager aux accessoires de mode, Jumia était l’endroit où on pouvait tout avoir. Un décollage parfait, qui a conduit à un succès fulgurant. En 2014, elle lève 120 millions et étend son empreinte en Afrique. L’Algérie, le Maroc, la Tunisie, le Kenya, l’Égypte, l’Ouganda, le Sénégal, le Ghana, l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire, le Cameroun, la Tanzanie et le Rwanda tombent dans son escarcelle.
Malgré son succès, l’entreprise qui investit beaucoup dans la communication et les investissements informatiques reste déficitaire. Mais son potentiel est intact et intéresse toujours les investisseurs. Ainsi, en 2016, un groupement de sociétés, incluant Orange, investit plus de 320 millions de dollars pour soutenir sa croissance. Cette même année, toutes les autres branches de l’entreprise Africa Internet Group propriétaire de Jumia son rebaptisés. Jumia devient la marque ombrelle du groupe. Kaymu prend le nom de Jumia Market, Hellofood se change en Jumia Food, Vendito devient Jumia Deals, Lamudi se transforme en Jumia House, Everjobs s’appelle Jumia Jobs, Carmudi devient Jumia Cars et AIGX se change en Jumia Services.
Difficultés du marché africain. En 2017, Jumia crée au Nigéria Jumia Pay pour résoudre le problème de paiement. En effet, le faible taux de bancarisation en Afrique, l’oblige à se faire payer en espèces à la livraison. Entre le temps de commande et la réception, le client peut changer d’avis ou refuser de payer la marchandise. Alors que s’il avait déjà été débité, cela aurait été une toute autre histoire. Jumia pay permet au client d’avoir un portefeuille électronique qu’il peut alimenter au gré de ses achats. Seulement, la régulateur du secteur par les banques centrales n’est pas partout pareil et la solution peine à se déployer hors du Nigeria.
En outre, l’e-commerce est tributaire d’une bonne connexion à internet car il s’agit de diffuser des photos et vidéos en ligne pour présenter les produits. A l’exception de quelques pays africains, la connectivité au large bande semble être une véritable gageure.
Ce sont ces difficultés qui ont déjà fait fuir du marché C’discount et Afrimarket, deux autres champions du commerce en ligne qui se sont essayés sur le continent.
Conséquences. Cette année, en l’espace de 2 mois, Jumia a annoncé la suspension de ses activités au Cameroun, en Tanzanie, et a effectué un licenciement de 30 employés (6% des effectifs) au Kenya. Les plus inquiets sont les petits commerçants affiliés à ce site de vente en ligne. Plusieurs ont été révélés par cette plate-forme. Sa disparution sonnerait le glas des affaires pour ces commerçants.
Cependant, certains observateurs pensent qu’il s’agit plutôt d’une restructuration en vue d’une vente de la société à un éventuel repreneur. Des sociétés comme Amazon ou Alibaba, ne cache pas leurs appétits. Les marchés émergents ont un potentiel énorme. Pour la croissance de ses leaders du e-commerce en Occident et en Chine, un rachat de Jumia serait du pain béni.
Maryse Atsé
(Source : ICT4Africa, 12 décembre 2019)