Un mauvais code des télécommunications en vigueur au Sénégal (Communiqué de presse de l’ODSENT)
jeudi 24 février 2011
Le parlement vient d’adopter sans ambages, conformément à son automatisme que tout le monde lui reconnait, le projet de loi portant code des télécommunications présenté par le ministre des télécommunications.
Passé au crible par les conseils juridiques de l’ODSENT à travers une analyse objective des différentes dispositions législatives, la nouvelle loi qui abroge et remplace la loi 2001-15 du 27 Décembre 2001 modifiée par la loi 2006-02 du 04 janvier 2006 présente plus d’inconvénients que d’avantages.
Il s’agit là d’un nouveau code des télécommunications et des postes, taillé sur mesure clientéliste, sans l’avis des véritables acteurs, que même le ministre des télécommunications, maitre d’œuvre, avait du mal à défendre devant le parlement, parce que, justement, loin d’être neutre, pertinent et exhaustif pour assurer un bon fonctionnement et une juste régulation des services de télécommunications et des postes au Sénégal à la grande satisfaction des usagers.
Ainsi, le bureau exécutif de l’ODSENT a relevé beaucoup d’irrégularités dans la conception, l’applicabilité et surtout la transition des différentes dispositions législatives.
Un bon code des télécommunications et des postes doit non seulement refléter une réalité nationale mais aussi et surtout apporter des solutions techniques et juridiques nécessaires à la construction d’une bonne société nationale de l’information en relation avec son environnement sous régional.
Pour une perception fine des réalités sénégalaises sur l’état des lieux des télécommunications, mais surtout sur l’urgence de trouver des ressources immédiates, l’ODSENT propose une relecture des documents produits par l’ENTIC (Enquête Nationale sur les Technologies de l’Information et de la Communication au Sénégal), publiée en mars dernier par l’ARTP qui ont montré, entre autres statistiques, que le Sénégal a un taux de connexion Internet de 4%, que 85, 5% des ménages ne disposent pas de l’outil Internet, que 72% de la population du monde rural font plus de 5 km pour obtenir une connexion Internet et que les démarches administratives n’étaient pas connues des populations.
Laquelle enquête recommande, urbi et orbi, le financement des télécommunications et des tics, plongé dans un marasme général.
Comment comprendre que dans un tel contexte de rareté des ressources, de fracture numérique poussée, de connectivité nulle, que le code des télécommunications et des postes recommande de financer l’énergie et l’audiovisuel par le fonds destiné au développement à l’accès universel (art : 90) ?
L’ODSENT rappelle que des milliers de villages sur les 14.000 que compte le Sénégal, sont pourtant bien électrifiés et couverts par l’ADSL, grâce à la Sonatel, mais malheureusement ne sont pas connectés faute de moyens, le prétexte évoqué par le ministre reste donc erroné car la crise de l’énergie, conséquence d’une mauvaise gestion calamiteuse, n’est pas forcément la cause de la fracture numérique.
Pourquoi les ressources des télécommunications devraient-t-elles venir au secours de l’énergie ? En quoi les télécommunications sont elles responsables des problèmes énergétiques dans ce pays ?
La mutualisation des ressources du fonds de développement du service universel pour le secteur de l’énergie demeure un sabotage en règle, un mépris coupable du secteur des télécommunications qui traverse déjà une profonde crise de financement ?
Macky SALL, Me Madické NIANG, Samuel SARR et autres anciens ministres de l’énergie n’ont jamais bénéficié de cette loi, largesse de circonstance, aux moyens institutionnels et financiers inouïs mis à la disposition du fils du Chef de l’Etat.
En réalité dans ce pays, il ya de l’argent que pour Karim WADE, mettant en ébullition tous les secteurs d’activité (enseignement, santé, transport, militaires retraités, justice, etc.).
C’est pourquoi l’ODSENT dénonce énergiquement cette mutualisation injuste et budgétivore qui ne constitue rien d’autre qu’une seconde fracture à la connectivité des technologies numériques et à l’accès universel.
L’ODSENT fustige la complexité du code qui appelle à la signature d’innombrables décrets d’application dont leur publication souvent tardive réduirait incontestablement le développement des services de télécommunications et des postes quand on sait que plusieurs lois restent inappliquées depuis longtemps faute de décrets.
L’ODSENT constate que l’indépendance de l’ARTP ne pourrait être une réalité avérée tant qu’elle sera sous la tutelle de la Présidence de la République même si elle passe d’un statut d’établissement publique à celui d’autorité indépendante (art : 183).
L’ODSENT note que le texte protège plus les agents de l’ARTP par la conservation de leur statut personnel ainsi que leurs droits et avantages acquis (art 184) au détriment des intérêts des acteurs et des usagers.
L’ODSENT dénonce le mutisme du texte sur un éventuel calendrier de contrôle et de vérification des comptes, assujetti à l’obligation d’informer (art : 180) car pour des raisons de transparence, d’éthique et de développement, un contrôle annuel de la gestion des ressources de l’ARTP devait être confirmé.
L’ODSENT rappelle que la nouvelle Direction Générale de l’ARTP, sous l’autorité de M. NDongo DIAO a manqué carrément de transparence en faisant un black out total dans son rapport annuel sur l’exécution budgétaire de l’année 2009, contrairement au rapport 2007 produit par son prédécesseur Mr Daniel Goumalo SECK.
L’ODSENT s’offusque également que les 2/3 des excédents budgétaires de l’ARTP soient versés dans le compte du trésor public (art 173) au moment où la commission nationale de la connectivité, qui a nécessité la création d’un ministère d’Etat rattaché à la Présidence de la République, reste sans budget ?
L’ODSENT s’étonne de constater qu’après dix (10) ans de recouvrement du fonds de développement du service universel des télécommunications, conformément aux instructions de la loi 2001-15 du 27 décembre, l’ARTP refuse toujours de publier le montant du FDSUT.
Dakar, 24 février 2011
Le Bureau exécutif de l’ODSENT
(Source : Organisation des distributeurs de services numériques et de télélcommunications, 24 février 2011)