L’éducation à l’innovation par les usages et à l’économie numérique, le 1er levier de la transformation digitale
lundi 20 juin 2016
L’économie numérique va-t-elle accélérer l’appauvrissement des citoyens
Africains ?
Cette question va certainement à contre-courant de toutes les projections de tous bénéfices qu’espèrent engranger la plupart des acteurs sociaux-économiques en Afrique.
Mais, elle mérite d’être posée car les télécommunications mobiles ont été introduites en Afrique dans les années 2000 et, aujourd’hui 16 ans plus tard, l’Afrique a atteint un taux de pénétration moyen autour de 100%, notamment au Sénégal qui a atteint un taux de 113,66% en mars 2016 (Source W Projetel/SISAROMA, basée sur données ARTP Sénégal).
Qu’en est-il réellement de la richesse engrangée au bénéfice de la population
sénégalaise ?
1. La consultation d’internet est-elle fonction de l’âge ?
2. Qu’est ce qui est mis comme dispositif par les opérateurs pour s’assurer du respect des droits des usagers des TIC ?
3. Vers qui se tourner pour demander réparation en cas d’abus ou d’erreur ?
4. Les conditions sont-elles véritablement réunies pour une numérisation à grande échelle de l’économie sénégalaise ?
5. Un Sénégal émergent passe-t-il aussi par une économie collaborative basée sur le partage des ressources et des connaissances ?
6. Quels sont les risques et les dangers des TIC sur nos sociétés et nos rapports sociaux, tant dans le domaine éducatif, professionnel que familial ?
7. Quels avantages et bénéfices pouvons-nous en tirer dans ces domaines ? Sommes-nous prêts pour la numérisation de l’économie ?
8. Les opérateurs sont-ils assez innovants en matière de nouveaux usages ?
Voici un ensemble de questions que devraient certainement se poser un
internaute averti au Sénégal.
Le numérique c’est la consommation des contenus, mais également leur
production
Avec la vulgarisation d’Internet Haut débit 3G et la démocratisation des smartphones, les sénégalais sont devenus de très grands consommateurs du numérique. Mais 99% de cette consommation de contenus est produite hors du Sénégal.
A chaque fois qu’un Sénégalais consomme actuellement du numérique, il s’appauvrit encore plus car la création de valeur s’en va à l’extérieur.
Par conséquent, sans création de valeur contextualisée (contenus locaux), l’économie numérique pourrait accélérer l’appauvrissement des sénégalais. D’où la nécessité d’inciter et de soutenir la création de contenus africains qui seront consommés par les africains eux-mêmes, c’est ainsi que la création de richesse africaine va s’accroitre et surtout créer des emplois locaux et durables.
Tout ceci passe préalablement par l’éducation de la demande et du marché sénégalais, puis par la production des contenus sénégalais. Depuis toujours, le Sénégal a souhaité se positionner comme un leader en Afrique, en matière de TIC.
Au cours de la période 2006-2010, le pays a pu réduire progressivement la fracture numérique, grâce à un réseau en numérisation, une bonne pénétration de la téléphonie mobile, une extension de la couverture du territoire par les différents réseaux de télécommunication et une baisse régulière du ticket d’entrée accompagnée de campagnes de promotions régulières des différents opérateurs.
Depuis les annonces faites autour des autoroutes de l’information dans les années 1990, des programmes « intranet gouvernement », de « désenclavement numérique » pour combler le gap numérique entre les localités du pays, de développement du « service universel » avec la mise en
place du fonds de développement du service universel des télécommunications, de « e-learning » à l’intention des agents de l’administration publique, de formation des Jeunes aux métiers des TIC (PSFJMTIC) des années 2000, ou plus récemment de la Stratégie « Sénégal numérique », le mythe d’une société sénégalaise dorénavant qualifiée de « numérique » est plus fort que jamais.
L’Economie numérique a le vent en poupe
L’Etat, les Usagers et les Entreprises sont en plein développement. En 2016, tout le monde parle de l’économie numérique mais peu de gens savent de quoi il s’agit.
De quoi souffre l’écosystème des TIC au Sénégal ?
Qu’est-ce qu’un bon usage d’internet de nos jours ?
Avons-nous assez pris conscience du world wide web, du big data, de la cybercriminalité, de l’IoT,… ?
Les politiques s’adaptent ellesaux usagers et répondent-elles aux demandes et besoins de chaque type de public dans son quotidien ? Les risques d’internet chez les jeunes sont-ils bien pris en compte ?
Sommes-nous assez formés pour faire face à cette économie numérique ? …
En effet, nous sommes confrontés à l’accélération de la 3ème révolution industrielle qui n’est pas seulement la révolution du numérique, mais il s’agit de la convergence entre les nanotechnologies, les biotechnologies, la deuxième vague de l’informatique et de l’utilisation massive des données c’est-à-dire l’internet des objets, le big data, en passant par le Cloud Computing et l’intelligence artificielle …
La convergence de toutes ces technologies et leurs usages bouleverse les conditions de la production, la structure sociale et nous oblige à trouver un autre compromis social. L’économie numérique va littéralement se propager dans l’écosystème sénégalais.
Mais la convergence pour les consommateurs, c’est celle qui lui donne la possibilité de regarder des films ou des programmes télé sur sa télévision mais aussi sur son ordinateur portable, sur son téléphone mobile ; c’est aussi la possibilité de ne pas être contraint par des horaires de diffusion, et de faire en sorte que la diffusion de contenus s’adapte à son propre emploi du temps et non l’inverse comme c’était le cas jusqu’à présent ; c’est enfin la possibilité d’accéder à une très grande variétés de contenus d’origines diverses : consultation très importante par exemple des vidéos réalisées par des internautes : succès de You Tube, Daily Motion.
Les technologies numériques font pleinement partie de la vie quotidienne des citoyens sénégalais qui les utilisent chaque jour pour leurs études (TICE), pour l’administratif (Dématérialisation, eGov) ou pour leurs cultures et loisirs (programmes audiovisuels, réseaux sociaux).
Ils en auront besoin demain pour vivre, étudier, se soigner et travailler dans une société profondément transformée par les usages du numérique, de l’internet et des réseaux sociaux, et dont la plupart des nouveaux métiers, à l’horizon de 2050 (n’existent pas encore aujourd’hui). Les usages de ces technologies fourniront à la très grande majorité de ces jeunes citoyens, les compétences nécessaires pour leur orientation et vie professionnelle future.
Une nouvelle responsabilité pour l’Etat serait de faire acquérir aux élèves et étudiants les savoirs et les compétences « numériques » qui leur permettront de vivre demain en citoyens libres et responsables, autonomes et créatifs, capables de collaborer, de participer et d’échanger, en leur permettant d’acquérir une maîtrise suffisante des nouveaux langages et modes d’expression et de production induits par les outils numériques.
Issue des éléments de réponse de l’étude « African Digital Touch’ » réalisée par les cabinets W-PROJETEL (Sénégal), SISAROMA (France, Cameroun, Cote d’ivoire) et en collaboration avec les associations Solidarité Francophone pour le Numérique (France, Afrique francophone) et l’Association Sénégalaise des Utilisateurs des TIC – ASUTIC Sénégal), structures spécialisées dans les TIC, la grande tendance à surveiller en matière d’économie numérique se résume en :
« des usagers informés et actifs en ce qui concerne les Technologies d’aujourd’hui et de demain »
En conclusion de l’étude, nous pensons que la maîtrise des TIC nécessite une sensibilisation et une formation généralisée des usagers car cette génération internet, ignore le numérique. En effet, en matière de TIC, il faut d’une part un équilibre entre les territoires, mais aussi un équilibre de compréhension entre les Opérateurs-producteurs, l’Etat-régulateur et les Usagers-consommateurs afin qu’ils comprennent de la même façon l’écosystème des TIC. La solution trouvée est la sensibilisation, la formation et la collaboration participative. Les
TIC sont indispensables au bon fonctionnement des gouvernements, aux services citoyens et à l’économie. A l’image de structures comme Gaïndé 2000 qui dispose d’une expertise avérée dans le domaine de la dématérialisation des procédures douanières, l’Etat du Sénégal doit favoriser l’émergence de centaines de « Gaïndés » aptes à faire face à la concurrence extérieure et à créer de la valeur ajoutée pour contribuer à la croissance.
En effet le digital est une caractéristique en plein essor, un secteur stratégique de l’économie dont la contribution totale sur la croissance, composée d’un effet direct via l’accumulation de capital numérique et l’effet indirect mesuré par la diffusion du capital numérique dans le système productif, est non négligeable. Dans un contexte de mondialisation et de concurrence des pays développés, la question de former des générations plus actives, plus dynamiques conscientes des enjeux, est plus qu’urgente.
Abdoul Aziz Wane
Président Solidarité Francophone pour le Numérique/DG WPROJETEL
(Source : Social Net Link, 20 juin 2016)