’ICANN a choisi un Suédois, Göran Marby, pour être son nouveau directeur. Il devra accompagner l’indépendance promise par les États-Unis au système de DNS racine sur lequel repose le Web.
Est-ce un signe politique, au moment où l’ICANN vit une transition très importante, qui doit assurer son indépendance vis à vis des États-Unis ? Pour la première fois depuis la création de l’Internet Corporation for Assigned Names and Numbers (ICANN) en 1998, l’institution sera bientôt dirigée par un Européen, après le départ de Fadi Chehadé dont le mandat arrive à son terme le 15 mars 2016.
L’ICANN a en effet annoncé avoir choisi comme nouveau directeur le Suédois Göran Marby, qui dirige actuellement l’Autorité suédoise des postes et des télécoms (PTS). Marby occupait la direction de la PTS depuis janvier 2010, et avait été reconduit pour un second mandat en octobre 2015. Il devra désormais quitter son poste pour aller s’installer avec sa famille à Los Angeles.
« Son expérience en tant que PDG d’une entreprise technologique et fondateur d’une start-up, ainsi que son expérience actuelle au poste de directeur général de l’Autorité suédoise des postes et des télécommunications, ont une valeur inestimable pour l’ICANN dans ce nouveau chapitre de son histoire », s’est réjoui dans un communiqué le Dr Stephen Crocker, président du Conseil d’administration de l’ICANN.
Accompagner l’indépendance de l’IANA
Avant de diriger le régulateur suédois, Marby avait été le directeur de la la filiale de Cisco en Suède, PDG de Cygate, PDG d’Unisource Business Networks, et co-fondateur et président de la société AppGate Network Security.
L’une des principales missions de Göran Marby sera d’accompagner la transition de l’IANA (Internet Assigned Numbers Authority), une composante de l’ICANN qui a en charge l’administration du DNS racine utilisé pour lier des adresses IP de serveurs à des noms de domaine. Son importance est très stratégique, puisque c’est à travers l’ICANN que sont mis en place les nouveaux noms de domaine parfois très contestés, comme le fameux .vin qui a soulevé l’indignation française.
Depuis 1999, les fonctions de l’IANA sont confiées à l’ICANN par la National Telecommunications & Information Administration (NTIA), c’est-à-dire par l’administration américaine qui place ainsi une partie brique essentielle du Web sous tutelle — même si formellement rien n’oblige les FAI et autres intermédiaires techniques à respecter les décisions de l’ICANN, en pratique il est difficile de faire autrement.
Soucieux d’apaiser les esprits suite à l’échec du traité de Dubaï sur la gouvernance d’Internet, les États-Unis avaient annoncé en 2014 leur intention de confier rapidement les fonctions de l’IANA à une organisation internationale qui ne serait plus une soumise au gouvernement américain.
Une nouvelle gouvernance pour l’ICANN
Alors que la transition aurait dû être achevée en 2015, elle est toujours en cours et fait l’objet d’intenses négociations pour s’assurer de l’indépendance réelle de l’ICANN, à travers le mode d’adoption des décisions et le poids donné aux différentes représentations nationales par rapport aux parties privées, dont les plus importantes restent américaines.
Un accord de principe est en cours de finalisation, qui pourrait permettre de mettre fin au contrat entre l’ICANN et le gouvernement américain le 30 septembre 2016.
L’organisation devrait rester chargée des fonctions techniques de gestion du DNS, sous le contrôle d’un conseil d’administration de 16 membres, dont au moins un de chaque région du monde (Europe, Asie-Pacifique, Amérique Latine, Afrique, Amérique du Nord).
(Source : Numérama, 9 février 2016)