Dans le monde, en deux ans depuis 2019, plus de 782 millions de nouveaux internautes ont été enregistrés, suscitant ainsi un intérêt accru pour la cybercriminalité. Un rapport de l’ONU de 2020 fait état d’une augmentation de la cybercriminalité, avec 7 000 violations de données enregistrées pour la seule année de 2019, exposant plus de 15 milliards d’enregistrements. Le coût de telles violations devrait dépasser les 5 000 milliards de dollars d’ici 2024. Face à ces sombres prévisions, les experts lancent des mises en garde sur le fait que l’Afrique, tout comme le reste du monde, devrait examiner de manière objective des solutions susceptibles de lui permettre de garder une longueur d’avance.
Cette semaine, alors que le monde célébrait la Journée pour un Internet plus sûr, il a été impossible d’occulter les réalités statistiques concernant la pénétration d’Internet en Afrique, qui s’élève actuellement à 22 %. Bien que se trouvant très loin derrière le reste du monde, 22 % des 1,4 milliard d’Africains représentent le nombre considérable de personnes dont Internet façonne la vie au quotidien ponctuée de transactions financières, d’achats, de déplacements à l’aide de cartes, de rapports avec des amis, la famille et les proches, de travail, de divertissements, entre autres activités.
Toutes ces activités impliquant le partage de données, — selon un article de la Chronique de l’ONU — cela suppose également que nos informations personnelles sont de plus en plus exposées aux attaques et aux utilisations abusives. Le nombre d’attaques auxquelles nous sommes confrontés concerne malheureusement parfois la structure institutionnelle. Brad Smith, président et directeur juridique de Microsoft en 2017, a ouvertement dénoncé cette situation lors de la 10ème édition de la série de conférences de Genève. « Une course aux cyberarmements est en cours avec des nations, développant et multipliant une nouvelle génération d’armes destinées aussi bien aux gouvernements qu’aux personnes civiles », a déclaré M. Smith. Selon lui, cet état des choses met en péril les données critiques et l’infrastructure numérique dont nous dépendons tous dans notre vie quotidienne.
Position soutenue également par M. Smith, et accueillie favorablement par beaucoup d’entre nous qui sommes impliqués dans le leadership dans les TIC, en l’occurrence, l’Union africaine des télécommunications (UAT) ; est que l’avenir de la cybersécurité sur Internet nécessitera de nombreuses mesures à prendre par plusieurs personnes. Le renforcement des niveaux de coopération entre les différents acteurs de cet écosystème, sans oublier la contribution des individus, représente notre meilleure chance d’effectuer une percée.
La coopération à grande échelle est le cheval de bataille de l’UAT et de nombreuses autres institutions à travers l’Afrique ayant un vif intérêt pour la cybersécurité. En 2007, lorsque l’Union internationale des télécommunications (UIT)) a lancé le programme mondial de cybersécurité de l’UIT conçu pour la coopération et l’efficacité, encourageant la collaboration avec et entre tous les partenaires concernés, l’UAT est devenue et continue d’être un partenaire de mise en œuvre englobant des programmes tels que l’initiative de protection en ligne des enfants.
Bien que statistiquement, le monde virtuel d’Internet occupe toujours la deuxième place derrière le monde réel, en tant que lieu permettant d’accomplir des tâches quotidiennes ou de profiter de loisirs, les deux ne sont pas en concurrence et, de la même manière que nous nous employons à assurer la sécurité dans le monde réel, nous devons accorder la même attention, voire davantage au cyberespace. Cela est d’autant plus vrai qu’au cours de la dernière décennie, les pays africains, en collaboration avec divers partenaires locaux et internationaux, ont accompli d’énormes progrès pour rendre Internet accessible aux 1,4 milliard d’habitants du continent.
Tout le monde s’accorde à reconnaitre l’accroissement de l’importance de l’Internet dans le monde d’aujourd’hui. De récentes estimations de la Banque mondiale ont permis de quantifier cet intérêt et ont laissé entendre que l’Afrique aura besoin d’un investissement global de 100 milliards de dollars pour connecter chaque citoyen à Internet d’ici 2030. Déjà, la voie vers ces 100 milliards de dollars est en train d’être tracée, avec en tête le géant américain de la technologie Google, qui a annoncé en octobre dernier son intention d’investir 1 milliard de dollars en Afrique au cours des cinq prochaines années. Cela signifie que le nombre de personnes qui aura besoin de protection dans le cyberespace augmentera, et donc la capacité du pare-feu que nous créons, devra être encore plus forte.
Par conséquent, l’année prochaine, comme l’année dernière et les années précédentes, le 8 février prochain fournira certainement au monde l’occasion de commémorer une autre parmi les nombreuses journées pour un Internet plus sûr. La question qui doit nous tarauder doit tourner autour de l’engagement du jour, et on pourrait se demander si nous allons une fois de plus étudier des possibilités d’accomplir des progrès ou bien évaluer les progrès réalisés. À cet égard, la cybersécurité, de l’avis de l’Union africaine des télécommunications, est un sujet qui nécessite moins de paroles et davantage d’actions. Après tout, ne porte-t-elle pas le fardeau de nos vies ?
John Omo, Secrétaire général de l’Union africaine des télécommunications
(Source : La Nouvelle Tribune, 10 février 2022)