Internet : une opportunité pour se développer ou une bombe de destruction massive de nos modes de vie ?
dimanche 20 novembre 2016
Selon WIKIPEDIA le terme « Internet » est d’origine américaine et dérivé du concept d’internetting (en français : interconnecter des réseaux) dont la première utilisation documentée remonte en octobre 1972 par Robert E. Kahn au cours de la première ICCC (International conférence on computer communication à Washington. En effet, les origines exactes du terme « Internet »restent encore à déterminer. Cependant, c’est le premier janvier 1983 que le nom « Internet » déjà en usage pour l’ensemble d’ARPANET et de plusieurs réseaux informatiques, est devenu officiel.
Jadis, le continent africain pour des raisons multiples notamment géographiques n’a pas pu prendre part activement à la révolution industrielle. La mer et l’océan ont été les véritables obstacles naturels qui ont confiné les africains dans les limites physiques du continent africain au moment où la révolution industrielle qui allait changer le destin des européens notamment celui de l’humanité se déroulait par au-delà les mers et les océans en Europe.
Des siècles après, l’avènement de « l’internet » a pulvérisé les obstacles naturels et les frontières entre les pays et entre les continents en basculant le monde dans un village planétaire où l’homme devient citoyen du monde. Viennent s’ajouter à cela les corollaires révolutionnaires et transformationnels de « l’Internet » à savoir : la démocratisation de l’accès aux différents savoirs et les possibilités accrues du citoyen du monde d’entreprendre. L’économie numérique est née en créant de nouveaux chefs d’entreprises, de nouveaux types de métiers contribuant ainsi à la réduction du taux de chômage et au développement économique, social et culturel mondial.
Au Sénégal, l’analyse rapide de l’usage de « l’Internet » particulièrement des réseaux sociaux montre que les gens confondent souvent vie privée et vie publique, s’en fichent de l’éthique et du respect de la dignité humaine des cadavres de nos morts et créent frénétiquement des albums de souvenirs et de formes d’existence dans les réseaux sociaux.
1. Vie publique et vie privée
C’est connu presque de tous, mal préparés à l’usage correct de « l’Internet » suivant l’effet de mode en ignorant totalement les conséquences de leurs actes dans les réseaux sociaux, certains internautes n’arrivent pas à faire la différence entre vie privée et vie publique au point certains éléments de leur vie privée se retrouvent dans leur vie publique. Ils mettent en ligne (Facebook, Google + twitter, Instagram, WhatsApp, et YouTube etc.) toute image qui tombe entre leurs mains. Ils ne peuvent mesurer l’immensité des conséquences qui résulteraient d’un tel usage de « l’internet » sur leur vie futur.
Ainsi, à la lumière des comptes rendus des journaux sur les faits divers, on note deux types de profil d’usagers correspondant à deux types de situation observée. Première situation : c’est le cas du citoyen du monde qui poste lui-même de son propre chef des images à caractère privé de sa famille ou de lui-même en tant que individu consciemment ou inconsciemment dans les réseaux sociaux. A quelle fin ? Lui seul peut répondre à cette question. Deuxième situation : les images à caractère privé sont postées par quelqu’un d’autre dans l’intention de nuire à autrui, c’est le cas des affaires de DIOMBASSE DIAW de Matam, de l’adjoint au Maire de la Médina, des jeunes filles de Grand Yoff et des Parcelles assainies jouant à la pornographie et de « Goudi Town » etc.
Ce que je pense, enregistrer quelqu’un ou le filmer ou le photographier à son insu dans une situation privée et s’en servir comme élément de chantage ou mettre le produit en ligne dans le sens de détruire l’image d’autrui est un acte ignoble et criminel qui doit sévèrement être puni. Par ailleurs, quel que soit le réseau social ou le moteur de recherche utilisé par l’internaute (Facebook, twitter, WhatsApp, Instagram, Google et YouTube) il est important pour celles et ceux qui ne savent pas de quoi il s’agit, de s’approcher de la commission nationale des données personnelles pour savoir plus sur ses droits et obligations à l’aune de l’encadrement juridique mis en place par l’Etat du Sénégal pour les protéger.
2. Mépris de l’éthique et non-respect de la dignité humaine des cadavres de nos morts
Si les morts pouvaient parler, ils auront beaucoup à reprocher aux vivants notamment à leurs parents, à leurs sympathisants et aux medias qui versent dans le sensationnel à l’occasion de leur cérémonie funéraire. Ils sont morts ne pouvant rien dire, rien faire, on les filme ou on les photographie comme on veut. Personne ne parle. Comme si c’était naturel.
On est en présence, au jour d’hui, non sans le regretter d’un nouveau type de paparazzi qui ne guette pas les vivants mais les cadavres des morts pour les photographier ou les filmer à toutes les étapes. Au lieu de se recueillir et penser à sa propre mort, en tant que sujet mortel, ce à quoi on assiste, c’est des gens, qui des individus « lamda » avec leur téléphone portable, qui, de photographes professionnels officiant pour des journaux munis de leurs appareils photo qui tirent sur les cadavres de nos morts sans oublier les caméramans de télévision qui font des prises de vues sans demander la permission à personne. Pourquoi ? Et à quelle fin ?
Or la plus part de ces images sont retrouvées dans les réseaux sociaux telles quelles ont été prises sans aucune forme de modération. Cela dénote, ce que je crois, le changement profond qui s’est opéré dans notre société, notamment dans notre sensibilité en tant que société et notre rapport à la mort, es qualité de personnes mortelles. Jadis, les gens avaient peur de la mort, c’est-à-dire des cadavres, de nos jours, notre rapport à la mort en milieu urbain particulièrement a beaucoup changé. La mort est devenue malheureusement un objet de curiosité mis en scène et une cible du nouveau type de paparazzi et de caméraman.
A titre d’exemple, les images des dépouilles de Papa WEMBA (non drapé), de Demba DIA (drapé), de Deguene Chimère DIALLO (drapée) sont exposées sur le net sans que cela n’indigne personne comme si, nous sommes tétanisés contre la mort, incapables de sympathie, sans morale et sans éthique. Les dépouilles de nos morts sont mitraillées par les appareils téléphoniques et photo et les cameras sans leur consentement et sans celui de leurs parents, de la prière mortuaire en passant par le chemin qui les conduit au cimetière et jusque dans la tombe. Au juste, qui sommes-nous devenus ? Même les blancs que nous imitons n’agissent pas comme ça avec leurs morts. Bref ! Les cadavres de nos morts, ne méritent-ils pas plus de respect ? A mon avis, si l’Etat doit prendre des mesures pour interdire cette pratique qui n’honore pas nos morts, pour autant, les professionnels du secteur ne doivent pas faire l’économie de la réflexion sur le devenir de leur métier respectif.
3. Recherche frénétique d’images de souvenirs et de formes d’existence
On peut observer sans difficultés que chaque évènement de la vie humaine se présente, au jour d’hui, comme une occasion pour le citoyen du monde pour créer son propre album de souvenirs c’est-à-dire pour marquer sa présence et communiquer sur les réseaux sociaux. Tous les moyens sont bons pour y arriver. Et chacun y va de son feeling, de son intention de communiquer et du type d’appareil dont il dispose (téléphone, tablette, appareil photo) pour figer à jamais son histoire personnelle.
Ces photos ou images que le citoyen du monde partage avec ses amis ou le monde entier selon le réseau, lui confèrent une forme d’existence publique dans les réseaux sociaux et de reconnaissance à travers la mention « j’aime » ou de libre commentaire souvent dithyrambique dans son journal. En substance, le citoyen du monde devient auteur, metteur en scène et acteur de sa propre vie. Il témoigne au même titre que les journalistes des évènements auxquels il participe mais avec des objectifs différents. Il ne se contente plus de consommer l’information, il devient un fournisseur c’est à dire un « journaliste citoyen » dont personne ne reconnait le statut. Enfin, si « l’Internet » est une opportunité à saisir par les pays africains pour se développer, il est également une bombe de destruction massive de nos modes de vie.
Baba Gallé DIALLO
Email : bbgd70@yahoo.fr
(Source : Senenews, 20 novembre 2016)