Fara Diaw, Coordonnateur national de l’Ong Raes : « Nous contribuons à la réduction de la fracture numérique »
samedi 20 octobre 2007
Le Coordonnateur national du Réseau africain de l’éducation pour la santé (Raes), Fara Diaw se félicite de la « Mention spéciale » décernée à son organisation dans la catégorie « e santé » par le Sommet mondial de l’information. Il souligne que la démarche du Raes est une contribution à la réduction de la fracture numérique prôné par le chef de l’Etat, Me Abdoulaye Wade.
L’Ong Raes vient d’être primée par le sommet mondial de l’Information. Comment avez-vous accueilli cette distinction internationale ?
Le Réseau africain de l’éducation pour la santé (Raes) est un laboratoire multimédia dont la mission est de former, d’informer et de fédérer. Toutes nos actions reposent sur ce triptyque. Nous avons d’abord commencé par développer des projets pilotes pendant ces trois dernières années. Maintenant, on a eu des acquis et à partir de 2008, on va passer à la phase de développement à grande échelle. Pourquoi former ? On s’est dit que les jeunes, les professionnels de la santé et de l’éducation doivent être à même d’utiliser les nouvelles technologies de l’information et de la communication pour s’exprimer. Nous avons décidé de réaliser une plate-forme et un portail Internet qui est destiné aux professionnels de la santé, de l’éducation qui peuvent être des promoteurs de la santé, les journalistes spécialisés en matière de santé, au grand public. Pour toutes ces cibles, nous sommes en train de voir comment développer des contenus qui leur sont destinés en Français, sur plusieurs sujets de santé : les maladies, les politiques de santé etc. Nous voyons comment ils peuvent échanger entre eux à travers cette plate-forme pour que les malades qui sont dans les associations puissent exprimer leur vécu. Cette plate-forme nous a permis de remporter le prix de la catégorie « e santé » pour toute la région africaine. C’est un prix du Sommet mondial de l’information. Il y avait 650 participants venant de 160 pays. Pour l’Afrique, nous avons remporté la mention spéciale du meilleur contenu dans la catégorie « e santé ». Dans le secteur de la santé, il y a beaucoup d’acteurs. Nous avons mis en place une plate-forme pour que tous ces acteurs aient une visibilité, qu’ils soient des acteurs étatiques, des agences internationales, de la société civile, les associations. Nous voulons qu’ils puissent prendre des contenus et montrer leurs actions et leurs pratiques.
Dans cette collecte d’informations, nous nous sommes dit qu’il faudrait que des Africains puissent offrir de la formation tout en s’ouvrant à l’extérieur et aussi concevoir des messages faits par des Africains et pour des Africains. Quand j’étais journaliste, je cliquais sur des sites Internet pour documenter mes articles. Nous nous sommes dit qu’il faut développer le portail pour donner des informations faites par les Africains et pour les Africains.
Quelles sont les actions concrètes que peut apporter ce projet dans la lutte contre la fracture numérique ?
D’abord, il faut dire que c’est un projet qui a été soutenu par le président de la République depuis 2003. Il nous a reçus et nous avons commencé à développer des projets pilotes. Le portail que nous avons développé fait partie de ces projets pilotes. Le président a fait le plus grand plaidoyer en matière de solidarité numérique devant les grandes instances internationales. Ce qu’on a réalisé est une contribution à la réduction de la fracture numérique. Nous développons un module de formation à distance pour la maîtrise de l’outil informatique. On a fait pour des professionnels de la santé, des acteurs de la société civile, des éducateurs de la santé et on est en train de le faire à Fatick actuellement pour des acteurs des collectivités locales et des enseignants. On les aide à pouvoir utiliser l’outil informatique et à partir de cette maîtrise, ils pourront pénétrer dans le portail pour puiser de la documentation. Ils pourront également acquérir de nouvelles compétences dans leurs activités professionnelles. Ce sont là les objectifs poursuivis à travers le projet.
Ces objectifs ont-ils connu une réussite ?
Ça a réussi. Nous avons testé la formation à distance entre Los Angeles et Dakar. Le projet a plusieurs partenaires. Il y a trois universités américaines : Californie de Los Angeles, Californie du sud et Oyola, une petite université privée. Ces trois universités rivales ont adhéré à ce projet. Au Sénégal, il y a le Cesti, la Faculté de médecine, l’Ecole nationale de développement social et sanitaire et d’autres acteurs de la société civile. Les deux entités ont formé des groupes de réflexion pour voir comment à travers l’outil informatique on peut permettre à une grande masse d’Africains d’accéder aux nouvelles compétences et aussi de leur permettre de produire des contenus.
Quelles sont les priorités prises en compte dans ces contenus ?
Nos priorités sanitaires sont les premières choses que nous avons eu à prendre en compte dans la plate-forme. Dans la version béta que nous avons mise en place, les premiers contenus ont trait au paludisme. Nous l’avons traité de différentes formes. On a montré ce que c’est le paludisme, les possibilités de l’éviter, les moyens les plus efficaces de le traiter, les bonnes pratiques et les mécanismes du Programme national de lutte contre le paludisme aussi bien en Français et en langue Wolof. Nous avons interrogé sur le portail des chefs religieux qui ont donné leurs avis. Il y a aussi des scientifiques, des malades qui ont témoigné. Nous avons permis à des gens qui dirigent des associations de malades d’avoir leurs blocs pour donner leurs impressions. C’est une plate-forme qui permet à des gens de s’exprimer librement sur des questions de santé et de différentes façons.
Quel impact pourrait avoir ce prix dans vos interventions ?
Nous sommes à la version béta et nous nous sommes dit que ce prix est un prétexte qui va nous permettre de mieux vulgariser nos actions. Nous allons faire une conférence de presse. Nous avons commencé à réfléchir sur une stratégie de marketing pour montrer aux gens comment nous avons acquis tous les outils que nous avons mis en place. Il s’agit de montrer comment ils peuvent acquérir ces outils, se l’approprier et renforcer leurs capacités. Le prix nous montre que nous sommes sur la bonne voie. Nous avons réussi les objectifs que le président nous avait fixés. Nous avons suscité un engouement extraordinaire parmi les grands professionnels de la santé. Nous avons reçu beaucoup de félicitations. Nous voulons aller plus loin. Nous sommes en train de voir comment mixer la radio et Internet pour permettre une démultiplication plus démocratique de l’information. Nous sommes en train de voir les possibilités de développer des contenus plus adaptés à notre culture. Notre démarche entre en droite ligne de ce que défendait notre compatriote Amadou Mactar Mbow : le nouvel ordre mondial de l’information. Ce sont des Africains qui vont développer des contenus pour des Africains. Nous allons contribuer à amener les Africains à créer des contenus et les mettre en ligne pour que chaque communauté puisse être au courant des bonnes pratiques dans les autres pays du continent. Nous voulons étendre le projet dans les pays africains. Notre ambition est d’aller plus tard vers le Mali, la Guinée, le Niger, le Cap vert pour montrer les expériences.
Eduquer à travers des pièces de théâtre
Les responsables du Raes n’entendent pas se limiter seulement à la plate-forme qui a permis l’octroi d’un prix international. Selon le coordonnateur Fara Diaw, en 2008, le projet va se lancer dans l’éducation par le divertissement. Cette politique sera mise en œuvre sur trois ans. Il s’agit, selon lui, d’éduquer à travers des pièces de théâtre diffusées à la radio. « L’objectif est de faire comprendre les bonnes pratiques en matière de santé. C’est une stratégie qu’un Mexicain, Michael Sabido a créée. Il y aura une large diffusion dans les langues nationales », a déclaré M. Diaw.
Selon Fara Diaw, le Raes développera aussi une formation à distance pour le renforcement de capacités par Internet en communication pour la santé de 250 agents de santé. Il y aura également des activités de renforcement de capacités par radio pour des milliers d’agents, selon lui.
Le coordonnateur souligne que tout ce que l’Ong fait entre dans le cadre des objectifs de politiques nationales de santé au Sénégal. « L’Etat est le premier partenaire stratégique du projet. Le gouvernement a subventionné les trois premières années de phase pilote. Il y a aussi les fondations privées, l’Usaid, les agences des nations unies etc », déclare-t-il. Et M. Diaw d’affirmer que le Raes « ira plus loin avec l’agence de l’informatique de l’Etat qui veut développer avec nous des activités. Ce qui permettra d’élargir l’impact du projet dans tout le Sénégal ».
Babacar Dione
(Source : Le Soleil, 20 octobre 2007)