C’est le chapeau retenu dans cet article de la presse nationale pour traiter ce sujet qui fait monter la fièvre au sein de notre société nationale des télécommunications. En fait, pour mener à bien une transformation dans une entreprise, ce sont plutôt les activités qui sont externalisées : les salariés n’en sont que les dégâts collatéraux... Mais, pourquoi externaliser ?
A l’origine, il s’agissait surtout d’être concentré sur son coeur de métier, ce que l’on sait faire le mieux, en vue d’offrir un service optimal : n’oublions pas que nous sommes dans le domaine des services publics concédés. Il s’agissait de réaliser des gains de productivité pour alléger la facture payée par toute la communauté : obtenir les meilleurs résultats possibles avec le moins de charges. Et au bout, il y a la médaille du meilleur manager : l’autre société nationale qui nous doit du courant à bon marché cherche encore à y parvenir.
Seulement, il y a eu la libéralisation et la privatisation : on a préféré dire l’ouverture du capital après une entrée en bourse réussie et le choix d’un partenaire pour « aider l’entreprise dans sa marche vers les succès à l’international ». Et après, l’on s’est rendu compte que le management hors pair faisait faire des bénéfices très juteux et du dividende à très fort rendement aux actionnaires surtout au partenaire stratégique...
Ainsi, de l’externalisation des activités, on en est venu à celle des employés à qui l’on impose des objectifs derrière lesquels ils courent, ils courent comme des dératés... Jusqu’aux suicides en série : c’est ce qui est arrivé chez le partenaire stratégique en France. Chez nous, on coupe et on ampute jusque dans le coeur de métier : il ne s’agit plus d’être le meilleur sur les métiers de base des télécommunications mais d’être les meilleurs sur la vente des produits et services de télécommunications. Il y a surtout le « mobile banking », Orange money, qui permet avec le miracle du téléphone mobile de mobiliser même l’épargne des gagane-petit. Avec les effets de masse, l’on peut drainer des sommes énormes à l’image de ce qui se passe dans le « crowdfunding »...
Il faut reconnaitre que dans les télécommunications, il y a eu une transformation insidieuse : on y est passé d’un modèle économique dans lequel notre souveraineté et notre savoir-faire étaient affirmés à un nouveau modèle économique. Modèle dans lequel c’est la pleine satisfaction de l’actionnaire au détriment de la communauté nationale qui s’était sacrifiée et a permis d’investir pour constituer des actifs, ces infrastructures de haut niveau technologique construites par les enfants du pays. Et aujourd’hui, nous avons un partenaire qui agit comme s’il était le propriétaire de notre société nationale.
Alors, cette grande question : à qui appartiennent les actifs de Sonatel ? A l’Etat du Sénégal ou à Orange ? Mais surtout, ne devrions-nous pas revenir au modèle originel ? Le combat des organisations syndicales et au delà de la représentation nationale et de toute la société civile devrait porter sur cette problématique. Et non la sauvegarde de quelques emplois.
Momar Gassama
Ingénieur des télécommunications
(Source :Facebook, 12 décembre 2015)