« Escroquerie de haute voltige » sur le trafic international entrant : Le Palais et l’Artp manœuvrent pour le prestataire privé « Global Voice Group »
vendredi 14 mai 2010
Avant même que la clameur et l’indignation soulevées par les 20 milliards de la licence de Sudatel et les 5.000 milliards des Turcs ne s’estompent, une « escroquerie de haute voltige se prépare avec une initiative qui vise à confier la gestion du trafic international entrant à un prestataire privé, Global Voice Group ». L’information émane de l’Intersyndicale de la Sonatel qui a tenu une
conférence de presse avant-hier. Un plan d’action a été élaboré pour contrecarrer les manœuvres de l’Etat et de l’Artp.
On en sait un peu plus les raisons pour lesquelles le directeur général de
l’Agence de régulation des télécommunications et des postes (Artp), Daniel
Goumbalo Seck, a été démis de ses fonctions. Si certains estiment que son
limogeage fait suite à un détournement de plus d’un milliard relevé par
l’Inspection générale d’Etat (Ige), l’Intersyndicale de la Soantel avance
d’autres raisons. Mamadou Aïdara Diop, coordonnateur général de
l’intersyndicale de l’entreprise dirigée par Cheikh Tidiane Mbaye, a révélé
avant-hier, lors d’une conférence de presse, que M. Goumbalo Seck a toujours
refusé de cautionner l’initiative visant à confier la gestion du trafic
international entrant à un prestataire privé « Global Voice Group ». Si l’on
croit M. Diop cela se fait « au mépris des conventions de concession
d’établissement et d’exploitation de réseau des opérateurs existants et des
conventions internationales, notamment celles de Melbourne et l’annexe 4 du
protocole d’accord sur la commercialisation des services de l’Omc. Il faut
noter qu’une opération est en gestation dans notre pays et serait même à un
stade très avancé dans sa mise en œuvre « avec la bénédiction de forces tapies
dans l’ombre afin de se partager à titre privé plusieurs dizaines de milliards
par an en toute impunité et presque sans aucun investissement supplémentaire ».
Ces initiatives, soutient le syndicaliste, ont pu prospérer dans des pays en
difficulté au niveau des institutions du fait d’une instabilité politique
chronique. C’est le cas en Guinée Conakry, en Guinée-Bissau et en Côte
d’Ivoire. C’est plus de 10 milliards par an qui sont en jeu sans aucun impact
sur le développement économique et social du pays (pas d’investissement, pas
d’emplois à créer et perte de recettes).
Les conséquences d’une telle initiative
Les conséquences sont énormes. En résumé, les impacts d’une surtaxe sur le
trafic international entrant et sa gestion par un « Gateway » sont : tarifs
élevés pour les consommateurs du fait de la réciprocité de toute surtaxe sur le
trafic, développement des solutions alternatives (Voip, sim box, by-pass, etc.).
Il s’agit aussi d’un frein au développement du trafic inter Etats malgré les
efforts d’interconnexion des réseaux et des usages des solutions classiques de
communication. Perte du trafic international entrant et de revenus pour les
opérateurs, complexité des relations commerciales, perte de devises et d’impôts
pour les économies nationales, problème de sécurité et de défense nationale car
toutes les communications entrantes sont minorées, le non-respect de la loi sur
le secret des communications (...). Le coordonnateur général de l’Intersyndicale
de la Sonatel affirme que ses camarades vont engager, comme ils l’ont fait dans
le cadre de la vente des actions de la Sonatel, des initiatives de lutte pour
sécuriser le secteur. Un plan d’action est d’ores et déjà élaboré. De l’avis de
l’Intersyndicale de la Sonatel, des actions seront menées dans les prochains
jours pour contrecarrer les manœuvres tous azimuts de l’Etat et de l’Artp. « Sur
cette affaire, nous allons subir les mêmes impacts que les opérateurs qui sont
légalement installés au Sénégal à savoir Tigo et Sudatel. Car le trafic
international que ceux-ci reçoivent passe par le réseau de Sonatel », explique
M. Diop.
Dirigé par Laurent Lamotte, « Global Voice Group » est une société de
télécommunication spécialisée dans les fibres optiques (accès Internet,
téléphones mobiles...), fondé à Port-au-Prince, à Haïti, en 1998. Son siège est
à Miami. À l’origine, cette société s’activait « dans la production musicale ».
Ibrahim Saandi Kemba
(Source :L’Observateur, 14 mai 2010)