Grâce à lui, la diaspora du Djoloff n’éprouve guère une nostalgie maladive envers son terroir. Par le Net, Daouda Diaw transporte aux quatre coins du globe, les couleurs, goûts et senteurs de son « royaume d’enfance ». Parti de Mbeuleukhé dans le cadre de ses études pour un « ailleurs meilleur », le jeune ingénieur informaticien est vite revenu aux siens. Il lutte à sa manière contre l’exode rural. Théoricien du développement à la base, mille projets vrillent dans sa tête…
Le 9 juin 2012, les murs de l’auberge WSD de Dahra rendent l’écho de sonorités « mbalakh ». Les invités s’entassent dans un espace aménagé pour la cérémonie de lancement du site « Djoloffactu.com ». Tous sont venus répondre à l’invitation d’un fils du terroir : l’ingénieur informaticien El Hadj Daouda Diaw.
A travers le slogan qui caractérise Djoloffactu, « notre tribune sur le Net », Daouda a migré vers une ambition… hautement numérique. Le natif de MBeuleukhé étend son ambition sur la toile. Et le site web « Mbeuleukhé.net » lui a servi de passerelle. Tout comme ailleurs, Petitecote.net lui confère le statut d’ « agent de promotion touristique ». Rien à priori ne liait ce Djoloff-Djoloff à la ville de Mbour et sa célèbre station balnéaire (avec des hôtels high standing ourlant la côte au sable fin). A pas de velours, il a investi la Toile pour pouvoir explorer le potentiel économique et la niche d’infos qui caractérisent la Petite Côte.
Il parle en s’humectant les lèvres. Un tic ? Certainement ! Le symbole d’une envie de réussite ? Probablement. Daouda est dans la cohorte de jeunes sénégalais ambitieux qui n’attendent pas ce que leur pays fera pour eux.
Il est animé de la volonté de participer à la construction du Sénégal. « L’idée de créer une vitrine sur le net pour chaque terroir m’est venue avec comme principale stratégie de faire la promotion du secteur d’activité prédominant », fait-il observer avec fierté.
Pour commencer, il s’efforce d’être le « marketer » du Djoloff à travers ses principaux secteurs d’activités : agriculture et élevage. Il a la haute conviction que chaque ressource de son terroir peut être utile pour le développement du Sénégal : du « soump » (balamitès eagyptiaca) au jujube, des épineuses fort répandues dans les brousses du Djoloff.
L’ancrage de Djoloffactu (avec la dizaine de correspondants permanents) dans le paysage médiatique sénégalais, et dans le sous-secteur de la presse en ligne, conforte El Hadi Daouda Diaw dans ses convictions selon lesquelles chaque terroir du pays doit avoir son propre portail web.
Concepteur et administrateur de Petitecote.net, l’ingénieur informaticien participe à la promotion du tourisme et de la pêche dans la petite côte sénégalaise. « Avec l’équipe de Petitecote.net, nous attendons de rencontrer très prochainement le ministre du tourisme pour voir dans quel cadre nous allons collaborer », ainsi Daouda fait-il un clin d’œil aux autorités.
Vous sentez la joie qui l’envahit dès que vous lui parlez de son « bébé », le dernier né de son groupe de presse (eh oui, Daouda a aussi l’ambition de monter une grande entreprise de presse). Il ascensionne les pommettes, vous offre gratis son éternel sourire.
Un défaut ? Lui-même répond : « Certains disent que je suis insatiable ». El Hadji Daouda Diaw théorise la fixation des jeunes sur leurs terres d’origine. « Je suis conscient que le développement de nos pays dépend en partie de l’essor des régions intérieures et de l’initiative des jeunes », dit-il.
28 ans, le natif de Mbeuleukhé - commune située à 40 Km au Nord de Dahra -, El Hadji Daouda Diaw, qui porte le nom d’une grande figure religieuse du Djoloff, a toujours été un brillant élève. « De l’école primaire au lycée, disent certains de ses anciens condisciples que nous avons rencontrés, il a toujours été premier de sa classe ». Il y a une exception à la règle sur le cursus scolaire de Daouda. Et c’est lui-même - par honnêteté, autre trait de caractère de l’homme – qui précise : « Il y a une composition où je n’ai pas été premier ». L’élève studieux et discipliné a eu droit à plusieurs prix qui récompensaient ses performances scolaires. Il a tout de même un regret : « Malheureusement, je n’ai pas réussi mon rêve d’être lauréat du concours général national », dit-il le regard figé sur le sol.
Il a dû se contenter d’une admission au concours d’entrée à l’Ecole Supérieure Polytechnique (ESP) de Dakar en 2003 au département Génie informatique. Il y a obtenu un Diplôme Universitaire de Technologie (DUT) en 2005 après un stage à la Direction des Systèmes Informatiques de la Douane où il était à la tête du projet d’automatisation du dépôt des douanes dans le système Gaïnde 2000.
L’Ecole Supérieure Polytechnique sélectionne les meilleurs élèves de DUT pour poursuivre leurs études d’ingénieur. Daouda est dans le lot ; il saisit ainsi l’occasion de poursuivre ses études d’ingénieur en 2006. La même année, EL Hadji Daouda est chef de l’équipe lauréate de la première édition au concours « Challenge Entreprendre ESP » organisée par l’administration et qui récompense les meilleures idées de projet de création d’entreprise. Un challenger est né. Même si l’Etat n’a pas tenu sa promesse de financer leur entreprise évaluée à hauteur d’un milliard cent millions, cela aura au moins réveillé en lui l’esprit d’entreprise qui sommeille en chaque polytechnicien.
En 2008, il obtient un diplôme d’ingénieur après un stage de six mois portant sur une étude « des projets multi sites et de l’ingénierie logicielle distribuée », effectuée dans une succursale d’une multinationale française. Il a d’ailleurs été recruté dans cette société, avant même l’obtention de son diplôme. Il y travaille sur plusieurs projets informatiques avec de grands clients, notamment le gouvernement français et d’autres grands groupes européens.
Admirateur du beau, Daouda aime les écrivains au style exubérant. Il est par ailleurs adepte de la littérature sacrée. Comme tout enfant de son Mbeuleukhé natal, il y a fait l’école coranique dès le bas âge.
Musulman pratiquant, El Hadj Daouda Diaw respecte les cinq prières de la journée. Membre de l’OCI (Organisation des célibataires invétérés, à ne pas confondre à la prestigieuse institution regroupant les pays musulmans), l’ingénieur informaticien n’oublie sans doute pas en ces moments de dévotion de solliciter les faveurs d’Allah, comme avoir une houri [1] sur terre.
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(Source : Leral, 27 août 2012)
[1] Vierges dans le Paradis qui seront la récompense des bienheureux