Discours du Ministre de la Communication et des Télécommunications, Président du Comité National pour le passage de l’Audiovisuel Analogique au Numérique (CNN)
lundi 25 octobre 2010
Madame la vice Présidente,
Monsieur le Secrétaire Permanent de la Stratégie de croissance Accélérée,
Madame, Messieurs les Directeurs Généraux des Radios et Télévisions publics et privées,
Messieurs les Directeurs Généraux des structures publiques,
Messieurs les Représentants du secteur privé des Télécommunications et des TIC,
Messieurs les conseillers Techniques et représentants des Ministères,
Messieurs le Représentants des organisations professionnelles,
Mesdames et Messieurs
La technologie numérique est en train de transformer profondément la vie économique. L’éducation, la santé, le commerce et aujourd’hui l’audiovisuel sont de plus en plus impactés par le numérique.
Les conséquences dans ce secteur sont si importants que tous les pays se sont engagés dans l’exercice de migration vers le numérique conformément au traité international appelé « Accord GE06 » initié par l’Union internationale des Télécommunications (UIT) et qui a fixé la date limite de cette migration au 17 juin 2015.
Aux USA et en Europe, les stratégies nécessaires ont été élaborées et mises en œuvre depuis le début des années 2000 et s’achèveront progressivement à partir de 2011. En Afrique, quelques pays sont déjà à l’ère de la Télévision Numérique Terrestre, mais globalement le continent accuse encore un retard considérable dans la prise en charge de cette question.
Au Sénégal, la télévision numérique existe déjà avec nos opérateurs MMDS et satellitaires, mais il faut reconnaître qu’il reste encore beaucoup à faire car la diffusion hertzienne occupe encore une place très importante dans notre paysage audiovisuel.
Le passage de l’audiovisuel analogique au numérique consiste donc à arrêter la diffusion analogique des chaines de télévision et de radio, et le remplacement par la diffusion numérique.
Les acteurs impliqués dans ce processus de migration au numérique sont les structures audiovisuelles, les acteurs des télécommunications, d’Internet et de l’informatique, les autorités de régulation, les pouvoirs publics et les populations.
Mesdames et Messieurs
Au-delà des directives de l’UIT, la généralisation du numérique est un must. Le numérique offre en effet plus de programmes, l’accès à de nouveaux services, l’augmentation de la capacité de transport des réseaux de télévision, la facilitation de la compatibilité et l’interconnexion des services proposés aux usagers, l’amélioration de la qualité de restitution des images et des sons au niveau de la réception et le développement d’applications interactives de la télévision.
Très bientôt, tous les programmes seront accessibles sur tous les réseaux et sur toutes sortes de terminaux. Le téléspectateur composera son programme, comme il l’entendra, à sa guise. Sa mobilité ne sera plus une contrainte.
Mais au-delà des nouveaux usages qui vont se développer, il s’agit surtout de l’avènement d’une nouvelle économie et dans laquelle la convergence entre médias et télécommunications va s’accélérer. Une nouvelle économie, avec de nouveaux marchés, à très fort potentiel de croissance. Nous sommes déjà dans la révolution, c’est-à-dire une révolution économique, sociale et culturelle. Nous sommes déjà dans l’avenir. Nous devons y aller vite et bien.
Le Sénégal est pleinement engagé dans ce nouvel âge du numérique. Mais devant les immenses opportunités qui s’offrent à nous, nous devons nous donner les moyens de bien gagner les grands combats du siècle, les combats pour le futur et les combats du futur.
Et la meilleure arme dans cette arène c’est sûrement l’arme du numérique.
C’est avec cette ambition que le Chef de l’Etat a décidé de porter le volet NTIC du Nepad, de lancer le Fonds de Solidarité Numérique, de mettre en œuvre toute une politique avant-gardiste dans le domaine des TICS au Sénégal, et pour ce qui nous intéresse aujourd’hui, a décidé de mettre en place le Comité National pour le numérique (CNN) par arrêté primatorial. Selon les termes de l’arrêté, le CNN, Structure d’orientation stratégique, de coordination et de pilotage est chargé de coordonner et d’orienter les actions menées en vue de la numérisation de la diffusion hertzienne de la télévision, de l’arrêt complet des émissions analogiques et de la réutilisation des fréquences ainsi libérées.
Il officialisera très bientôt le calendrier d’extinction totale de la télévision analogique dans notre pays. Les différentes régions, les différents départements, basculeront tour à tour au tout-numérique à des dates qui seront indiquées. Vous voyez donc bien que c’est une nouvelle ère de l’audiovisuel qui démarre. N’est- il pas plus juste de parler d’une nouvelle ère des télécommunications, des TICs et des services ? Oui, c’est bien cela l’ère de la TNT, la Télévision Numérique Terrestre. Cependant, avec cette volonté socialement responsable du Chef de l’Etat, la TNT, c’est aussi l’ère de la « Télévision Numérique pour Tous » (TNT) devant être disponible et accessible et à peu de frais. Ce sera là naturellement une priorité pour le service public de la télévision.
Nous devons, compte tenu du retard accusé par notre pays, réaliser en très peu de temps le basculement complet de la télévision traditionnelle ou analogique vers la télévision numérique ; c’est un objectif ambitieux certes, mais réaliste à condition de se mettre au travail sans plus tarder. On ne basculera pas dans le tout numérique du jour au lendemain. Le processus sera graduel et progressif. Il s’effectuera région par région. L’efficacité et le pragmatisme seront les maîtres mots dans ce domaine. Je suggère d’ailleurs que, très rapidement, des expérimentations grandeur nature soient lancées.
Le CNN arrêtera au préalable un schéma national de basculement vers le numérique qui devra être soumis à la validation du Chef du gouvernement. Pour se faire, le CNN associera toutes les parties prenantes de ce projet, gérera la communication en direction des sénégalais et leur apportera toute l’information et l’assistance qui leur sont nécessaires.
Par ailleurs, pour l’avènement d’une télévision numérique pour tous, l’Etat du Sénégal, en rapport avec le CNN étudiera les voies et moyens pour la création d’un Fonds d’accompagnement du numérique pour aider financièrement les foyers les plus modestes.
Pour que les sénégalais soient bien informés des enjeux, le Gouvernement lancera une campagne de communication pour leur recommander de privilégier l’achat de téléviseurs numériques. Et nous fixerons, comme cela existe dans d’autres pays, une date limite pour la généralisation de ces matériels à la vente. Une campagne nationale de communication sera lancée afin de garantir l’information des consommateurs sur les conséquences de l’extinction de la diffusion analogique des services télévisés et de la modernisation de la diffusion audiovisuelle.
Nous demanderons aussi à ce que la réglementation soit modifiée pour ne plus délivrer que des autorisations numériques dans le domaine de la télévision, pour, au besoin, le retrait par le CNRA, des licences analogiques et pour une nouvelle politique d’allocation des ressources numériques.
Le basculement de la télévision vers le numérique va permettre d’arrêter la diffusion analogique des chaînes historiques et, par conséquent, de libérer des fréquences. C’est le « dividende numérique ». C’est le socle sur lequel repose les possibilités de développement des nouveaux services à fort potentiel qui utiliseront ces fréquences : la télévision sur mobile et la télévision en haute définition, naturellement, mais aussi des services avancés de télécommunications comme l’accès, en mobilité, à l’internet haut débit.
Ces fréquences sont une partie intégrante du domaine public, du patrimoine national et elles doivent donc être utilisées dans l’intérêt commun, et cela, de la meilleure façon possible. Le schéma de réutilisation des fréquences libérées, réalisé par le CNN, devra donc procéder à des choix aux multiples enjeux, économiques, industriels, mais aussi sociaux et culturels. La problématique du dividende numérique, permettez moi de le rappeler, peut être formulée comme la révision du partage des ressources de fréquences notamment UHF entre services numériques terrestres audiovisuels et nouveaux services de communication électronique.
Pour des questions de transparence et puisqu’il s’agit d’un enjeu national d’une grande importance, le gouvernement invite le Parlement à créer une commission dite du dividende numérique dont la composition relèvera du congrès lui-même afin de lui permettre de le consulter sur la question des fréquences.
Plusieurs département sont interpellés, surtout ceux du commerce et de l’industrie quant aux dispositions à prendre pour, qu’à compter d’une certaine date, les téléviseurs vendus par les industriels aux distributeurs d’équipement électronique grand public et aux consommateurs sur le territoire national intègrent un adaptateur permettant la réception des services de la télévision numérique terrestre. Ne doivent- ils pas, d’ailleurs, de concert avec les commissions techniques du CNN, aller vers des critères de labellisation des terminaux « Prêt pour Numérique » pour que les terminaux permettant la réception des services de télévision numérique soient aisément identifiables protégeant ainsi les usagers et les consommateurs.
Les enjeux économiques, notamment industriels, sont primordiaux car lancer rapidement des services innovants, c’est relancer l’industrie des TICS qui occupe une place de choix dans notre SCA ; c’est aussi prendre des places à l’exportation et donc développer nos emplois. Les enjeux sociaux et culturels sont tout aussi essentiels. Le développement de nouveaux services de contenus, le renforcement des services existants, devront favoriser une création de qualité tout en répondant aux besoins d’information, de divertissement, d’éducation de nos concitoyens, bref les services de l’avenir à l’évidence. Nous devons donc, à l’instar de plusieurs autres pays dans le monde nous doter d’une stratégie nationale pour l’utilisation du "dividende numérique. Le CNN va s’y attacher, et ceci a déjà commencé, j’en suis sûr. L’horizon pour les acteurs économiques doit être fixé.
Mesdames Messieurs, la création du CNN donne, en définitive , le signal dont notre industrie des TICS a besoin pour engager les actions de développement des équipements et des services dans un contexte de compétition mondiale. Elle constitue aussi l’acte fondateur premier en ce qu’il déclenche le processus d’extinction totale de l’analogique, l’intensification de la couverture numérique du territoire et l’avenir du dividende numérique.
Les travaux du CNN nous permettront également d’être mieux armés pour défendre nos intérêts dans les grandes négociations internationales et sous régionales sur les fréquences. Car nous devons naturellement, dans ce domaine, comme dans beaucoup d’autres, partager notre vision avec nos voisins de la sous région. C’est aussi une question de sûreté et de sécurité en matière de gestion des fréquences.
Nous devons enfin adapter notre législation sur plusieurs points. Il faut définir le régime juridique de la télévision sur les mobiles et en haute définition. Il faut également prendre les dispositions nécessaires pour le basculement vers le numérique.
Mesdames, Messieurs,
Pour tous les sénégalais, le passage au numérique constituera un progrès remarquable et apportera des opportunités de développement fort intéressantes : davantage de choix, davantage de services. Pour nos industries TICS, de l’audiovisuel, des télécommunications, c’est un nouveau challenge, un nouvel avenir, un destin nouveau, de nouveaux espaces, de nouveaux marchés mais aussi de nouvelles frontières à repousser. La première des frontières à repousser est celle de l’engagement.
Pour le Chef de l’Etat, pour notre pays, pour nous tous, le passage au numérique est un grand projet.
Le Chef de l’Etat appelle chacune et chacun d’entre nous à s’y engager résolument.
Vous pouvez compter sur la mobilisation des pouvoirs publics, dont l’une des missions essentielles est bien de préparer l’avenir. Vous pouvez en particulier compter sur la disponibilité et l’engagement du Ministère de la communication qui préside le CNN pour faire cette révolution avec vous.
Je vous remercie.
Moustapha Guirassy
Ministre de la communication et des Télécommunications
25 octobre 2010