Développement des TIC : Quand le numérique remet en cause l’accès à une information fiable
jeudi 14 septembre 2017
Dans le cadre du cycle de conférence des « Mardis du numérique », la Maison de la presse a abrité, avant-hier, une matinée de discussion sur le thème : « Les médias dans la tourmente du numérique : régulation ou libre expansion ». Si l’avènement du numérique a occasionné la démocratisation de l’information, l’accès à une information fiable pose encore problème dans le secteur des nouveaux médias qui sont obligés de concilier expansion et régulation.
La presse classique est-elle en train de céder face au développement exponentiel des nouveaux médias ? La réponse semble évidemment négative au vu des dérapages qui font légion sur les réseaux sociaux. Ces déviations résultent d’un manque de recoupement, d’absence de sources, de morale et de contexte dans l’information donnée… Face à cette situation, le professionnalisme des hommes de médias classiques suffit encore pour garantir longtemps à la profession du journalisme crédibilité et longévité.
Toutefois, dans un contexte d’explosion des Technologies de l’information et de la communication (Tic), a noté Ibrahima Nour Eddine Diagne, président de « African performance institute », l’accès à l’information est remis en cause par le numérique avec des contraintes liées, entre autres, à la rentabilité de l’information, la source, la morale, la réputation, l’éthique et la déontologie. Il s’agit, en effet, selon lui, de principes qui ne sont pas intégrés dans l’information fournis au niveau des réseaux sociaux. Faisant l’introduction de la thématique de la conférence d’ avant-hier des « Mardis du numérique », il a indiqué que les réseaux sociaux, contrairement au journalisme, n’ont pas de principe. On est en présence d’un système dans lequel n’importe qui publie n’importe quoi et n’importe comment. Ainsi, d’après Ibrahima Nour Eddine Diagne, il y a un véritable problème de recherche de vérité. « Les gens sont en face à des sources libres et à celles régulées », a-t-il fait observé. Comme dans chaque secteur, l’irruption du numérique dans le secteur des médias a complétement changé leur visage.
« On avait l’habitude de recevoir l’information par le biais de la radio, la presse écrite ou la télévision. Mais aujourd’hui, on reçoit l’information à travers des réseaux que nous ne maîtrisons pas. C’est pourquoi les repères sont maintenant brouillés. On ne se sait plus par quel pied danser », a souligné Abdoulaye Sakho, professeur agrégé en droit à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Selon lui, au Sénégal, les entreprises de presse n’ont pas su anticiper la révolution numérique. Elles l’ont plutôt « subi ». Cela, si l’on se base sur les nouveaux métiers que demandent cette révolution et la manière de traiter l’information. M. Sakho a attiré l’attention sur le déficit d’organisation et d’innovation.
Sensibiliser les citoyens
Si l’actualité révèle des dérapages au niveau des réseaux sociaux, le Sénégal dispose pourtant d’un arsenal juridique impactant les usages, les pratiques et les comportements sur Internet. A en croire Dr Mouhamadou Lô, expert en Droit numérique et conseiller juridique de l’Adie, dans notre pays, « il n’y a pas de vide juridique, tous les comportements sont impactés par les dispositifs juridiques ». De son point de vue, l’Etat doit se donner les moyens de pouvoir sensibiliser les citoyens car « le tout répressif ne peut pas régler le problème ». M. Lô a ainsi appelé à une autorégulation de la part des usagers.
« Ce qu’on ne peut pas faire dans la vie réelle, on ne doit pas le faire sur le numérique. Il faut qu’il y ait un changement de comportement avant même qu’on parle de loi. C’est un esprit de société… », a-t-il soutenu. L’expansion des nouveaux médias, qui participent à la vitalité de la démocratie, est aussi une menace à la liberté individuelle tant certains droits et principes sont violés dans l’espace virtuel.
Mouhamadou Lô a insisté, dans ses recommandations, sur la nécessité d’adapter et de renouveler la législation, en faisant le link entre les normes et les comportements, mais également de responsabiliser les acteurs à travers la sensibilisation et la formation.
Ibrahima Ba
(Source : Le Soileil, 14 septembre 2017)