Délocalisation des centres d’appels : La controverse se poursuit
vendredi 22 octobre 2004
La délocalisation des centres d’appels est sous les feux de l’actualité aussi bien en France que dans certains pays africains dont le Sénégal, le Maroc et la Tunisie. Pour cause : un projet d’arrêté brandi par le ministre français de l’Economie et des Finances, Nicolas Sarkozy. Lequel projet d’arrêté est relatif à l’information des consommateurs sur la localisation géographique des centres d’appels téléphoniques. En substance, il stipule que tout fournisseur de biens ou de services qui utilise les services d’un centre d’appels pour émettre ou recevoir des communications téléphoniques est tenu d’informer ses correspondants de la localisation géographique de ce centre d’appels.
Mieux, cette information doit être délivrée en début de communication et figurer sur tous les documents comrrierciaux et publicitaires mentionnant les coordonnées du centre d’appel. Si l’entreprise a recours à des centres d’appels multiples et géographiquement distincts pouvant être joints soit par un seul numéro d’appel, soit par plusieurs numéros, leur liste doit figurer sur tous les documents mentionnant ces numéros. Mais, ce fameux projet d’arrêté attend depuis, sa parution au Journal Officiel, normalement prévue le 14 octobre 2004 et reportée à une date non précisée par Bercy. Seulement, de l’avis du quotidien Walfadjri, dans sa livraison du week-end du 16 au 17 octobre derniers, « l’arrêté Sarkozy a été différé sur arbitrage du Premier ministre, Jean-Pierre Rafarin. Il a été décidé de remettre au début de l’année 2005 l’examen de cette proposition... ».
Malgré cela la controverse continue de s’installer dans un secteur en nette progression et à fort potentiel d’emplois aussi bien au niveau de la Métropole que dans les pays africains cités plus haut. La mesure s’attaque directement aux sous-traitants étrangers de gros clients français comme Orange, La Poste, Tiscali et tant d’autres. Dans ce lot, le Maroc et le Sénégal, leaders en la matière sur le continent figurent en pole position sur la liste des pays qui sont sous la menace. Aujourd’hui, la délocalisation trouve la part belle sur le marché de la plate-forme téléphonique en Afrique, où certains pays disposent d’infrastructures télécoms de qualité et de main d’oeuvre qualifiée. Ainsi, avec les centres d’appels, il est impossible, pour un client, de savoir qui répond et de quel endroit dans le monde, lorsqu’il appelle le service clientèle. Les centres d’appels délocalisés au départ, de Paris vers la Province, sont désormais situés au Maroc, au Sénégal, à 1’Ile Maurice, des régions très attractives pour cette activité dont le coût principal est constitué par les ressources humaines et les charges sociales. Par exemple, Pcci (Premium contact center international), une entreprise sénégalaise de référence en termes d’effectifs, travaille avec des entreprises installées en France et en Grande-Bretagne, est passée en deux ans d’une centaine d’employés à plus de 700 salariés en 2004.
CalI Me est aussi une entreprise sénégalaise, filiale du Groupe Chaka, qui s’est positionnée en moins de deux ans dans ce segment, avec plus d’une centaine d’employés. Mais, pour son Directeur général, Malick Seck, CalI me s’est d’abord orienté sur le marché sous-régional ouest-africain, avant de se lancer dans l’aventure de l’externalisation il y a quatre mois, à l’occasion du Salon Européen des Centres de contact et de la relation client (Seca) qui s’est tenu en mai dernier à Paris. Toutes choses qui laissent croire que CalI Me ne serait pas touché sur l’ensemble de son activité, mais comme ses confrères, cette entre prise compte beaucoup sur les partenaires européens qui proposent des marchés importants.
Ainsi, cette décision ministérielle s’avère être une sombre menace pour l’économie sénégalaise, dans la mesure ou le secteur des centres d’appels a un fort potentiel d’emplois. Il absorbe une grande partie des diplômés des business school qui fleurissent sur la place de Dakar. ais, tout porte à croire que les entrepreneurs sénégalais et africains d’une manière générale ne sont pas seuls dans cette bataille. A côté, l’ Association française des centres de relation clientèle (Afrc) est sur ses gardes. Les quelque 90 entreprises qui ont eu à participer à la réunion du 11 octobre, à Bercy, autour du ministre délégué à l’Industrie, Patrick Devedjian, ont présenté les caractéristiques et enjeux de leur secteur d’activité. Pour l’Afrc, les centres d’appels emploient actuellement 210000 salariés en France, dont 80 % en contrat à durée indéterminée, moins de 9000 emplois étant délocalisés. Toutes idées qui tranchent nette avec celle selon laquelle la délocalisation des centres d’appels constituerait une menace pour l’emploi dans l’Hexagone.
Mandiaye, Thiobane
(Source : Nouvel horizon, 22 octobre 2004)