De Tigo à Expresso, l’histoire de Fatou Sow Kane, la femme juriste qui n’était pas promise aux télécoms
jeudi 8 mars 2018
Au commencement, rien de prédestinait Fatou Sow Kane aux télécommunications. Après une licence en droit privé à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar et un bachelor à l’Institut Africain de Management, cette trentenaire intègre pourtant Tigo en tant que commerciale en l’an 2000. « C’est le fruit du hasard puisque je n’ai pas fait de formation en télécoms ou TIC », s’étonne celle qui gravit rapidement les échelons au sein de la société de téléphonie qu’on appelait alors Sentel. Elle y passe huit bonnes années, migrant du service clientèle vers le service marketing avant d’être engagée par Expresso convaincue par « le challenge de découvrir quelque chose de nouveau ». « Tigo a été certes une très bonne école pour moi. Novice dans les télécommunications, j’ai pu comprendre comment ça marche aussi bien au niveau technique que commercial. Mais quand j’ai eu la proposition, en 2008, pour rejoindre Expresso qui venait pour lancer une nouvelle opération, pour moi, c’était un défi que je ne regrette pas aujourd’hui », explique fièrement Fatou Sow Kane.
Au cœur de l’histoire à Expresso Sénégal
C’est ainsi que l’ancienne étudiante de l’UCAD et de l’IAM débarque chez l’opérateur de téléphonie Expresso Sénégal pour être la directrice des produits et services. Elle a pris une part active dans les grands moments de la filiale de la branche internationale de Sudatel. Allant du lancement de la technologie CDMA en 2009 à la grande campagne autour du téléphone fixe Yobalema en 2010, passant par le démarrage de la 3 G en 2010. Pour ce qui concerne la 4G, son nouvel employeur n’en dispose pas encore tout comme Tigo. Mais Fatou Sow Kane minimise : « Il n’y a aucune gêne dans ce sens d’autant plus que le client, ce n’est pas vraiment la technologie qui l’intéresse, c’est plutôt la facilité d’accès au service et la satisfaction. » Elle se permet même d’être provocatrice en soulignant « qu’on est tous en retard avec la 5G qui se déploie un peu partout dans le monde ». De grands éclats de rire qu’elle arrive à circonscrire dans son modeste bureau, mais neuf, avec un siège qui l’est tout autant accompagne ces propos.
Aux commandes du E-Money by Expresso
La Chef de projet de la plateforme digitale financière lancée dernièrement estime que l’initiative était venue à son heure. « Je pense tout simplement qu’en tant qu’opérateur, on a un rôle important à jouer dans l’inclusion financière. Vu le taux de bancarisation assez faible en Afrique et plus précisément au Sénégal, et qui se justifie par le fait que la plupart des populations n’ont pas la possibilité financière et intellectuelle d’accéder à des services bancaires. » Et, à l’en croire, l’adoption du téléphone mobile qui « résume nos vies » devrait permettre de révolutionner le Mobile Money grâce à un accès plus facile aux produits financiers. Sauf que Expresso est le troisième opérateur téléphonique au Sénégal à se lancer dans le Mobile Money. « Le plus que nous apportons, ce sont aussi ces services innovants qu’on va mettre en marche durant ce mois de mars, dont le micro-crédit qui jouera pleinement son rôle dans l’inclusion financière » en permettant à « ces groupements de femmes de bénéficier de petits financements pour leurs activités aussi bien formelles qu’informelles ».
L’interopérabilité absente du fait des autres opérateurs
Ce service de E-Money Micro Crédit va fonctionner comme un autre qui existe déjà pour nos clients du mobile et dénommé « Diamp (urgent en Wolof ) qui leur permet d’emprunter du crédit et de le repayer aussitôt, une fois qu’ils auront rechargé du crédit. « Ce sera le même principe à la différence qu’au lieu de recevoir du crédit, vous allez recevoir de l’argent dans votre compte E-Money que vous pourrez utiliser pour le financement d’activités ou plus simplement pour des besoins quotidiens. » Les montants seront « assez accessibles et qui nous permettront de rentrer dans nos fonds » varieront entre 5.000 et 20.000″, et « cela dépendra du profil du client emprunteur ». L’autre grosse innovation avec le lancement du E-Money Expresso aurait pu être l’interopérabilité. Sauf que, pour le moment, ce n’est pas encore une « volonté commune parce que tous les acteurs devraient avoir cette volonté-là de s’inscrire dans l’interopérabilité qui permettra d’utiliser ce fonds de masse monétaire virtuelle quel que soit l’acteur ».
Marquer son empreinte dans la transformation digitale au Sénégal
Etre femme n’exclut pas d’avoir des ambitions et même dans le numérique. Fatou Sow Kane ne fait pas partie de celles qui se montrent intimidées à l’évocation de la place qu’elles pourraient occuper dans le secteur. La directrice de la Stratégie & des Projets de Expresso Sénégal compte pleinement jouer son rôle « dans cette transformation digitale qui commence à s’opérer dans notre cher Sénégal », mais pas en dehors de son employeur. « Je ne dirais pas quitter Expresso. Pas du tout. Mais marquer quand même mon empreinte. Et si je dis marquer mon empreinte, cela veut dire que je suis prête à contribuer fortement à toute initiative aussi bien venant des acteurs ou du gouvernement qui donnera la possibilité au Sénégal de se développer digitalement. » Déjà 18 années dans le monde des télécoms au Senegal, dont neuf passées au sein de la filiale sénégalaise de Sudatel, mais Fatou Sow Kane , loin d’être tentée d’aller voir ailleurs, veut continuer à écrire l’histoire avec Expresso dans un pays en pleins bouleversements digitaux encadrés par le plan SN2025.
(Source : CIO Mag, 8 mars 2018)