C’est officiel, Orange a lancé sa banque 100% digitale en Côte d’Ivoire, le 23 juillet. Soutenant la stratégie de diversification du groupe, Orange Bank Africa entend participer au renforcement de l’inclusion financière sur le continent, en proposant des crédits à partir de 5 000 Fcfa, disponibles en quelques secondes depuis son mobile, ainsi qu’une épargne rémunérée.
En juillet 2019, Orange obtenait son agrément de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) pour lancer sa banque digitale dans la zone UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine), « Orange Bank Africa », une SA détenue par Orange à 75% et par NSIA à 25% (groupe de services financiers intégrant des produits et services bancaires et d’assurances).
« En 2008, nous avons lancé Orange Money (portefeuille électronique dématérialisé pour l’achat de crédit téléphonique et les transferts d’argent) qui est devenu l’une des plus belles histoires du groupe. Orange Money a bouleversé les sociétés africaines, s’est imposé comme véritable alternative au paiement en liquide, jusqu’alors incontournable, et a démocratisé l’accès aux services financiers (...) L’histoire ne pouvait donc pas s’arrêter là », a introduit Stéphane Richard, CEO du groupe Orange, lors de la conférence de presse virtuelle qui s’est tenue jeudi 23 juillet, à l’occasion du lancement d’Orange Bank Africa (OBA) en Côte d’Ivoire.
Aujourd’hui, Orange Money, c’est plus de 50 millions de clients dans une quinzaine de pays. Surfant sur cette réussite, le groupe cherche à « démocratiser » l’accès aux services bancaires en Afrique, à travers OBA qui devrait faire l’objet d’un déploiement progressif dans 3 nouveaux pays d’ici la fin de l’année 2021 (ndr : Sénégal, Mali et Burkina-Faso). « Orange Banque Africa propose des produits de crédit et d’épargne accessibles facilement et instantanément depuis Orange Money. C’est une très belle étape, car le crédit et l’épargne sont 2 facteurs indispensables de développement économique. Leur disponibilité sur Orange Money, permettra d’aller un cran plus loin pour répondre à la problématique de l’exclusion d’une immense majorité de la population, des services bancaires traditionnels » a indiqué Stéphane Richard, insistant sur le facteur « inclusif » du nouveau service proposé par Orange en Afrique.
Une banque digitale pour plus d’inclusion financière
A travers le canal Orange Money, OBA propose donc une offre d’épargne et de microcrédit qui va permettre à ses clients d’emprunter à partir de 5.000 FCFA (ndr : soit 7.6€) quasi-instantanément depuis leur mobile, quel que soit leur lieu de résidence. Ce faisant, le groupe cherche à se positionner comme un acteur de référence en matière d’inclusion financière dans la sous-région, au moment où la pandémie est en train de bouleverser les usages, mais aussi les priorités.
« Les nouvelles technologies sont nécessaires pour renforcer l’inclusion financière et soutenir le développement économique, comme le mobile money l’a prouvé au cours des dernières années. L’activité bancaire est nouvelle pour Orange en Afrique. Elle s’inscrit en parfaite cohérence avec notre stratégie d’opérateur multiservices et notre volonté d’être moteur de la transformation digitale du continent » a poursuivi Stéphane Richard. De son côté, Jean Kacou Diagou, président du groupe NSIA s’est dit très heureux de ce partenariat, rappelant que depuis près d’un quart de siècle, le groupe élaborait « des solutions de banque et d’assurance adaptées aux besoins des populations africaines ».
Enfin, Alioune Ndiaye directeur général Orange Middle East Africa s’est également félicité de participer à la démocratisation de l’accès au crédit sur un continent singulièrement sous-bancarisé (taux de bancarisation d’environ 20%). « Ce sera la banque du plus grand nombre. Elle permettra au petit commerçant qui tournait avec un stock de 30.000 Fcfa de pouvoir emprunter 50 000 Fcfa pour vendre plus et créer plus d’emplois et de richesses », a-t-il déclaré, non sans rappeler que le groupe représentait jusqu’à 10% du PIB de certains pays où il était implanté.
Comment cela fonctionne ?
Pour être client d’OBA, il faut disposer d’un compte Orange Money (sans exigence d’ancienneté, ni frais d’ouverture) qui donne accès à 2 produits. « Prêt Tik Tak », pour accéder instantanément au crédit (à partir de 5 000 Fcfa) et « Epargne Tik Tak », qui permet d’épargner à partir du premier franc, rémunéré à 3,5 % HT (le taux réglementaire de la BCEAO). Toutes les démarches sont réalisées en quelques secondes sur mobile ou en mode USSD. Les procédures ont été simplifiées à l’extrême, afin d’éviter toute tracasserie administrative. L’ouverture d’un compte se réalise sur simple présentation d’une pièce d’identité ou d’une carte de résident pour les étrangers. Les prêts s’élèvent jusqu’à 500 000 Fcfa soit près de 760 euros et la durée de remboursement varie de 1 à 3 mois (correspondant aux cycles de revenus saisonniers).
Alors que NSIA et Orange sont partenaires, ils se retrouvent également tous deux acteurs bancaires sur un même périmètre, mais cela n’ébranle pas la quiétude du président de NSIA. « Nous ne percevons pas Orange Bank Africa comme concurrent, car nous n’avons pas les mêmes cibles. Elle s’adresse surtout au secteur informel ainsi qu’aux petits commerçants. En revanche, les sociétés de microcrédit ont plus à craindre que nous... En ce qui nous concerne, c’est une offre plutôt complémentaire et à la longue, si nous avons de nouveaux clients qui recherchent de petits crédits, nous les orienterons vers Orange Bank Africa, car nous ne savons pas le faire », assure Jean Kacou Diagou, avant d’ajouter qu’à terme, le groupe pourrait bien suivre Orange Bank Africa vers d’autres contrées africaines.
Un historique financier reposant sur les data d’Orange Money
« Les banques traditionnelles s’appuient sur un réseau d’agences contrairement à Orange Bank Africa et derrière cette différence se trouvent l’accessibilité et l’instantanéité de notre réponse. Nous avons les capacités de répondre en moins de 10 secondes. C’est non seulement un engagement fort, mais aussi une prouesse technique [rendue possible grâce à la solution SaaS de Temenos, une entreprise informatique suisse spécialisée dans les applications bancaires, ndlr] qui fait toute la différence avec les banques classiques », selon Jean Louis Menann-Kouame. « Le système apprenant de criblage et de scoring des clients, va nous permettre d’optimiser la capacité de remboursement, car nous prêterons à ceux qui ont été détectés comme ayant des comportements de remboursement en adéquation avec les durées de remboursement prévues », a ajouté Patrick Roussel, directeur des Services financiers mobiles sur la zone Afrique et Moyen-Orient. Afin de se préserver des « mauvais payeurs », Orange Bank Africa profitera de l’historique des clients d’Orange Money pour mesurer les risques encourus.
Lancée fin 2017, Orange Bank a connu des débuts poussifs en France, mais le board Afrique est confiant et table sur 10 millions clients pour un chiffre d’affaires de 100 millions d’euros d’ici 2025. « Nous sommes toujours en phase d’investissement en France » a expliqué Paul de Leusse, directeur général adjoint, en charge des Services financiers mobiles du groupe, qui pense que « le point mort [seuil de rentabilité] sera atteint assez rapidement en Afrique, car Orange Money constitue un levier incroyable » avec ses 50 millions de clients.
Marie-France Réveillard
(Source : La Tribune Afrique, 25 juillet 2020)