Conférence sur le Netart : L’art du réseau et en réseau expliqué au public
samedi 25 mars 2006
La conférence sur le Netart s’est tenue, hier, à l’Institut français Léopold Sedar Senghor. La salle de cinéma de l’Institut est remplie de curieux et de quelques connaisseurs. Et en-dehors de quelques très brefs incidents techniques inhérents à ce genre de matériau - le Net -, problèmes de connexion donc, l’exposé de Karen Dermineur, la conférencière, a été bien reçu et a suscité de nombreuses questions.
L’auditoire a réussi à passer outre le jargon incontournable entourant cet univers du Netart pour y entrer et se laisser charmer à la fois par Karen, plus pâle encore que d’habitude, le trac sans doute, et par les œuvres qu’elle a présentées. Après une brève introduction et un historique de cet art du Web (dont elle situe les débuts en 1993), Karen Dermineur est enfin arrivée aux exemples concrets en montrant certains travaux, des œuvres, des installations, des circuits ou autres jeux sur le réseau. En effet, ce concept d’art sur la toile fait penser à ces installations dont fourmille depuis quelques décennies l’art contemporain. Avec bien entendu la différence, de taille, qu’il s’agit ici avant tout d’œuvres virtuelles. Elles ont donc cette capacité extrêmement spécifique - et qui les définit - de toucher un public potentiel absolument énorme, beaucoup plus que n’importe quelle exposition dans une galerie ou un Musée, en même temps qu’elles n’ont pas de « véritable » existence, ne peuvent que très rarement se concrétiser, prendre forme pour exister dans notre espace vital quotidien.
Mais effectivement les œuvres et travaux proposés, montrés, démontrés, sont très parlants. La « google house », par exemple, grâce à laquelle chacun peut construire une maison, un domaine, avec comme outils de départ les millions d’images glanées par le moteur de recherches Google dans sa mémoire, autour d’un thème précis, défini par l’internaute qui participe ainsi directement à cette création. De même, la défragmentation d’images pour recréer des images nouvelles, infinies.
La démarche a été inventée, mise en place, par l’artiste, le ou les créateurs, mais le travail se poursuit de manière interactive par l’intervention patiente et active de tous les « clients », les spectateurs potentiels.
C’est dire à quel point cet art du réseau et en réseau ouvre des possibilités inattendues et pose de nombreuses questions quasi philosophiques, dont il n’a pas été question lors de la conférence ni du débat qui a suivi. Mais on pourrait évidemment réfléchir à l’existence de l’art, de cet art, de ces œuvres, à la fonction de l’artiste et à celle de l’internaute qui passe - dans certains cas - du statut de spectateur passif à celui actif, interactif, de créateur associé.
Question, aussi, de savoir jusqu’où ira l’Homme, et surtout jusqu’où iront les « artistes » puisque le monde réel, concret, ne leur suffit plus et qu’ils se sont désormais emparé de cet immense espace virtuel où tout reste encore à inventer. Et, qui sait, demain peut-être d’autres espaces plus ou moins réels, ou bien encore réussira-t-on à formaliser, à concrétiser le virtuel... ? Mais est-ce bien là leur but ? L’avenir du Netart -que l’on espère retrouver lors de la prochaine Biennale de Dakar- nous le dira sans doute.
Laurence GAVRON
(Source : Le Quotidien, 25 mars 2005)